Instinct maternel ?

Nous entrons tous les trois dans la salle d’audience, elle est déjà  là . Nous adresse un grand sourire, un peu intimidé, mais en nous regardant droit dans les yeux.

Je vois son avocate réprimer une grimace en nous voyant nous installer. Elle doit penser qu’elle a hérité d’une mauvaise composition, le Tribunal par lequel sa cliente sera jugée aujourd’hui en comparution immédiate étant constitué de trois juges par ailleurs parents d’enfants en bas âge. C’est d’ailleurs également le cas de la substitut qui soutiendra l’accusation.

La présidente vérifie l’identité de Jennifer, qui ressemble à  une adolescente, fluette, minuscule, mais a en réalité 25 ans. Qui a deux enfants, et va devoir répondre de violences habituelles commises sur la plus jeune d’entre eux, âgée de six mois, ainsi que de privation de soins. Elle est d’accord pour être jugée aujourd’hui, ne veut pas de délai, “aime autant en finir tout de suite”.

On lui demande tout d’abord de nous parler d’elle-même, ce qu’elle fait de bonne grâce pour nous décrire, sourire hésitant aux lèvres et regard candide, une authentique vie de merde : elle n’a pas connu son père, qui a laissé tomber sa mère plusieurs mois avant sa naissance, et n’a jamais souhaité connaître leur enfant-accident. A dix ans, elle était régulièrement battue par sa mère, ne se rappelle d’ailleurs pas l’avoir vraiment aimée, encore moins avoir été aimée d’elle. Il lui semble avoir toujours attendu le moment où elle pourrait la quitter, et dès qu’elle en a eu l’occasion, à  peine sortie de l’enfance, elle est partie vivre avec un garçon plus vieux qu’elle, puis un autre, puis la rue, les petits vols pour manger, les squats, la chienne qu’elle avait prise avec elle pour se protéger. Les arnaques pour soutirer quelques euros aux personnes âgées qui se laissent avoir plus facilement que les autres. Le sentiment de ne pouvoir faire autrement, aucun employeur ne pouvant vouloir d’elle, sans compétence aucune, sans formation, même pas le bac. La découverte de l’héroïne, prévisible.

La rencontre avec Kevin, toxico comme elle, l’a tirée de la rue. Ils sont tombés amoureux, suffisamment pour ne jamais se quitter, arrêter l’héro (plus ou moins), se marier et faire très vite un enfant, Styvie, désiré, dorloté, “la plus belle chose de sa vie”. Kevin la bat, occasionnellement, ou plus souvent lorsqu’il a un coup dans le nez, mais elle ne lui en veut pas. Elle n’a jamais déposé plainte contre lui, et même lorsque les coups portaient plus fort que d’habitude, avait tendance à  se soigner à  la maison plutôt qu’aller chercher les ennuis à  l’hôpital. Ils avaient justement réussi à  trouver une maison, presque un taudis, mais le leur, et à  y vivre tant bien que mal, essentiellement des allocs, du peu que la famille de Kevin leur donnait parfois pour les aider, de jobs occasionnels et des coups de main des copains qui dormaient fréquemment chez eux pour quelques jours ou quelques semaines. Jennifer avait même commencé à  se demander si elle ne pourrait pas obtenir une formation par le biais de l’AFPA ou autre, afin de travailler, enfin.

Et puis un jour, la catastrophe. Lire la suite“Instinct maternel ?”

Aziz peut-il être libre ?

Ils ne se connaissent pas, mais vont se rencontrer ce jour-là  d’autant plus vite et facilement qu’ils ont le même âge, la trentaine, vivent tous les deux dans la précarité la plus extrême, sans travail ni domicile fixe, dormant dans la rue ou les foyers quand ça peut, et passant leur journée dehors, soit à  ne rien faire, seuls ou en compagnie de gens qui leur ressemblent, soit à  rechercher n’importe quoi qui puisse se convertir en nourriture, soit à  boire car ils ont ce point commun aussi qu’ils boivent, dès que possible, un peu pour le froid, un peu pour oublier, comme on dit, un peu juste pour boire.

Lui c’est Aziz, elle c’est Léa, ils ne s’étaient jamais vus, mais ce matin-là , au Parc Mitterrand1, c’est elle qui vient vers lui et l’aborde, a priori, leur version est commune pour cet épisode et tout le début de la journée, parce qu’Aziz dispose à  la fois d’une petite bouteille d’alcool, une des ces saloperies de mélanges déjà  faits qu’on vend dans les stations-service, tellement frelatée qu’en boire trop fait des trous dans l’estomac, mais peu importe ; et qu’il gesticule, tout seul comme un con, assis dans l’herbe pourtant mouillée du parc, en brandissant la dernière arnaque de la Française des Jeux, un ticket de Cash, qui vaut cinq euros à  l’achat mais comme chacun sait peut rapporter bien plus au grattage, en l’occurrence le miracle du jour pour Aziz, puisque cinquante euros : il est joyeux et déjà  un peu ivre, et dans les deux cas ça se voit et ça s’entend.

Et c’est comme ça que tout va basculer.Lire la suite“Aziz peut-il être libre ?”

  1. A Lille, espèce de grande étendue paysagée moderne séparant les deux gares, Lille Flandres et Lille Europe, bordée d’un côté par les abords du Vieux Lille, et des trois autres par des tours de bureaux et bretelles d’accès au périph’ ; de jour, c’est une sorte de plaine arpentée par des voyageurs pressés, qui évitent les groupes de jeunes qui y étudient, principalement la sexualité, et les groupes de SDF qui y picolent, le plus souvent avec des chiens en liberté ; de nuit, c’est un no man’s land un peu inquiétant, avec encore les derniers groupes précités, et pas mal de prostituées venus du Vieux Lille par les anciens remparts pour y faire leurs passes, plus ou moins dans les buissons []

E Thémidos Ménis, le retour !

Ainsi que vous ne l’ignorez pas, je ne suis pas une habituée des billets polémiques. D’abord parce que je suis nulle en politique. Ensuite parce que lorsqu’un sujet a déjà  été cent fois disséqué et débattu par d’autres qui, eux, ne le sont pas1, j’estime généralement n’avoir vraiment pas grand-chose d’intéressant à  ajouter au débat.  Parce que j’éprouve en outre des scrupules à  m’exprimer sur des sujets que je ne connais, en grande partie, que par le compte-rendu qui en est fait dans la presse. Enfin parce que je suis un peu en vrac en ce moment (notamment parce que j’ai huit audiences à  présider en onze jours, misère …), comme ce billet vous apparaîtra sans doute lui aussi.

Mais il y a quand même des moments où malgré tous les obstacles sus-énoncés, il faut que ça sorte.

Un homme bien connu des services judiciaires de Nantes est soupçonné d’avoir commis un meurtre manifestement atroce. Le Président de la République a immédiatement fait savoir qu’il recevrait la famille de la malheureuse victime, ainsi qu’il est désormais d’usage, avant de brandir publiquement l’avertissement suivant, lourd de menaces à  l’encontre des services publics chargés du suivi du mis en cause :

“Quand on laisse sortir de prison un individu comme le présumé coupable sans s’assurer qu’il sera suivi par un conseiller d’insertion, c’est une faute. Ceux qui ont couvert ou laissé faire cette faute seront sanctionnés, c’est la règle.”

Car ainsi que chacun sait depuis quelques jours dans notre beau pays, l’individu mis en examen pour le meurtre de la jeune Laëtitia, ayant fini de purger diverses peines d’emprisonnement ferme, aurait néanmoins dû faire l’objet d’un suivi par le Service pénitentiaire d’insertion et de probation nantais, ayant été condamné à  une ultime peine d’emprisonnement avec sursis assorti d’une mise à  l’épreuve pour faits d’outrage à  magistrat. Or ce suivi n’a pas pu s’exercer, ni même commencer d’être mis en place : le SPIP concerné, comprenant 17 conseillers d’insertion et de probation, se trouvait en sous-effectif, et avait dû se résoudre, avec l’aval de sa hiérarchie et des juges de l’application des peines (lesquels n’étaient eux-mêmes que trois, au lieu des quatre magistrats devant normalement exercer ces fonctions au sein du tribunal), à  “mettre de côté” 800 mesures jugées non prioritaires, au nombre desquelles figurait celle qui intéressait notre mis en cause. Lire la suite“E Thémidos Ménis, le retour !”

  1. Nuls en politique, veux-je dire. []

N’importe quoi du vendredi !

Il y avait bien longtemps que je ne m’étais pas amusé à  parcourir, via l’un des merveilleux outils statistiques dont nous disposons en cachette dans l’administration de ce blog, les intitulés des requêtes diverses tapées sur les moteurs de recherche qui ont amené les internautes chez moi (et du coup, à  balancer un petit article sans fond -je le dis dès le départ pour déranger le moins possible ceux qui voulaient pleurer un coup…)…

Et il faut reconnaître que je ne suis pas déçu ! Ce qui en revanche ne doit pas être le cas des quelques auteurs de celles que je vous ai réunies ci-dessous en petit florilège, toutes tentées sur la semaine écoulée, et qui n’ont pas, je pense, trouvé ici la réponse exacte à  leurs attentes surprenantes…

Bref, j’allais vous écrire que si l’immense popularité de nos joyeux écrits, à  Marie et moi, reposait sur ce genre de recherches, j’allais le fermer sans plus attendre et me remettre au tricot, quand soudain, rayon d’espoir et de lumière, voilà  que le Community Manager de Wikio France, car oui il y a des sites qui ont ça1, m’adresse un mail pour me proposer de publier en avant-première mondiale le classement du mois des blogs juridiques, comme la fois dernière, précitée, justement ! Et qu’est-ce que je n’y découvre-t-il pas2, après avoir accepté par pur orgueil ???3Lire la suite“N’importe quoi du vendredi !”

  1. mais eux n’ont pas Marie, mon Community Manager à  moi, qui possède entre mille autres l’avantage de pouvoir mettre en prison ceux qui ne nous lisent pas ! []
  2. Oui, la tournure est osée : et alors ? []
  3. Et hop, suspens insoutenable… []

D’un accident à  l’autre …

Un vieux (et bref) souvenir d’audience, remonté à  la surface il y a deux jours, pour des raisons évidentes …

“Ce dossier-là , je vais le garder. Il risque d’être un peu délicat à  gérer, pas techniquement, mais émotionnellement. Les homicides involontaires, c’est souvent un peu dur, mais les circonstances de celui-ci …”.

Pas de problème. Je suis auditrice de justice, je préside déjà  les trois quarts des dossiers prévus sur cette journée d’audience correctionnelle. Si la présidente veut conserver ce dossier, je ne vais pas le lui disputer.

L’audience s’ouvre sur ce dossier, qui devrait selon les prévisions du Parquet occuper une bonne partie de la matinée. A l’appel de son nom, Mme X s’avance, élégamment vêtue, manifestement très âgée mais droite comme un I. Elle décline son identité, et notamment sa date de naissance : elle a 83 ans. Pas de casier judiciaire, évidemment.

La présidente indique qu’elle est poursuivie du chef d’homicide involontaire sur la personne de Thierry L. et expose les faits, survenus alors que, comme chaque jour, Mme X était allée se recueillir sur la tombe de son défunt mari. Ayant satisfait à  ses devoirs, elle a repris son imposante berline, garée devant le cimetière, et pour s’épargner d’aller faire demi-tour au rond-point situé à  50 mètres à  droite, a traversé perpendiculairement la voie de circulation et la ligne blanche pour partir directement à  gauche.

Le cimetière est situé peu après une sortie de virage, et Thierry L., qui arrivait en moto à  une vitesse que les témoins estimeront normale, a tenté de freiner en voyant la berline traverser sa voie de circulation, mais n’est pas parvenu à  éviter de percuter son aile arrière gauche. Lire la suite“D’un accident à  l’autre …”

Accident

[ Pour tenter de me faire pardonner des histoires dures que je raconte parfois ici, en voici une autre, pourtant très dure elle aussi, mais d’une tout autre nature, et sans doute plus facile à  lire1 … Encore que. C’est en tout cas aussi ce que peut permettre la Justice des Hommes, parfois. ]

Je suis intervenu dans cette affaire alors que j’étais tout jeune collaborateur, au sein d’un cabinet pratiquant plutôt le droit des affaires, et qui avait notamment comme cliente une chaîne très connue de magasins, c’est à  ce titre que l’un des avocats associés qui étaient mes patrons avait eu à  en connaître, puis me l’avait confiée : j’étais très jeune et inexpérimenté, et peu armé pour affronter les émotions intenses qui, parfois, naissent dans une audience…

L’un des cadres supérieurs de la société, effectuant à  ce titre de nombreux déplacements à  l’étranger, était revenu en pleine nuit d’un voyage d’affaires dans un pays de l’Est, son avion atterrissant à  Bruxelles vers deux heures du matin : il lui restait ensuite une heure trente environ de voiture à  effectuer pour rejoindre son domicile à  Lille, où il travaillait également, et il avait réservé une grosse berline de location à  cette fin.Lire la suite“Accident”

  1. Elle le sera également parce que ce texte est court, pour une fois… []

Noël

Ce type, c’est un vampire.

Oui, je suis tout jeune avocat, oui, des comme lui, je veux en défendre, le plus possible et toute ma vie, et oui, je suis plus que sensible, on peut même dire hypersensible, à  la misère du monde en général, et à  celle de mes clients en particulier. Mais enfin, il n’en reste pas moins que Noël, il ressemble à  un monstre, un comme auraient pu en enfanter Frankenstein et Nosferatu, s’il leur était venu la mauvaise idée de copuler.

Jeune, on est enclin à  attraper au vol les idées plutôt que d’attendre de se faire les siennes, et sa rencontre ne va pas m’inciter à  vieillir : il ressemble à  un monstre, et les faits qu’on lui reproche d’avoir commis sont justement assez monstrueux.

A trois, avec son épouse, Laurie, une sorte d’ectoplasme tuberculeux dont le QI, les jours de liesse, atteint péniblement les dix-douze, toute habillée, et leur unique ami, un débile profond, au sens médico-légal, Denis, qui a la triple particularité d’être muet, de mesurer un mètre cinquante-deux, et de fumer constamment1, ils ont, il y a environ deux mois, trouvé dans la rue encore plus pauvre, plus idiot, et surtout plus malheureux qu’eux, Gérald, rencontre de leur vie, pour son malheur.Lire la suite“Noël”

  1. Quand je dis constamment, c’est constamment : je fume trois paquets par jour, mais j’ai de longues journées, avec des pauses entre chaque clope, mais lui non : la précédente est finie, grillée jusqu’au filtre, qu’il allume la suivante, le plus souvent plantée dans sa bouche à  côté du mégot, jamais vu ça ; je ne sais pas s’il continue en dormant, mais ça ne me surprendrait pas []

Cheres (!) amours passées…

Une adorable caissière de supérette, la belle Iléana (dont je vous démontrais il y a quelque temps le goût très sûr dès qu’il s’agit de désirer un homme -croyais-je …), a eu une très étrange et très désagréable surprise en ouvrant son courrier, il y a quelques jours, et en y trouvant la lettre, assez étoffée, d’un huissier de justice, lui réclamant soudain la modique somme de dix-huit mille deux-cent quatre-vingt-treize euros et soixante-huit centimes, 18.293 €68, laquelle doit représenter dans le meilleur des cas à  peu près quinze mois de son salaire mirifique …

Oh, je sais : les surendettements, ça existe malheureusement -à  vrai dire, je le sais professionnellement, mais pas que- et il n’y a là  rien que de très banal, en soi …

Mais je voulais quand même vous exhiber le courrier en question, pour trois raisons particulièrement kafkaiennes qui, je trouve, méritaient sa publication (y compris sous un titre comportant le mot “amours” dont je continue à  trouver injuste qu’il se féminise au pluriel -ce qui est lourd de sens, on le verra encore ici).Lire la suite“Cheres (!) amours passées…”

Vous avez demandé la police ?

Non, inutile de me rappeler que personne ici n’a réclamé que j’entreprenne le récit détaillé de ma dernière audience de police. Mussipont m’ayant fait twitteriquement promettre que j’en ferais le sujet de mon prochain billet, je ne saurais me dédire1 . Vous savez donc à  qui vous en prendre, au cas où.

Le premier avantage immédiatement perceptible à  présider le Tribunal de police, c’est que l’on est certain que jamais, on ne vous y entretiendra de garde à  vue anticonventionnelle, de mépris des Droits de l’Homme par la Cour de cassation, d’illégalité à  débit différé ou de quoi que ce soit du même genre. Pour la simple et bonne raison que normalement2, aucun des prévenus n’a eu à  fréquenter quelque geôle que ce soit.

Le second avantage de l’audience de police est sa variété. Enfin, en principe, car l’utilisation3 des modes de réponse pénale alternatifs aux poursuites aidant, l’audience se compose finalement souvent, pour l’essentiel, de violences volontaires entre gens qui n’ont pas tapé assez fort pour se retrouver en correctionnelle, tout se perd, y compris le Noble Art ayant entraîné une ITT4, faute de quoi c’est la juridiction de proximité qui serait saisie, mais inférieure à  huit jours, et de dégradations jugées légères5, le tout assaisonné de quelques infractions à  regrouper dans la catégorie chasse, pêche, nature (et c’est tout), car depuis l’absorption par ma juridiction de quelques Tribunaux d’instance extérieurs en vertu de la fameuse réforme de la carte judiciaire, mon ressort comprend une bonne part de territoires ruraux. Lire la suite“Vous avez demandé la police ?”

  1. Surtout maintenant qu’il m’aide à  résoudre mes problèmes de cuves sur lit à  massif de zéolite. Vous n’avez rien compris ? Moi pas beaucoup plus. []
  2. Sauf cas de requalification de faits ayant initialement justifié un placement en garde à  vue – rare, quand même. []
  3. Très, mais vraiment très modeste par mon Parquet à  moi – on ne sait jamais, au cas où l’un d’entre eux me lirait, une petite allusion subtile n’est jamais perdue … []
  4. Incapacité totale de travail. []
  5. Notion qui, soit dit en passant, me posait de considérables difficultés de qualification lorsque j’officiais au Parquet. Une vitre brisée, en soi, ça ne paraît pas trop grave ni trop cher à  réparer, mais dès qu’elle se transforme en baie vitrée ou en vitrine, ça chiffre vite … Un rétroviseur arraché, c’est bien empoisonnant aussi … Enfin, bref, je m’en fiche, je suis désormais juge, je fais ce que je veux, et j’applique même la CESDH à  toutes les gardes à  vue qui me passent entre les mains si j’en ai envie. []

Arnacœur ?

Je ne sais pas si c’est moi qui vieillis1, si c’est un signe des temps, expression qui ne signifie rien mais a le mérite d’avoir l’air d’être sage, ou bien si réellement le phénomène augmente ces jours-ci, mais j’ai bien l’impression de m’être successivement fait arnaquer un nombre de fois très supérieur à  la moyenne, récemment …

Je ne vous parle bien sûr pas des arnaques très ordinaires, celles que nous subissons tous très régulièrement, au fil de nos vies respectives, et dont les auteurs sont parfaitement connus, soit l’État, tout organisme faisant partie de ce groupuscule terroriste opaque que l’on appelle communément “les charges” (URSSAF, caisses de retraite, caisse de prévoyance, etc …2 ), très évidemment les banques en général et la mienne en particulier, de nombreux intervenants à  domicile, tel ce plombier exorbitant, ainsi qualifié-je son prix mais non pas son talent, que je salue cordialement en lui confirmant par là -même que je ne l’oublierai pas, ne serait-ce parce que je lui dois d’avoir dû apprendre en urgence la plomberie et l’art de souder dans de l’eau mêlée de caca, après son passage, ainsi naturellement, plus près de ma profession vénérée, que les confrères, les procureurs, les juges, et bien entendu avant tout les clients.

Non, je me réfère ici à  de véritables arnaques, dont j’ai été la victime innocente, et dont, pour la dernière en date, celle que je souhaite vous exposer, je ne suis même pas certain que c’en ait été une …Lire la suite“Arnacœur ?”

  1. enfin, si, je le sais : je vieillis, mais je veux dire par là  que je ne sais pas si ce que je veux vous raconter est lié à  cet état de fait -si vous m’interrompez dès la première ligne, on n’est pas rendu … []
  2. Note utilitaire : défiez-vous à  vie de tout organisme comportant le mot “Caisse” dans sa dénomination, l’expérience enseigne qu’il est à  fuir immédiatement, et n’en concerne toujours strictement qu’une seule, de caisse, la sienne. []

D’un “go fast” à  GO Sport

Je me tue à  le dire : non seulement les relations entre policiers et avocats peuvent être excellentes, et seront encore améliorées lorsque chacun connaîtra un peu mieux le métier de l’autre, c’est à  dire notamment lorsqu’on se côtoiera longuement en garde à  vue ; mais encore, chaque rencontre un peu approfondie est l’occasion de découvertes, voire d’échanges, aussi passionnants qu’ils ne sont prévus par aucun code !

C’est ce que vient de me prouver Kinou, Officier de Police Judiciaire quelque part en France, lequel a la gentillesse de venir parfois me lire1 et ce faisant, est devenu jaloux du fait que j’aime raconter certaines journées d’un avocat de base, et a souhaité du coup me, et nous, raconter à  son tour l’une des siennes : c’est l’objet du récit palpitant qu’il m’a fait le plaisir et l’honneur de m’adresser  et que je vous propose de lire ci-dessous, duquel je n’ai pas décroché une seconde cette nuit avant d’aussitôt lui proposer de le publier.

Au-delà  de l’histoire elle-même, qui se dévore d’une traite, vous allez voir qu’on y apprend beaucoup sur son métier -y compris ici encore sur différentes petites choses qui ne figurent elles non plus dans aucun code, hé hé2 … D’autant que, comme toujours lorsque j’ai la chance d’héberger un invité, j’ai seulement inséré des petites notes, sans lesquelles je ne suis rien, dans le texte de Kinou, pour le surplus inchangé.

Je me permets juste un rappel, qui curieusement ne figure pas dans le texte d’origine3 : Samir demeure présumé innocent, dans toutes ses affaires -je sais bien que vous le saviez, je le dis juste pour rappel, comme ça -juste avant cette plongée dans l’univers policier, que je remercie vivement Kinou de nous offrir !Lire la suite“D’un “go fast” à  GO Sport”

  1. Probablement depuis un ordinateur appartenant au Ministère de l’Intérieur pas exactement prévu pour venir glander sur le blog d’un avocat, j’en suis tout scandalisé, c’est une honte, tout ça avec nos impôts ! []
  2. Et que je ne relèverai pas toutes, car j’ai le fameux sens de l’hospitalité des gens du Nord ! []
  3. Ah ben oui, cher Kinou, des petites boutades de ce genre,  vous allez en prendre quelques-unes : quelle idée aussi de publier chez un avocat ! []

Ordonnance de Clocloture.

Il y avait longtemps que je ne m’étais pas autorisé une imbécillité du vendredi, et que ça me manquait, donc je.

Je me suis servi du texte d’une chanson déjà  ancienne qui, comme le dirait mon Ami-Frère Hugo Renard, que je salue et embrasse au passage en espérant que son RSA suffise à  l’abreuver pendant ses vacances, là -bas, en Martinique (il est intermittent du spectacle, il crée, mais il souffre), ne marchera jamais mais qui est l’une des plus belles et des plus chantées et reprises du Monde, je crois bien.

C’est totalement idiot, mais ça me fait sourire et bien sûr, car rien n’est jamais totalement gratuit en ce Bas-Monde, en particulier lorsqu’il s’agit d’avocat, ça montre au passage à  quel point n’importe quel propos peut être interprété de n’importe quelle façon, et comme il est dès lors capital de bien les retranscrire, lorsqu’on les rapporte, ou de bien les lire, avec recul, lorsqu’on les utilise.

Comme je suis d’humeur facétieuse, non point au vu d’un grisant weekend de garderie trois jours, mais parce qu’il y avait deux chèques au courrier aujourd’hui1, attention, il y a un grand jeu-concours gratuit à  la fin : je vous laisse le soin de trouver et nous citer par commentaires tous les faits et qualifications légales pour lesquels Monsieur François peut valablement être renvoyé devant le Tribunal Correctionnel !Lire la suite“Ordonnance de Clocloture.”

  1. Certes l’un non signé et l’autre de cinquante euros, mais c’est un début []

Cassé.

Vous le savez, la garde à  vue française est -justement- attaquée de toutes parts depuis des mois, en ce, notamment, :

– qu’elle ne permet nullement une intervention immédiate, utile et effective de l’avocat de la défense aux côtés de la personne soupçonnée, (puisque l’avocat n’a pas accès au dossier, mais à  un simple entretien “en aveugle” avec son client, limité à  trente minutes, en début de garde à  vue, et carrément repoussé à  plusieurs jours dans le cadre des gardes à  vue dites spéciales, n’ayant pas non plus le droit de l’assister lors de ses auditions)  ;

– et qu’elle ne protège nullement celle-ci de s’incriminer elle-même par ses propres déclarations ou réponses aux questions, puisqu’elle ne prévoit pas que ladite personne se voie notifier le droit de se taire, ou de ne répondre que partiellement audites questions.

Tels sont, entre autres, les droits que la CEDH veut voir appliqués à  toute garde à  vue européenne, ainsi qu’elle l’a rappelé dans de nombreux arrêts, dont le dernier condamnait directement, pour la première fois, la France.

Tels sont aussi les droits que notre Conseil Constitutionnel, saisi de ces différentes problématiques par des Questions Prioritaires de Constitutionnalité, a proclamé dans une désormais célèbre décision, célèbre parce qu’elle les reconnaissait et déclarait, partant, la garde à  vue française de droit commun  inconstitutionnelle, mais également parce qu’en pure opportunité, elle laissait un an au gouvernement pour réformer cette mesure, par un loi devant intervenir avant juillet 2011…

Mais lui en avait la possibilité légale…Lire la suite“Cassé.”