Un petit mot publicitaire, que j’ai moi-même proposé de poster à l’éditrice, car il m’arrive d’être fatigué, donc généreux, pour vous signaler la proche parution d’un bouquin qui, à mon humble (car il m’arrive d’être fatigué, donc humble) avis mérite vraiment d’être lu.
Je ne dis évidemment pas ça parce que son éditrice, dotée d’un bon goût évident, m’a fait l’honneur de me contacter via ce blog, il y a quelques mois maintenant, pour me piéger demander de le relire avec l’œil du juriste, histoire d’être certaine que rien d’aberrant, en droit, n’y figurât1, puis, après ainsi que je ne puisse plus refuser, d’en commettre la postface, comme les plus acharnés des promeneurs de ces lieux enchantés ont pu le noter avec fierté ici, je vous dis ça parce que cet ouvrage est remarquable – et si au passage ces quelques lignes font rosir de gêne l’écrivaine l’auteure la lecteure2 la maman (ah, et puis merde !) la dame concernée, eh bien ce sera bien fait pour elle !
Or donc, le livre en question, lequel constitue paraît-il une “novella”3, s’appelle “Présumé coupable“, et est le tour de force d’une “Jeune auteur”4, Isabelle Guso.
Tiens, d’ailleurs, elle a aussi choisi une très jolie couverture, donc foin de mes bavardages, voilà déjà :
Son auteure5, justement, vient parfois traîner dans le coin, et je crois que c’est en y lisant un texte particulier, que j’ai publié mais pas écrit, que l’idée du livre lui est venue – en parcourant la discussion commentatrice qui a suivi cette parution, aussi : celui qui a tout déclenché, s’il traîne encore sur mes pages, se reconnaîtra sans doute, et peut la contacter, je pense que ça lui ferait plaisir6 …
Paradoxalement, je ne peux pas vous parler du contenu de ce texte, sous peine d’en aplatir totalement les mystères… Mais je peux vous en dire, tout de même, qu’il est très bien écrit, ce dont je suis jaloux, avec un style à la fois doux, presque poétique par endroits, qui fait partie de ces jolies façons7 qui obligent le lecteur à lire l’histoire proposée – car c’en est une, qui pourrait être vraie – d’une seule traite, avec l’avidité d’en découvrir la fin…
Et, plus encore, qu’Isabelle Guso non seulement a eu le courage de s’attaquer à un sujet extrêmement difficile, mais encore qu’elle y est parvenue en réussissant vraiment à se mettre dans la tête, sinon dans la peau, de son personnage – de ceci, je peux témoigner, ayant parfois eu à défendre des hommes se livrant aux mêmes combats que son héros.
Je me tais, mais je lui redis ici à quel point je l’admire d’avoir osé, et su, le faire.
En revanche, je peux vous en offrir un extrait, le début, puisque son éditrice et elle-même le font, c’est par ici – et c’est bien vu, ça donne assez envie, je trouve, de “lire la suite”, selon l’expression consacrée en pages d’accueil des blogs, je trouve – attendez-vous à une ou deux surprises radicales, elle l’a fait exprès.
Bon, revenons sur cette Terre qui oblige à quelques concessions à la technique et au merchandising, depuis qu’un crétin quelconque, d’ailleurs pas passé à la postérité, encore heureux, a inventé le concept répugnant de “gagner sa vie” : le livre sortira le premier octobre 2010, ce qui le place sous les meilleurs augures possibles, ce mois étant celui de naissance d’un certain nombre de génies purs et magnifiques de ma connaissance, tel l’extraordinaire avocat qui se cache dans les plis de la robe de Mô8, mais l’éditrice, toute honte bue, n’a pas hésité à me sommer de vous indiquer qu’il est déjà ouvert à souscription – je ne savais même pas ce que ça signifiait ni que ça existât9, mais il m’a été précisé que vous pouvez d’ores et déjà donner des sous, moyennant quoi vous vous assurez d’une livraison rapide, on vous offre les frais de port, je crois aussi une belle image, en sus – et bien sûr l’éditrice s’engage à vous le livrer en personne à domicile, et le cas échéant, sur simple demande, à vous faciliter la lecture de l’ouvrage par un massage à même la peau pratiqué par elle-même, nue, pendant toute la durée d’icelle lecture10 .
N’hésitez donc pas : ce récit en vaut vraiment la peine, 9 euros c’est Braderie, et je serais très content que l’auteur puisse en vivre, un peu – encore une belle rencontre virtuelle, soit dit en passant.
Et, vous le verrez, de sacrés questionnements (remises en question ?), une fois le livre refermé.
(PS parce que je sens venir les commentateurs : et puis elle, au moins, elle les finit, ses histoires… JE SAIS !)
- J’ai un doute sur l’emploi de ce subjonctif imparfait, ça la fout mal quand on veut dire du bien d’un écrivain, ah, crotte, pardon Mesdames, d’une “écrivaine”, Misère Humaine… Bon, tant pis, je laisse, s’il est erroné, qu’un commentateur érudit n’hésite pas, il serait opportun que je rectifiasse ! Je blague, mais plus j’écris ici, plus j’ai honte de mes lacunes. Les enfants, ne faites pas comme Papa Mô, apprenez bien à l’école… [↩]
- Hannibal, de son prénom, évidemment. Jeu de mots idiot dédié aux nombreux comiques qui me lisent. [↩]
- Ne me demandez pas pourquoi, je n’y connais rien au monde merveilleux de l’édition, je connaissais “roman”, et, comme petit roman, “nouvelle” ; j’en déduis que “novella” est un tout petit roman, alors que là , non. Je me demande si ça n’est pas encore un coup des féministes qui auraient féminisé un mot déjà féminin, histoire d’insister lourdement encore un peu… [↩]
- Rien que pour l’absence de “e” final, Isabelle, je vous remercie, et même je vous embrasse, y a pas de petits profits ! [↩]
- Féministes obstinées, décidément je vous hais : comment peut-on transformer un mot de la noblesse de celui-là , “auteur”, en une sorte de râle annonçant un vomissement imminent, à usage des amputés du bulbe qui ne seraient pas capables d’eux-mêmes, en voyant le prénom auquel il renvoie (justement !), de rendre à Césarine ce qui lui appartient ? Quand comprendrez-vous que le respect de la féminité, c’est comme la pornographie : si on en montre trop, ça produit l’effet inverse de celui escompté ? Bon, enfin bref, on s’en fout. [↩]
- Non, je ne joue pas ma petite mystérieuse, je ne veux juste pas trop en dire, de peur de forcément dévoiler le contenu de ce livre. Laissez-moi tranquille, d’abord, je fais ce que je veux ! [↩]
- Au sens de “façonner”, je dis ça à l’attention de mes abonnés FaceBook de moins de vingt ans – non, je plaisante, je vous adore, les jeunes ; enfin, surtout vos photos… [↩]
- Laissez, laissez, c’est gratuit, ça me fait du bien, et ça ne dérange personne… [↩]
- Même remarque qu’en note 1, c’est le problème d’écrire dans le noir vers quatre heures du matin, on perd tous ses repères, on est seul, face à un cendrier trop vite plein et une tasse de café froid, l’œil vide et cerné, on ne peut appeler personne, on doute, mais il faut avancer, tout est gris et obscur dehors, un enfant crie dans le lointain mais on refuse d’y aller, il n’a qu’à cauchemarder tout seul, on a ses propres démons à éradiquer, et l’un d’entre eux montre justement soudain, au détour d’une longue phrase sans le moindre intérêt concret, sa hure frémissante ointe de bave et de méchanceté, “recule, accent circonflexe du Démon, arrière, tu ne me prendras pas, non, par Belzébuth, tu n’es rien, lorsqu’on t’ajoute tu ne sers à rien, invention satanique (ta mère), alors cesse de me hanter”, et on tente vaille que vaille de continuer le combat, on se retourne et dans un coin sombre, un crucifix salutaire apparaît, “ah, te voilà berné et défait, tu es plus faible que moi, et le seras toujours, je suis ton Maître, déjà que j’ai osé un pseudo sur le Ouaibe avec deux de tes semblables, ce qui ne cesse de poser problème sur la Toile à cause du code HTML, vade retro, res nullius, misérable merde, je te renie, je te conspue, sans moi tu n’es rien, tu n’existes pas”, tandis que mécaniquement les doigts ont repris leur frappe compulsive du clavier… Euh, pardon. Bon, j’en étais où, moi ? [↩]
- Chere éditrice, j’espère que vous ne m’en voudrez pas de cette petite promotion supplémentaire – j’ai cru bien faire, pour l’Amour de l’Art, et je vous salue ! [↩]
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J'espère que ce commentaire signifie qu'il vous a plu.
Les schémas que vous présentez se trouvent certainement, mais on ne peut les lire qu'a posteriori, c'est à mon avis, trop confus au moment où les choses s'organisent...
Ah, si tous les pédophiles étaient prêtres et tous les prêtres pédophiles, on pourrait résoudre deux problèmes d'un coup !
Sorry very beaucoup.
Il est possible aussi que l'ambiance prêtres + garçons entre eux + abstinence promise ait favorisé le développement de sexualités homosexuelles...
Moi-même, hors toute considération sexuelle et attirance religieuse, j'ai pensé, ado, à la prêtrise, comme un moyen d'échapper au monde. Une sorte de suicide propre.
Ce serait intéressant de regarder la distribution, pour les prêtres pédophiles, de l'âge de leur vocation déclarée, par rapport à celui des prêtres "en général".
J'émets l'hypothèse qu'on trouverait peut-être que les prêtres pédophiles ont en moyenne une vocation déclarée plus tardive (post-adolescente) que les autres. Cela plaiderait en faveur d'un nombre significatif de mécanismes tels que je les ai décrits (homosexualité refoulée déviant vers la pédophilie, tentative à l'âge adulte de sublimer cela par un positionnement acceptable et cohérent -- célibat au contact des enfants, puis échec de la tactique de sublimation et passage à l'acte).
Il peut y avoir d'autres mécanismes, bien sûr. Par exemple: haute spiritualité dès l'enfance, vocation précoce, engagement sincère dans la prêtrise. Mais par ailleurs vide affectivo-sexuel, frustration de plus en plus difficile à vivre. Aucune compétence pour développer une relation amoureuse adulte. Et enfants "à disposition". De la pédophilie de circonstance, en quelque sorte. Dans ce mécanisme, le célibat des prêtres favorise la déviance. Dans l'autre, la déviance pré-existe à l'état de prêtre et au célibat associé.
Euh, on est un peu hors-sujet par rapport à Présumé Coupable, là , non?
Je n'ai aucun chiffre et je me vois mal faire le tour des évêchés en leur disant que je fais une étude croisée âge de la vocation/préférence sexuelle
Sur le mécanisme des vocations, j'ai un peu plus de regards. Je vois comment fonctionnait cette partie de ma famille, en Bretagne centre. Le milieu était profondément catholique. Pas intégriste. Il était aussi naturel d'être catho que d'être d'être blanc et de picoler comme un trou. C'était une sorte de kit global. Dans cette bourgade, il y avait "l'école des sœurs", 300 enfants, et l'école publique, 6 enfants, dont ceux de l'instituteur. Dans chaque famille, il y a avait de 5 à 10 enfants. Les aînés avaient (euh, là je parle des garçons, les filles on s'en fichait) vocation à reprendre la ferme ou le commerce. Après, fallait caser. Souvent on en trouvait un qui avait vraiment une envie donnée, et on l'installait. Si ils étudiaient bien, on essayait d'en caser un dans l'administration. Mais il fallait, c'était un peu l'honneur de la famille, qu'il y en ait un ou deux qui entre dans les ordres. Et ça se passait généralement dans les plus petits. L'ambiance était très religieuse (messes, catéchisme, communion, vèpres, confession, confirmation, processions et aliénation...), on baignait dedans. Alors, si certains enfants avaient l'illumination divine, tant mieux, sinon, ben on les incitait un peu à s'apercevoir qu'ils avaient une putain de vocation... Je parle de la situation des années 50 et 60. C'était tout bénef pour la famille. Il y avait l'aura d'avoir un fils dans les ordres et puis, ça voulait dire, dès douze ans, un gamin éduqué, nourri et logé aux frais de la princesse. Dans l'économie de l'époque, c'était très bien reçu...
Mais l'ambiance dans les séminaires (je me souviens de discussions avec une de mes grands-oncles, curé assez haut de gamme) était très sexe, dans une ambiance très perverse. L'intime imbrication fornication avec des prêtres et entre gamins / discours sur le péché, tout ça dans un lieu confiné, avec en plus la promesse d'une vie dédiée au célibat et à l'abstinence, ben je me demande comment il ne sont pas tous pédophiles. Enfin, moi, j'en ai connu deux charnellement, en tant qu'enfant de chœur, mais ça m'a pas traumatisé, même si ça m'a aidé à divorcer du divin...
Personellement je ne suis pas passé par le séminaire mais par un lycée non-mixte (que des garçons, blancs, issus de milieux aisés) et catholique. Le discours officiel y était très hostile à toute forme de sexualité hors mariage. Cela ajouté au manque de maturité d'adolescents en pleine effervessence hormonale, renforcée par une absence de présence féminine générait une ambiance de corps de garde et lors de nos sorties je crois que à coté de nous Bigard devait passer pour Ronsard. Puissent les jeunes filles que nous avons croisées/abordées avoir l'indulgence de nous pardonner.
Heureusement ces sorties constituaient en quelque sortes des bols d'air/soupapes de sécurité qui nous ont permis de faire des rencontres et d'évoluer vers plus de maturité et de stabilité affective. En leur absence, je crains que nous ne soyons restez dans une approche assez frustre et pas toujours maître de nos pulsions.
C'est pourquoi je crains que ce soit le rapport même de l'église catholique, du moins dans sa doctrine officielle, à la sexualité et à sa manière de l'aborder qui favorise les actes de déviance tel que la pédophilie (auquel je n'assimile en rien l'homosexualité).
Donc pour résumer je ne
C'est bien résumé en effet. Moi non plus, je ne.
Donc pour résumer je pense ne pense pas que la déviance pré-existe à l'état de prêtre ou tout du moins dans un nombre de cas minoritaire mais que c'est l'environement du séminaire qui est le facteur majeur dans la genèse de ces déviances.
Nous avons (j'ai) formulé ici deux hypothèses:
(1) éducation catho, rapport difficile à la sexualité, développement psycho-affectif bloqué, déviance pédophile, tentative de gérer cela par un engagement sacerdotal qui fournit en même temps l'alibi au célibat et la sublimation par une relation affective "sincère" aux enfants, et ensuite dans un certain nombre de cas, faillite du système de défense et passage à l'acte:
Dans l'ordre : catho -> pédophile -> prêtre -> agresseur
Avec l'hypothèse secondaire que la transition "catho->pédo" est renforcée par l'orientation homo.
La déviance pré-existe (cause?) la prêtrise.
(2) foi catholique intense dès l'enfance (ou environnement bourgeois/catho tel que décrit par Philou), séminaire, environnement exclusivement masculin, tabou sur la sexualité, célibat forcé, frustration, passage à l'acte
Dans l'ordre : catho -> prêtre -> pédophile(?) -> agresseur
J'ai mis un (?) à pédo dans ce deuxième mécanisme, parce qu'il me semble qu'il s'agit là d'une perversion plus "de circonstance" (proie disponible et accessible) plus que d'une véritable orientation.
La prêtrise pré-existe (cause?) la déviance.
En l'absence d'éléments statistisques vérifiables, je me garde de dire si l'un de ces deux mécanismes est plus prévalent que l'autre. Mon cas personnel semble relever de (1), sans passer par la case prêtrise, c'est probablement pourquoi j'ai tendance à croire à la validité de cette hypothèse.
Il peut y avoir bien sûr d'autres mécanismes et tout plein de mixtures de ces différents mécanismes.
Et tous les prêtres ne sont pas pédophiles et tous les pédophiles ne sont pas prêtres (ça va mieux en le disant).
J'ai reçu "Présumé Coupable", commencé à le lire, je suis obligé de m'en arracher par de bêtes considérations matérielles de la vie quotidienne qu'on est bien tous obligés de mener, masque ou pas.
Je m'y attendais un peu suite à nos échanges ici, mais les premières dizaines de pages m'ont absorbé, tant elles résonnent en moi. Tout semble finement observé, complètement intégré, fidèlement restitué [à un détail près, mais relativement sans importance, et c'est peut-être moi qui me trompe]. Je parle ici surtout des tourments et sentiments, plus importants bien sûr que les détails pratiques de l'histoire.
Evidemment j'aimerais déjà savoir l'épilogue, mais je suis presque sûr qu'il n'y en a pas...
Je reviendrai compléter quand j'aurai fini cette lecture, mais d'ores et déjà , merci !
Vous pouvez. Pour une fois que votre particularité vous sert, ne boudez pas l'occasion (sinon mon mari serait déjà en train d'enquêter sur votre identité pour vous faire de gros yeux ^^... "ça, ce serait avant de sortir le rasoir" dit-il par dessus mon épaule. C'est dire si vous l'avez échappé belle ! ).
Il y aura sûrement des "approximations". Déjà , c'est difficile de restreindre à un seul personnage toutes les individualités qui se cachent derrière un terme (qui ne définit "que" leur orientation sexuelle). Ensuite, je pense que quand on vit intimement une situation on voit mieux les failles d'un auteur qui n'en porte qu'un masque. Mais le livre s'adresse avant tout à un public moins averti pour essayer de leur montrer une vérité qu'il est plus commode de cacher (c'est tellement plus facile de partir à la chasse au monstre que de venir en aide à une personne qui souffre... On réussit plus facilement à tuer qu'à guérir, ça évite le sentiment d'impuissance).
Cela dit, si j'arrive, au moins un peu, à vous faire partager cette histoire et à vous montrer que parfois, on (les "on" bien pensants qui ont la chance d'avoir une sexualité compatible avec la société) peut essayer de comprendre (cela dit, nombreux sont ceux qui le montrent sur ce blog), j'en serais vraiment touchée.
Maintenant, je vais stresser en attendant ce que vous penserez de cette fin qui, comme vous vous en doutez, ne peut pas être toute blanche ou toute noire. En espérant qu'elle ne vous décevra pas
Et ce qui devait arriver arriva: j'ai pleuré.
La "fin" n'a que peu d'importance, à la limite j'aurais supporté qu'il n'y en eût point.
Votre héros a toujours eu plus de force que moi.
Mais j'ai eu la chance aussi de découvrir récemment autour de moi quelques "Shinta" et "Muriel" auxquels je ne pouvais prétendre aussi légitimement que lui, ayant malheureusement plus déchu que son "Fallen Angel".
Tout ce que vous écrivez m'est terriblement réel. Ca me touche énormément de le voir écrit, qui plus est par quelqu'un dont on pourrait s'attendre à ce que son vécu ne l'incite pas à une telle compassion.
Je sens que je vais débattre un moment avec moi-même pour savoir à qui conseiller cette lecture. Tout le monde devrait absolument lire cet ouvrage, mais il est probable que tout le monde ne devrait pas se le voir conseiller par moi.
Re-merci.
Cette réaction justifierait à elle seule l'existence de ce livre. Je crois que vous le savez déjà , mais au cas où un jour vous l'oublieriez (parce que je pense qu'il y a parfois des journées très dures quand on vit une vie comme la vôtre) : même tombé, un homme reste un homme . Et il n'y a que lorsqu'il est debout qu'il peut avancer. C'est pour ça que je suis en colère quand je vois qu'on laisse un homme à terre et même qu'on l'enfonce dans la boue. Pédophile, hétéro, homo, chacun de nous peut faire du bien et du mal autour de lui.
Quand on est pédophile, c'est "juste" infiniment plus dur.
J'imagine que vos vrais amis vous l'ont dit, qu'ils vous aident à supporter la solitude, mais peut-être que de savoir que ça peut venir de quelqu'un qui a un passé comme le mien, peut aider quand tout ça devient trop usant. J'ai vécu des épreuves c'est un fait, mais vous aussi. Les miennes sont plus "touchantes" parce que j'étais enfant. Mais vous ne deviez pas être bien vieux non plus quand vous avez commencé à souffrir de votre différence. Pas moins innocent que moi quand vous avez senti que vous n'auriez pas la possibilité de vivre comme tout le monde. J'ai la chance de pouvoir poser mon fardeau, de savoir que c'est derrière moi mais aussi que tout le monde (la bienveillante société) m'accorderait sa compassion s'il savait. Peu de gens vous offriront cela (beaucoup de gens sur ce blog le font, heureusement), pourtant vous y avez droit aussi. Juste le droit de ne pas souffrir seul et même si vous souriez, même si vous avez vos moments de vraie joie (ou de vraie comédie), vous avez le droit qu'on se dise aussi "Quel courage il a d'affronter tout ça !" comme on le ferait pour un deuil, une victime, un handicap... pour toute personne qui souffre.
Ce n'est pas grand-chose à vous offrir au regard des épreuves quotidiennes, mais hélas, de ma pauvre capacité de jeune auteur, c'est tout ce que je peux faire.
Encore merci de la lecture que vous avez fait de ce livre.
Il reste la solution de laisser votre exemplaire sur un banc public (pas un jour de pluie, s'il vous plaît !) et d'espérer que la chance fera le reste et que le message passera (en espérant que ce ne soit pas un pigeon qui passe )
Toutes mes excuses... Après un message trop sérieux, faut toujours que je dise une bêtise, c'est presque fonctionnel chez moi ^^
J'espère qu'il y a réellement des gens comme votre héros, qui résistent toute leur vie sans jamais passer à l'acte.
J'ai tenu une trentaine d'années. Ensuite, mes passages à l'acte, sans les minimiser, ont été relativement mineurs. Pour autant, ils n'ont sûrement pas été sans effet sur les victimes. Et quant à moi, ils restent extrêmement mystérieux et inquiétants: je n'arrive pas à m'expliquer comment j'ai pu m'aveugler, éviter de prendre en compte que j'avais été incapable de me les interdire, alors que je savais parfaitement qu'ils étaient illicites, dommageables, interdits...
C'est inquiétant parce qu'on se demande à quelle limite on se serait réellement arrêté (je me suis stoppé -trop tard- en prenant conscience de la contrainte que j'étais en train d'exercer sur un enfant qui avait la force d'exprimer son refus; la limite était déjà ténue avant d'en arriver à de la vraie violence physique...)
Je veux croire que je serais plus lucide maintenant que la chose a été révélée, jugée, "punie", et que j'ai pu entamer tout un travail d'explicitation et de détection de mes situations à risque et mécanismes de validation. Entre ça et mon entourage immédiat qui est "au courant", j'espère ne plus faire de victime dans les 30 à 50 ans qu'il me reste à vivre. Ce serait déjà pas mal, encore que limiter son but dans la vie à l'impératif d'un évitement, ce n'est pas vraiment très motivant.
Franchement, la "rédemption" de votre héros par l'action humanitaire me semble un peu "too much" dans le cliché idéaliste.
On ne devrait pas avoir besoin de se transformer en super-héros pour se prouver et prouver au monde qu'on n'est pas un monstre.
Mais je veux quand même vous épouser.
Je comprends très bien pour le côté too much. Pour un public concerné, je pense que ça a presque un côté culpabilisant et je m'en excuse (genre pour mériter votre droit à exister, faut au moins que vous alliez sauver des enfants d'Afrique... ce qui est particulièrement "too much" pour un gars qui n'a jamais rien fait de mal). Le problème est d'atteindre un public auquel on présente toujours l'autre visage du pédophile (de Dutroux à mon héros, y a une sacrée place pour être un humain tout à fait digne de ce nom). Si l'humanitaire est une image très poussée, ça n'en est pas moins le sentiment que je veux faire passer. Comme vous le dites, juste la motivation du "ne pas céder" est limitée, mais il y a d'autres façons d'avoir une vie "qui vaille la peine d'être vécue" que la relation de couple (celle qui vous est hélas impossible). Et faire du bien autour de soi, ce n'est pas forcément soigner des enfants d'Afrique, ça peut être monter les courses de votre vieille voisine, faire un sourire à votre caissière et lui dire bonjour et au revoir... des petits gestes tout bêtes qui éclairent la vie des gens que vous croisez et qui n'ont pas moins de valeur parce que vous êtes pédophile. Je pense même qu'il est très probable que vous ayez développé une capacité d'écoute que les gens plus chanceux n'ont pas. ça peut faire de vous un ami sincère, un confident, de nombreuses choses qui font du bien sans que ce soit aussi spectaculaire que l'humanitaire... Mais une fois encore, je ne dis pas ça pour minimiser la difficulté d'une telle vie. Je suis quelqu'un d'extrêmement romantique, vivre sans pouvoir aimer et être aimé (au sens amoureux du terme) est une chose qui me paraît terriblement cruelle. C'est la raison pour laquelle une personne qui s'inflige cette épreuve pour préserver les enfants mérite à mon sens de l'admiration (bien plus que pour son engagement humanitaire). Qu'on soit tombé ou pas avant n'y change rien. C'est le présent qu'on forge et l'avenir. Évidemment, je ne peux pas prétendre vous "pardonner" pour ceux que vous avez blessés, mais eux aussi doivent se reconstruire tournés vers l'avenir. Le vôtre est assez douloureux ainsi, vous ne pouvez pas porter en plus ce poids. Le but de la sanction pénale est de vous faire "payer" votre dette (parfois d'une façon totalement inadéquate, une fois encore, hélas). Vous avez fait ce que vous pouviez de ce côté-là . Peut-être que si la société était différente, peut-être que si vous aviez pu parler, peut-être... peut-être... Il y en a bien des coupables dans cette affaire. Si mon héros "tient le coup" c'est pour montrer au lecteur que c'est possible, parce que ça pourrait l'être, je pense. À condition que chacun y croie et essaie d'y mettre du sien. S'il est aussi "parfait", ce n'est pas pour rabaisser ceux qui le sont moins ou qui n'ont pas réussi à tenir. C'est pour toucher un lecteur moins averti. Un lecteur dont on abreuve le cerveau reptilien d'images propres à entretenir sa rage (avec les conséquences qu'on a pu voir récemment). J'ai essayé de parler aussi à cette fibre émotionnelle, mais de lui parler un autre langage, de toucher le coeur pour bousculer un peu ces a priori et rendre la réflexion de nouveau possible. Pari difficile et qui, forcément, au passage, m'éloigne un peu d'un public comme vous. Mais je suis déjà heureuse si j'ai pu mettre des mots sur des sentiments authentiques.
Pour le public auquel vous aimeriez conseiller Présumé Coupable, je ne saurais dire. D'un côté, je pense que la compréhension aide à la guérison. D'une autre, venant de vous, cela pourrait en effet paraître comme une... facilité. Je comprends votre envie qu'ils vous comprennent mais je crois que c'est un travail qu'ils ne peuvent faire que d'eux-mêmes... Ou au moins conseillés par quelqu'un d'autre que par vous. Sauf si vous avez gardé de bonnes relations avec certains d'entre eux (c'est rare, mais ça arrive).
D'autant que, pour nous, "sauver des ENFANTS d'Afrique", ce n'est pas franchement une bonne idée...
On a vu d'ailleurs la révélation de quelques scandales dans le genre, avec des bénévoles au service de l'enfance perdue ou directeurs d'orphelinats à l'étranger. Probablement des situations plus complexes et moins totalement monstrueuses qu'il n'y paraît au premier abord, mais tout de même à l'évidence des positionnements dangereux qu'ils auraient du s'interdire au départ. C'est la même problématique pour tous ceux d'entre nous qui s'engagent dans des voies professionnelles ou bénévoles au contact des enfants.
Nous qui "aimons" les enfants "comme ça" aussi, nous ne pouvons nous permettre de les aimer normalement non plus.
Mais ça me permet de rebondir sur ce côté "moins totalement monstrueuses". C'est une chose à laquelle je pense souvent dans les scandales de prêtres pédophiles. Je pense qu'il existe une part très faible de gros pervers opportunistes qui choisissent ce sacerdoce pour s'adonner à leur vice. Par contre, au moment où je me suis mise dans la peau de mon héros, je me suis demandé :"Que pourrais-je faire si je savais que me marier, fonder une famille, etc... m'était impossible" et j'ai pensé à la religion. Je me suis dit "cela paraît une voie logique" d'abord parce qu'elle permet de se trouver une étiquette sociale qui évite l'éternel "Alors c'est quand que tu nous présentes Mme X ?", ensuite parce qu'elle permet de faire de ce handicap une bonne raison de se consacrer à un but plus grand et de s'éloigner des basses contingences matérielles. Bref, je pense qu'un bon nombre de ces prêtres pédophiles se sont engagés sur cette voie en toute bonne foi (dans tous les sens du terme) pour donner un sens à leur vie.
Si la pédophilie était une chose dont on pouvait parler, ils le diraient à leur hiérarchie qui pourrait éviter des contacts avec les enfants (enseignement en classe de catéchisme et autre). Mais non. Le pédophile entre dans les ordres en cachant son secret, et comme il aime les enfants et comme personne n'est là pour l'aider à résister, il se retrouve avec des gamins sous son autorité et, à force, sa résistance s'érode avec les drames qu'on sait. Ces drames qu'on nous présente comme "de gros salauds qui sont devenus prêtres pour tâter de la chair fraîche". Alors je ne dis pas que ce qu'ils font est normal ou acceptable, je dis seulement que c'est un de ces nombreux cas où les choses sont plus compliquées que ce que les médias en disent. Et surtout que c'est l'exemple flagrant d'une situation où la parole libre pourrait permettre d'éviter les drames. Parce que je pense (mais vous êtes mieux placé que moi pour le confirmer ou non) qu'un pédophile est parfois pris de l'envie d'avouer, de se soulager, de demander conseil... comme toute personne qui porte un lourd secret. Je pense que si l'aveu de cette orientation sexuelle était mieux accepté, la plupart des pédophiles le ferait à un moment ou un autre, dans un moment de force ou au contraire dans un moment de faiblesse. Et il suffirait d'une fois pour enclencher tout un mécanisme de protection à la fois pour eux et pour les enfants (et par "mécanisme de protection" je n'entends pas enfermement ou castration chimique, mais plutôt analyses des éléments déclencheurs, des signes avant-coureurs, éloignement des enfants (ou du moins ne pas rester seul avec eux) etc...)
Je pense que ces situations avec des prêtres peuvent s'appliquer également aux humanitaires qui cherchent une façon de rendre leur vie utile (peut-être pour certains de compenser ce qu'ils jugent comme une crime à payer, ou sinon simplement une façon d'aider les enfants parce qu'ils les aiment). Après, ils se retrouvent dans des pays où la misère sociale est terrible et où les enfants seraient prêts à tout pour manger. Et oui, le résultat de tous ces éléments mis bout à bout donne des situations qui sont "monstrueuses" mais les gens qui sont à l'origine, eux, ne sont pas des monstres (même si je ne nie pas qu'il doit exister d'authentiques salauds qui partent pour profiter d'une sorte de réseau de la misère... Mais ceux-là ont quand même des opportunités plus confortables et qui demandent moins d'efforts personnels que la voie de l'humanitaire).
Parfois. Souvent. Mais en même temps, il faut reconnaître qu'on "chérit son péché". L'avouer à quelqu'un nous obligerait à faire face à la conséquence quasi-inéluctable : l'injonction de nous éloigner des enfants.
Or, tant qu'on n'est pas passé à l'acte, la proximité des enfants nous apporte peut-être moins de tourments que de satisfactions (certaines pures et élevées, d'autres plus "sales", liées au voyeurisme, ces enfants cotoyés venant alimenter nos fantasmes). Le pédophile abstinent dans les actes ne l'est pas forcément en pensées.
Et quand on est passé à l'acte, ca devient carrément complètement inavouable.
C'est peut-être pour ça que nombre d'entre nous finissent par "tomber" par une maladresse plus ou moins délibérée. Je ne peux pas avouer, je finis par faire en sorte de me faire prendre.
En ce qui concerne la prêtrise (ou autre positionnement auprès des enfants), oui, la tentation est là de "faire d'une pierre deux coups", en fréquentant des gamins tout en se donnant une position sociale validante et valorisante (avec l'excuse en plus, comme vous le notez, d'un célibat imposé par la fonction). Une sorte de sublimation de nos tendances qui serait superbement légitime comme "sortie par le haut" si elle n'était pas ternie par l'envie d'alimenter notre attirance et nos fantasmes.
Nous sommes des experts en manipulation, y compris en manipulation de nous-même: "Je suis meilleur que tous ceux qui n'ont pas mon problème. Je suis capable d'y résister. J'aime vraiment les enfants et je leur fais du bien, alors que mes tentations sont autres. Personne n'a besoin de savoir à quoi je pense en les regardant." Jusqu'au jour où on ne résiste plus assez.
Il me semble que la plupart des prêtres incriminés ont déclaré une vocation très jeune et intégré un séminaire à un âge où la question de leur orientation sexuelle ne pouvait se poser en terme de pédophilie, mais plutôt d'homosexualité. On peut donc difficilement leur faire un honnête procès d'avoir choisi cette vie pour côtoyer des enfants à débaucher...
Par ailleurs, vue la raréfaction du nombre de prêtres, ceux qui restent sont amenés à tout faire, il me semble difficile d'annoncer "Nous accueillons notre nouveau prêtre, l'Abbé Glandon, qui assurera toutes les missions de la Paroisse, sauf celles qui le mettraient au contact des enfants. Les postes d'enfants de Chœur seront désormais occupés par l'amicale des Grenouille de bénitier...".
Vous avez peut-être raison, je ne sais pas si vos statistiques sont fiables (la plupart?) ?
En ce qui me concerne, la question de m'orienter vers la prêtrise m'a effleuré vers peut-être 25 ans, assez rapidement rejetée comme une vraiment très fausse bonne idée. J'avais déjà fort bien conscience que je n'étais pas attiré par de jeunes adultes de mon âge, mais de beaucoup plus jeunes adolescents. Sans mettre le mot dessus, je me reconnaissais déjà comme pédophile.
On en a parlé ailleurs, mais il y a l'hypothèse qu'une homosexualité non-assumée (en particulier non-assumable, comme dans les milieux catho-bourgeois des années 70) pouvait bloquer le développement psycho-affectif dans une forme immature qui pourrait conduire à la déviance pédophilique. Il y a une forte congruence entre ce tabou et l'appartenance à un milieu qui valorise comme seuls modèles acceptables la vie familiale ou la vocation sacerdotale.
Donc, en simplifiant outrageusement:
- catho/bourgeois de cette époque-là + homosexuel refoulé ==> pédophile, et
- catho/bourgeois de cette époque-là + incapacité à se marier ==> prêtre.
Heureusement, ces équations ne sont pas généralisées, tous ne sont pas devenus déviants, tous les prêtres n'ont pas de problématiques psycho-affectives, etc... ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit !
Mais ça peut probablement expliquer en partie la forte prévalence de pédophiles dans la prêtrise?
Ce qui pourrait le confirmer seraient des statistiques:
- proportion de prêtres pédophiles (issus de familles catho/bourgeoises) par rapport aux instituteurs pédophiles (issus de familles laïcardes) ?
- prévalence de la pédophilie homosexuelle (atteintes sur des petits garçons à l'exclusion de petites filles) chez les prêtres ?
- diminution de ces prévalences à travers les décennies, maintenant que l'homosexualité adulte est plus socialement acceptable ?