Au Guet-apens

[Avertissement : ce récit est très (trop) long, il comporte 17089 mots (!), j’en ai conscience, mais je n’ai pas su faire autrement, je ne voyais pas comment vous emmener avec moi là-bas en en supprimant des passages : tant pis (Au moins, je peux espérer qu’il vous “fera de l’usage”, comme on dit dans le Nord..) ! J’ai pensé un temps le publier en plusieurs fois, mais j’aurais forcément dû le couper à des endroits qui auraient obligé le lecteur potentiel à attendre la suite, ce que j’ai supposé être désagréable -d’autant qu’il y a plusieurs suites… Bref, donc, le voilà, en un seul tenant. D’autre part, statistiquement et me connaissant, il y a sûrement des fautes, d’accord notamment : je vous prie par avance de bien vouloir m’en excuser… Enfin, il s’agit, plus que jamais, d’un récit subjectif, comme toujours (je ne trompe personne, c’est indiqué au fronton du blog) : certaines considérations sont le reflet de mon ressenti, pas forcément de l’objective réalité, dont je me demande d’ailleurs si, finalement, vieux et vaste débat, elle existe vraiment …]

Ahmed entre dans le box des accusés, toujours aussi minuscule, particulièrement entre ses deux grands flics d’escorte, toujours aussi mal fagoté, comme s’il sortait d’un film des années 70, avec sa masse de cheveux crépus, son costume crème, pantalon pattes d’éléphant et veste cintrée à larges revers, chemise grise et large cravate à gros nœud, crème et grise évidemment.

Comme d’habitude, il a l’air de sourire – ça n’est ni l’endroit, ni le moment, mais de cela, je ne m’inquiète pas : la Cour et les jurés s’apercevront rapidement que c’est en fait une mimique, qui ne le quitte jamais, et qui ne signifie rien, même si parfois, comme maintenant, on aimerait la lui ôter.

Dans un instant, la greffière va lire l’arrêt qui a renvoyé Ahmed devant la Cour d’Assises, énumérant ce faisant les charges que la Chambre de l’Instruction a estimé suffisantes pour qu’il soit accusé d’avoir assassiné sa femme, avec la complicité de Roger.

Juste après, la Présidente, bien que la procédure française ne le prévoie pas, lui demandera seulement, avant que le procès, prévu sur trois jours, ne démarre effectivement, s’il reconnaît les faits ; elle sait, comme moi, qu’Ahmed répondra que non, qu’il est innocent – c’est ce qu’il affirme depuis son arrestation, trois ans plus tôt.

Je le regarde, assis en contrebas par rapport à lui, tandis qu’il décline son état civil, un micro grotesque emmanché sur un fil de fer roulé autour de son cou, et je serre la main gauche, celle qui est posée devant moi sur le bureau en bois de la Défense, en m’apercevant qu’elle tremble : Ahmed est innocent, je le sais depuis trois ans, je le crois – et je suis celui qui doit le défendre devant la Cour d’Assises : je suis terrifié.

C’est une chose de plaider un acquittement parce que rien dans le dossier, selon vous, ou en tout cas aucune preuve formelle ou inéluctable, ne permet de condamner un homme, parce qu’il y a place au doute, lequel doit profiter à celui que vous défendez, coupable ou innocent ; c’en est une toute autre d’être l’avocat d’un homme dont vous êtes totalement persuadé de l’innocence, la “vraie”, dont vous êtes certain qu’il ne ferait ni n’a jamais fait le moindre mal à personne, dont vous ressentez, cruellement, lourdement, depuis plusieurs années, qu’il est victime de ce qui, déjà, ressemble à une erreur judiciaire … Non pas que, dans les deux cas, vous n’ayez pas en charge sa défense, et ne deviez pas y consacrer tout ce que vous pourrez ; mais, dans le second, une peur viscérale pèse sur vous : vous n’avez plus seulement cette obligation de moyens, mais celle d’un résultat, à tout prix, l’échec serait trop énorme, trop injuste …

Ahmed est seul, devant la Cour : Roger, qui devait y être jugé à ses côtés sous la prévention de complicité d’assassinat, est mort en détention, il s’est mis une nuit à cracher du sang, entre l’arrêt de renvoi et le procès, l’action publique est éteinte à son encontre – j’aurai l’occasion de plaider mon espoir qu’il était coupable …

Ahmed comparaît devant une Présidente qui n’a jamais, depuis deux ans qu’elle exerce cette fonction, jamais acquitté personne, à l’unique exception du frère d’une victime qui avait, mais malgré lui, participé à sa mort, et pour lequel l’acquittement était si évident qu’il avait été requis, avec force, par l’avocat général, qui lui avait même à l’audience présenté les excuses de la société – je le sais, j’étais l’avocat de cet autre homme, de cet autre innocent.

Mais ça a été la seule fois : la Cour d’Assises, sous cette présidence, hasard ou main de fer, a, selon la rumeur, condamné strictement tous les autres accusés qu’elle avait à juger.

Et Ahmed encourt la réclusion criminelle à perpétuité.1

LE CRIME – L’ENQUÊTE

On a retrouvé le corps de Geneviève, l’épouse d’Ahmed, mère de leurs six enfants, un samedi matin, trois ans auparavant, dans le fossé d’une forêt située à quelques kilomètres de leur domicile, la gorge tranchée d’une oreille à l’autre, baignant dans une mare de sang – les gamins qui étaient venus jouer à faire une cabane à cet endroit et ont découvert le cadavre doivent encore en faire des cauchemars …

On s’est immédiatement intéressé au mari, arrêté le jour même : il ressortait rapidement des premiers éléments de l’enquête que la veille, en milieu de soirée, le couple, une fois de plus, s’était sérieusement disputé – le bon terme étant “engueulé”, les voisins témoignant que Geneviève et Ahmed, comme d’habitude, hurlaient tour à tour, s’insultaient copieusement, et que, comme d’habitude, Ahmed était sorti du domicile en furie, en claquant la porte après une dernière bordée d’injures croisées, moitié en arabe moitié en français, “comme chaque fois qu’il est vraiment en colère” ; peu de temps après, Geneviève était sortie à son tour, laissant allègrement les six enfants se garder eux-mêmes, et était partie à pied vers le centre du village, manifestement ivre, comme souvent, titubant et invectivant les fantômes de la nuit à grands coups de moulinets dans le vide.

Plus personne du village ne l’avait jamais revue.

Il faut dire que Geneviève ne passait pas inaperçue, avec ses cent vingt kilos et son mètre quatre-vingts, et son incapacité à parler bas et autrement qu’avec un langage de charretier – le couple, découvrait-on rapidement, était un peu le phénomène de foire du village, les tendres époux étaient aussi peu assortis qu’on peut l’être, à la fois physiquement – Ahmed faisait un mètre soixante et devait peser soixante kilos tout habillé – et moralement – il ne buvait jamais alors qu’elle passait pour une poivrote, parlait habituellement gentiment et d’une voix douce, sauf dans leurs crises, et souriait à tout le monde, s’occupant apparemment à merveille et avec beaucoup d’affection des enfants, seul la plupart du temps, on les croisait allant en forêt ou au parc de jeux, joyeusement …

Geneviève et Ahmed ne travaillaient pas et vivaient des allocations familiales, dans la maison que Geneviève avait hérité de son père – mort prématurément d’une cirrhose, évidemment.

Ils s’étaient rencontrés au cours d’une ducasse, dix ans auparavant, et, pour les gens du village, la cause était entendue : lui avait vu en elle un moyen de se sédentariser, petit et arabe “un bon arabe, un gentil, hein ; mais enfin, arabe tout de même” ; et elle, vu ses défauts et son physique, “euh, pas facile non plus”, était trop contente d’avoir trouvé un homme qui semblait s’intéresser à elle, et s’était empressée de lui mettre le grappin dessus, d’où mariage six mois plus tard, et six enfants en neuf ans.

Il ne s’est jamais trouvé aucun témoin pour penser que ces deux-là avaient pu réellement s’aimer, les gens sont comme ça, ils pensent que tout peut s’expliquer logiquement, ou ne le peut pas ; Ahmed soutiendra toujours être tombé amoureux de Geneviève, et n’avoir jamais cessé de l’être – même le juge d’instruction le questionnera sur les “raisons” de cet amour prétendu, à quoi il fera la seule réponse admissible : toutes et aucune, que voulez-vous répondre d’autre …

Les gendarmes apprenaient très vite également – c’était un petit village – qu’Ahmed, à peine sorti de chez lui, s’était directement rendu au café du village, vous devrez me croire si je vous dis qu’il s’appelait “Au guet-apens”, tenu par son meilleur et en réalité unique ami, Roger, avec l’aide de sa femme Monique.

Du témoignage unanime des quelques consommateurs qui se trouvaient dans l’établissement à ce moment, il ressortait qu’Ahmed était arrivé furibond, et s’était largement épanché auprès de Roger sur sa salope de Geneviève, cette grosse vache qui l’avait encore gravement fait chier, et l’avait à moitié mis à la porte une fois de plus … Comme souvent, car ces témoins avaient maintes fois assisté à la même scène entre les deux amis, Roger avait abondé dans son sens quant au peu d’intérêt qu’avait son épouse, tonitruant et radical, ce d’autant plus qu’il avait déjà bien picolé à cette heure un peu avancée de la soirée, et, une fois de plus, reproché à Ahmed de ne pas “être un homme”, de ne pas s’en “débarrasser une fois pour toutes”, avec son aide s’il le fallait, “il n’était pas ancien légionnaire pour rien, bordel de Dieu, et Ahmed, le sourire kabyle ça devait pourtant le connaître, hop, un coup de lame et on n’en parlerait plus”, accompagnant ses paroles d’un geste de la main en travers de sa gorge …

Roger s’était servi au moins quatre grands verres de whisky pendant qu’il prodiguait, en boucle et sur tous les tons, ces conseils hautement philosophiques, et Ahmed avait bu la même quantité de … verres de lait, comme toujours, en se calmant progressivement, en ne disant pas grand chose.

De guerre lasse, et parce que les invectives de Roger finissaient par couvrir le son de la télé, les habitués étaient rentrés chez eux, laissant les deux hommes à leurs projets de massacre, sans en croire évidemment, pas plus cette fois-là que les autres, un traître mot : paroles d’ivrogne de cette grande gueule de Roger, ancien militaire ne ratant jamais une occasion de le clamer haut et fort, voilà tout.

Sauf qu’évidemment, cette fois-ci, les gendarmes ne pouvaient pas être du même avis.

Ils le pourraient encore moins, après avoir procédé, vers midi, à l’interpellation de Roger, qu’ils trouvaient ronflant en travers du lit conjugal, encore ivre de la veille, et incapable dans l’immédiat de s’expliquer de façon cohérente sur sa fin de soirée, mais surtout en procédant à l’audition, avant la sienne donc, de son épouse Monique, laquelle indiquait en substance avoir entendu, d’en haut, étant couchée tôt, Ahmed arriver dans le café, et son mari vociférer pendant un moment, puis n’avoir plus rien entendu, avoir supposé que les deux hommes discutaient en bas, s’être endormie, et avoir été réveillé dans la nuit par Roger qui venait se coucher, très manifestement ivre, en marmonnant “putain j’lai fait, putain j’l’ai fait”, avant de tomber sur le matelas la bouche ouverte et tout habillé.

Avait-elle regardé l’heure ? Oui, il était dans les trois heures sur le radio-réveil, même qu’elle s’était demandé, dans un demi-sommeil, ce qu’ils avaient bien pu foutre et se dire pendant tout ce temps en bas, Ahmed était arrivé vers vingt-et-une heures. Était-elle certaine des mots employés par son mari ? Absolument, elle lui avait même demandé “Quoi, qu’est-ce que t’as fait ?”, mais en vain, il était trop ivre pour répondre. Confirmait-elle que les vêtements que portait Roger étaient ceux qu’il avait hier soir ? Oui, il ne s’était pas changé, il n’aurait pas su …

A sa connaissance, Roger possédait-il une arme ? Oui, un pistolet démilitarisé, hors d’état de marche, et un couteau de combat, avec un poignet américain en guise de manche : souvenirs de la Légion, ils étaient emmaillotés dans un linge, dans un carton avec les anciens effets militaires de son mari, au grenier. On pouvait voir ? Bien sûr, il n’y avait qu’à la suivre …

Trois gendarmes avaient accompagné Monique au grenier, l’avaient vue ouvrir un carton, en retirer un linge roulé, qu’elle leur avait tendu : “C’est là-dedans”. L’adjudant-chef, ganté, avait déroulé le tissu, et découvert un pistolet sans percuteur … Et rien d’autre, pendant que les sourcils de Monique se faisaient circonflexes … “Bon, il n’est pas là, le couteau … On va faire une perquisition, si vous êtes d’accord ?”

Vingt minutes plus tard, l’un des militaires découvrait, en bas, au-dessus du grand frigo qui se trouvait juste derrière la salle du café, emballé dans un sachet plastique un couteau de type poignard, dont la poignée était constituée d’un poing américain en métal, et dont la lame faisait vingt-cinq centimètres, une lame crantée …

Non, Monique ne s’expliquait pas ce qu’il faisait là, ni non plus pourquoi on l’avait manifestement lavé récemment, puisqu’il y avait encore de l’eau sur l’arme et dans le sachet …

On avait placé Roger en garde à vue, en dégrisement pour l’instant, Monique aussi, et, au vu de ces premiers éléments, on avait évidemment placé sous scellés le couteau, d’une part, les vêtements de Roger, comportant des traces de boue sur les chaussures et le pantalon, rien d’autre de visible, d’autre part on était évidemment parti chercher Ahmed.

Les gendarmes, assez contents je suppose, à ce stade, de constater que l’enquête allait être facile, s’étaient ensuite rendus au domicile de Geneviève et d’Ahmed, et y avaient trouvé ce dernier en train de préparer le repas du midi pour la marmaille et pour lui.

Ils l’avaient arrêté.

Une perquisition avait été immédiatement effectuée, au cours de laquelle on avait saisi ses vêtements de la veille, encore jetés en boule au pied du lit, l’un de ses éternels costumes démodés, bleu celui-ci, ainsi que les chaussures qu’il portait. Il y avait de la boue sur elles et son pantalon, pas d’autres taches suspectes apparentes.

On avait interrogé les plus vieux des enfants, qui avaient confirmé la dispute de leurs parents la veille, entendue depuis leurs lits, les départs de leur père puis de leur mère, confirmant aussi que ça arrivait souvent, et que ça se terminait souvent de la même façon, leur père partant dans ces cas-là au Guet-apens, chez Roger, leur mère allant marcher dans le village ou s’asseoir sur un banc de la petite Place du Marché, ou d’autres fois prenant la voiture familiale pour aller faire un tour et “calmer ses nerfs”. Non, ils n’avaient pas entendu leur père rentrer, ils dormaient. Oui, parfois maman n’était pas encore rentrée le lendemain, ces fois-là : il lui arrivait de trouver refuge chez sa sœur, qui n’habitait pas très loin, et d’y rester, au moins la journée suivante – ils supposaient que c’était encore le cas aujourd’hui, et je plains le gendarme qui avait dû les contredire – peut-être qu’il ne l’avait pas fait, d’ailleurs, laissant ce soin aux services sociaux, mandatés sur le champ pour prendre en charge les enfants …

Ahmed, qui bien sûr demandait aux gendarmes ce qui se passait, avait été informé de l’assassinat de son épouse ; sa réaction était consignée par écrit, parce qu’il n’en avait pas eu d’apparente, s’étant contenté de ne rien dire, son éternel rictus de sourire sur la face, et n’avait posé aucune autre question, ni laissé échapper aucune larme ou aucune attitude de chagrin …

On l’avait interrogé, et pas dix minutes, évidemment, sur son emploi du temps de la veille : il avait confirmé en tous points la dispute, avec une importante précision : elle l’avait même griffé dans le cou, dans l’engueulade, en faisant un geste comme pour lui mettre une claque – et effectivement il portait une petite griffe, récente, à la base du cou ; l’arrivée chez Roger, la discussion animée contre son épouse, des mots, comme d’habitude, Roger s’en prenait à elle verbalement, la vouait aux Gémonies, et ça réconfortait Ahmed, qui ne l’avait pas facile avec elle, elle buvait beaucoup, elle l’insultait souvent, elle ne faisait rien à la maison, mais qu’il continuait pourtant à aimer, ne serait-ce que parce qu’elle était la mère de ses enfants ; ensuite, les deux hommes s’étaient calmés, avaient continué à discuter de tas de trucs, puis Ahmed était reparti chez lui, bien certain d’ailleurs que comme d’habitude, sa femme n’y serait plus. Non, il était sobre, il ne buvait jamais. L’heure ? Il ne savait pas trop, il devait être minuit/une heure, mais il n’avait pas fait attention, il disait surtout cela parce que c’était l’heure de fermeture habituelle du café de Roger, maximum, sinon il se fait sermonner par Monique. Oui, il était rentré directement.

Non, bien sûr que non, mille fois non, il n’avait pas tué sa femme, ni aidé Roger à le faire, ni été aidé par lui : tout ça, c’était des paroles en l’air, maintes fois répétées, jamais appliquées ; et puis, pour quoi faire, Mon Dieu ? Si Ahmed l’avait voulu, il aurait pu très facilement divorcer ; pour tout dire, il avait, six mois plus tôt, consulté une avocate, qui lui avait confirmé que compte tenu de l’attitude de Madame, non seulement le divorce ne poserait pas problème, mais il obtiendrait sûrement la garde des enfants, dont il s’occupait si bien. Il n’avait pas donné suite, parce qu’il voulait donner une chance à Geneviève : certainement pas pour la tuer six mois plus tard, sans aucune raison donc …

Avait-il été question d’un couteau, la veille, entre les deux hommes ? Non. Roger lui en avait-il montré un ? Non. Ahmed savait que Roger en possédait un, une arme impressionnante, il l’avait déjà vu, une fois que Roger, ivre comme souvent, braillard sur son passé militaire comme toujours, l’avait exhibé devant lui et d’autres, au bistrot ; mais hier soir, pas du tout.

Roger, enfin entendu, taux d’alcool redescendu, confirmait en substance lui aussi le déroulement de la soirée ; il affirmait qu’au départ d’Ahmed, il avait fermé le café, bu encore un ou deux verres devant la télé, traîné un peu pour ce qu’il s’en souvenait, rangé trois conneries, sans bien se souvenir ni de ses faits et gestes, ni de l’heure, puis avait dû finir par aller se coucher. Était-il sorti ? Non, pas qu’il se souvienne, ou alors pour aller pisser, peut-être. Non, en aucun cas en voiture – heureusement d’ailleurs, il était rond comme un Polonais.

Son épouse ayant confirmé qu’il s’était couché vers trois heures du matin, et Ahmed étant parti entre minuit et une heure, comment pouvait-il expliquer être resté seul de deux à trois heures en bas, à ne rien faire ? Il ne le pouvait pas, il ne souvenait pas de grand chose, il avait dû glander, ranger des trucs …

Et, bien sûr et surtout : savait-il par hasard où était son couteau ? Ah, oui ! D’accord, il voyait bien où le gendarme voulait en venir ! Bon, il ne s’en souvenait pas tout à l’heure, mais puisqu’il lui en parlait, ça lui revenait : à un moment il était parti au grenier, regarder ses souvenirs militaires, comme ça, par nostalgie alcoolisée – il avait même, là-haut, coiffé son béret ; il se souvenait avoir pris son couteau en main ; il ne se souvenait plus bien de la suite, mais il se pouvait qu’il ne l’ait pas rangé ensuite … L’avait-il lavé ? Non, pas qu’il se souvienne … Ah, il était plein de flotte ? Alors, c’est qu’il avait dû le faire …

Évidemment non, il n’avait pas tué ni aidé à tuer Geneviève, ils étaient fous ? Il n’aurait d’ailleurs pas été en état, même si l’idée lui avait sérieusement traversé l’esprit … Il y a un monde entre dire des conneries avec un pote malheureux, et les faire, non ?

Voilà en substance comment les choses se présentaient au départ, dans les quelques heures ayant suivi la découverte du corps.

  1. Le meurtre est l’acte de donner volontairement la mort, puni de trente ans de réclusion. L’assassinat est un meurtre aggravé par la préméditation ou … le guet-apens. []

303 Commentaires

  1. dibo
    Maitre
    Je suis en train d'écrire un roman, mais là , vous m'avez scotché.
    C'est absolument passionnant. Plutôt qu'un blog, écrivez des polars, réels ou imaginares. Si vous n'en avez pas le temps, pensez-y à  la retraite.
    Bravo et merci.
    Dibo
    1. LElfe
      Peut-être que si c'est moi qui commente cette horreur, ça activera la modération :lol: . Non seulement c'est ignoble, mais en termes de timing, c'est vraiment le pire jour pour poster quelque chose de ce genre. Rassurez-moi, c'est du quinzième degré?
        1. LElfe
          - Commentaire n° 139.1.1.1
          Je m'en doute, et on ne me reprendra pas à  "feed the troll", mais je voulais m'assurer qu'il n'était pas passé inaperçu (Me Mô étant visiblement occupé), espérant qu'il pouvait être supprimé.
          1. B.P.
            - Commentaire n° 139.1.1.1.1
            ça n'en est pas un (un véritable troll n'aurait pas balancé la profession de Mme Mô ou alors il aurait fait allusion à  son identité). On note cependant le traumatisme qu'Olivier vous a infligé reste toujours vivace.

            Cependant sa question, moyennant une légère orientation, aurait pu être intéressante. L'écriture de tels récits aurait-elle une valeur cathartique ?

            Le quotidien professionnel du maître doit dépasser en abjection l'extraordinaire de beaucoup de commentateurs.

            La lecture d'un billet de gabian* m'avait interrogé sur les possibilités offertes aux avocats / policiers / gendarmes ... d'extérioriser ce genre de souvenirs.

            * la chute est atroce.
            1. LElfe
              - Commentaire n° 139.1.1.1.1.1
              Il ne s'agit pas de traumatisme mais de leçon et oui, j'ai tendance à  les apprendre (si, si, cher hôte, je fais des efforts). J'ai cru comprendre que Me Mô ne voulait pas voir sa boîte mail inondée de commentaires sans lien avec le sujet (c'était l'objet de la leçon en question), donc je ne continuerai pas cette conversation : je signalais simplement ce commentaire qui, contrairement à  ce que vous réussissez à  en tirer, ne soulevait aucune piste autre que celle de la bêtise de son auteur et m'avait flanqué la nausée. :arrow:

              En outre, on peut troller en étant un habitué. Nous l'avons prouvé un temps, non? :P
  2. Rive Gauche
    Merci, d'abord, pour ce récit.
    Ses 17089 mots vous paraissaient très voire trop longs, il me semble que cette histoire les méritait.
    Point de vue de lecteur, certes. Votre point de vue d'auteur peut être différent, le point de vue de votre clavier martyrisé par une frappe rageuse doublée de projection de cendres de cigarettes l'est probablement :P

    Merci, ensuite, pour la remise en question qu'il provoque (en tout cas chez moi).
    Je pense que je ne suis pas le seul à  avoir pensé Ahmed innocent, je pense que je ne suis pas le seul à  avoir espéré son acquittement, je pense que je ne suis pas le seul à  avoir été atterré en lisant qu'il avait été condamné, et je pense que je ne suis pas le seul à  être tombé de mon fauteuil en lisant la suite... :arrow:
    Voyez-vous, miette (133) je ne lis absolument pas ce récit comme une "histoire de chasse", mais comme une invitation à  la remise en cause, comme un rappel que la complexité des choses n'est pas une tare, comme une confrontation entre nos espérances et une désagréable réalité. C'est pour cela qu'il ne fallait surtout pas que Mô interrompe le récit avant de nous dire qu'Ahmed était en fait coupable.
    Cette même histoire, si Ahmed avait été innocent, aurait eu un sens. Ahmed est coupable, elle en a un autre.

    Je me suis posé la question de ce que j'aurais fait si j'avais été juré dans cette affaire (petite prière au passage pour ne jamais être convoqué pour faire partie d'un jury ailleurs que sur un blog)
    Certes, il s'agit du point de vue de l'avocat. Forcément partiel sinon partial.
    Mais Mô nous raconte le réquisitoire, qui n'est pas sans arguments. Totalement à  coté de la plaque au vu de la fin du récit et du mobile réel d'Ahmed, mais néanmoins sérieux et crédibles.
    Ca aussi, ça fait réfléchir, le fait qu'Ahmed soit en fait coupable pour des motifs qui n'ont rigoureusement rien à  voir avec ceux avancés par l'accusation.
    Mô était persuadé à  tort de l'innocence d'Ahmed, et l'avocat général croyait en sa culpabilité pour des raisons inexactes. C'est flippant.

    Je pense que j'aurais voté l'acquittement. Je pense que le récit de Mô est fidèle - sinon dans tous les détails, du moins dans l'esprit - aux débats lors du procès, et à  la lecture du récit, j'ai cru en l'innocence d'Ahmed.
    Mais j'ai peut être été "contaminé" par la conviction de Mô que son client était innocent, il n'est pas certain que je l'aurais été de la même façon en assistant aux débats.
    Dans tous les cas, j'aurais eu un paquet de doutes qui m'auraient fait voter l'acquittement. Pas forcément convaincu de l'innocence, mais incontestablement fait voter l'acquittement.

    Et j'aurais donc été confronté à  cette présidente, qui, pour de bonnes ou de mauvaises raisons (je ne sais rien de ses motivations, et au demeurant je m'en fous un tout petit peu...) a fait pression sur les jurés pour qu'ils condamnent Ahmed.
    OK, je suis d'accord d'avance, on a que le point de vue d'une jurée, raconté par Mô. Prenons comme hypothèse qu'il s'agit de la réalité, si vous le voulez bien.
    Je suis équipé d'un esprit de contradiction plutôt suractif.
    Que des magistrats professionnels éclairent les faits au regard de leur expérience, me parait non seulement légitime mais utile.
    Exercer des pressions sur le jury pour le faire pencher dans un sens ou un autre, en jouant de leur statut voire en exerçant une forme d'autorité me parait beaucoup plus contestable, et aurait pour résultat de me faire prendre méthodiquement la position opposée (je ne dis pas que c'est intelligent, je sais que telle serait ma réaction.)
    Ce qui, au vu de la fin du récit, aurait été plutôt contre-productif... :?:

    J'espère donc que cette présidente est une exception plutôt que la règle.

    PS qui n'a rien à  voir - @Magalie (116) : Faites gaffe en proposant votre candidature. Vous dîtes faire du très bon café. Mais Me Mô est du Nord, et en est fier. Pour avoir une chance de le convaincre, il faut donc lui proposer de faire du très mauvais jus de chaussettes délavé ;)

    PPS qui n'a rien à  voir non plus, quoique - cher Mô, puisque vous nous dites :

    "J'ai pensé un temps le publier en plusieurs fois, mais j'aurais forcément dû le couper à  des endroits qui auraient obligé le lecteur potentiel à  attendre la suite, ce que j'ai supposé être désagréable -d'autant qu'il y a plusieurs suites"

    , puis-je vous demander où en est la suite (je n'ose dire la fin) d'Histoire Noire ? :?

    PPPS qui a encore moins à  voir - Dans "Sur le fil" vous avez mentionné des erreurs d'affichage des commentaires. Aucune en ce qui me concerne (Safari 5.0.5 et MacOs X.6.7), en revanche, pour ce qui est de prévisualiser mon commentaire avant de le poster... nada :(
  3. LINCOLN
    J'étais récemment plongée dans "la Défense Lincoln" (en attente depuis 3 ans) , où le papa avocat met en garde le fils avocat :
    " il n'y a rien de plus effrayant que d'avoir un innocent à  défendre";

    Avec brio, vous nous confirmez que la défense de votre client, vu sous l'angle innocent, où "chaque détail vous hante et vous effraie" a été une épreuve, physique, psychique, et au final un effondrement . Un échec, aussitôt transformé par la parole du client, pour qui le verdict semble avoir été une délivrance et une pleine réussite : il a été défendu en tant qu'innocent devant ses enfants et le reste du monde; son copain n'est plus mis en cause; et il repart raisonnablement (?) puni pour ce qui a été fait à  son épouse...... en attente de la punition pour ce qu'il a fait à  ses enfants.

    La question est : pourquoi l'avoir vu sous l'angle innocent ? puisque c'est le plus difficile à  gérer? ça facilitait quoi? ( en dehors du fait que ça répondait à  la demande du client, et à  ses voeux les plus chers)
    Pourquoi l'exigence de mise en doute, à  laquelle vous appelez la cour et les jurés, ne vaut-elle pas pour votre propre approche ? "Ahmed est innocent, je le sais depuis trois ans, je le crois ". Ah mais non, ça ne peut pas être su; ça peut juste être cru , tout comme l'inverse ;

    L'autre question, c'est le salut, dans tout ça, - le vôtre s'entend -? après ce séisme
    Les médecins des urgences Psy se précipitent chez le psy ....

    Et pour finir, hommage à  la Présidente, qui fait très professionnellement son travail , elle aussi, avec un autre étalonnage du doute et des marges d'erreur.


    J'avais beaucoup réflechi à  ce pensum qu'on nous imposait sévèrement, en fin de manip scientifique : Le calcul d'erreur, ce rigoureux exercice hyper technico mathématico chiant : il permet juste, quand on brasse dans l'inconnu, d'évaluer l'étendue de la marge d'erreur, la part du doute. Parce que toute réalité est douteuse, tout au moins dans les mesures que nous en prenons avec nos petits instruments; quand nous en avons .
  4. Pardon, Maître Mô.

    Je vous demande pardon, parce que, malgré toute votre fougue et votre talent, j'aurais sans doute voté "coupable" aux Assises (mais,le Ciel, Bacchus et Lucifer en soient loués, jamais je n'ai été jurée !).
    J'aurais voté coupable parce que j'ai trouvé les "preuves matérielles" et le mobile suffisants... et parce je n'ai pas cru un instant à  la culpabilité de Roger. Du moins, à  la culpabilité de Roger "seul". Avec la meilleure volonté du monde, je n'y suis pas arrivée.
    Pas que je considère que Roger soit incapable de tuer. Non. Il a même été formé pour ça. Mais parce que je considère Roger comme incapable de tuer gratuitement, de son propre chef.
    Roger faisait un coupable idéal,certes. Grande gueule, alcoolique, ancien légionnaire... J'en ai connu quelques uns comme lui, du temps de ma jeunesse... euh... passons, je n'en suis pas fière. Capables de tuer, oui, mais de tuer sur ordre.
    Pas de prendre l'initiative de trancher la gorge d'une femme pour "libérer" un copain.
    Roger complice, Roger tueur "matériel", oui, je le conçois sans problème. Roger agissant de son propre chef ? Roger tuant Geneviève autrement que sous l'instigation d'Ahmed ? Non.

    Roger est mort, malheureusement, et il ne pourra plus parler. Dire s'il n'a fait que "prêter son couteau" ou s'il a été lui-même "l'arme du crime". Et Ahmed, heureusement (si j'ose dire) a avoué dans des circonstances qui me font croire à  sa sincérité. Dans des circonstances qui me font croire à  votre déception, et à  votre chagrin.

    pardon, Maître.
  5. miette
    Je ne comprend pas les ressorts psychologiques de cette affaire. Ahmed, est-il un pauvre type ou un pervers manipulateur? Peut être tout simplement un peu les deux.
    D’ailleurs cela n'a pas d'importance, là  n'est pas la question.

    votre récit me fait penser à  ces "histoires de chasse" complaisamment racontées par certains médecins, des cas notables, spectaculaires, insolites, rares, surprenants, un récit qui "scotche".

    la question de l'erreur judiciaire? Voilà  qui est intéressant.... la culpabilité avouée par Ahmed à  l'issue du procès? ne contribue pas à  la réflexion, votre récit pouvait largement être interrompu à  ce stade..

    je pense à  cette photo, qu'un confrère médecin urgentiste diffusait suite à  une intervention..... on pouvait voir, un bras, transpercé par une barre métallique. Le fait qu'il ait diffusé cette photo me choque, tout comme votre récit..et que le cas d'Ahmed ait été diffusé dans la presse, après un procès public n'enlève rien à  ce sentiment. Ce n'est pas cette histoire d'hommes et de femme qui me choque..... mais le fait que vous la diffusiez si largement ..

    souhaitiez vous décharger votre cœur? dans ce cas je pourrais presque comprendre......

    mais quelle impudeur!
    1. Je comprends très bien que vous puissiez être choquée, mais vous pouvez abandonner la lecture à  n'importe quel moment. Tandis que si je suis intéressé et que Mô suit votre conseil, je suis comme vous et ça m'embête, même si vous êtes très bien, car je m'aime encore un peu, tel comme je suis.
    2. Tattoune
      Bonjour à  tous,

      Premier commentaire sur ce site....

      Je voudrais réagir sur votre commentaire, Miette.

      Pour me situer brièvement, j'ai une formation d'assistant de service social, je travaille actuellement en Mission Locale (pour ceux qui ne connaissent pas, nous nous occupons de tout les jeunes de 16 à  26 ans, hors système scolaire, sur l'orientation, la formation, l'emploi, le logement, la culture, etc...).

      Pourquoi ces précisions ?

      Vous "accusez" Maitre Mô d'impudeur. Vous êtes vous même médecin, si j'en crois votre commentaire. Tout trois, nous avons des professions nous mettant au contact du public, au contact intime. Nous partageons la vie, du moins un morceau -ce qu'ils veulent nous en donner, parfois plus, parfois moins. Nous avons notre propre vie, avec ces hauts, ces bas. Mais nous "vivons", par procuration, des situations de centaines, voire de milliers de personnes.

      Des tas de cas ne "méritent" pas qu'on s'y attarde. Je veux dire là , sans complaisance, sans mépris aucun, que les situations de ces personnes, dans la plupart des cas, sont "banales", dans le sens où elles ne soulèvent pas de difficultés particulières, et que nous pouvons efficacement aider ou résoudre une situation.

      Mais une sur cent, une sur mille, vont déclencher chez l'humain qui est derrière le professionnel, et chez tout humain normalement constitué, et je parle là  de sensibilité, des réactions plus importantes. Bien sur, en fonction de notre passé, de qui nous sommes, dans l'intégralité de notre être et de notre psychés, certain cas nous toucheront plus que d'autres. Mais il est humain de devoir s'en "décharger", de devoir en parler, afin de partager la souffrance, la charge émotionnelle induite.

      J'imagine votre réponse: il y a des psys pour cela...

      A chacun sa méthode, Mielle. La plupart des assistantes sociales, dans les services "lourds", que j'ai rencontré, font deux heures de sports chaque soir, ou boivent leur verre quotidien de whisky-apéritif-détente, ou bien comparent les avantages du Lexomil sur le Prozac. Je suis moi aussi passé par là  suite à  des affaires, qui, lorsque je les évoques, dix ans après les faits, me font encore monter les larmes aux yeux, et finir mon récit avec la gorge qui se noue. (C'est mon histoire de chasse à  moi... ) Je suis passé sur une profession qui tire un peu moins sur la corde, et j'ai appris à  me "blinder" un peu. Je suis toujours admiratif et j'avoue ne pas comprendre comment font les chirurgiens, les médecins urgentistes puisque vous en parlez, pour résister et se détacher des cas forcément difficiles qu'ils rencontrent. Ils tiennent la vie de gens entre leurs mains. Quelle responsabilité....

      Maître Mô aussi, a la responsabilité de la vie de personnes. Oh, c'est sur, elles n'en mourront pas. Mais la perspectives de quinze, vingt ans ou plus de prison peut être évoquée comme une "petite mort"...

      Pensez vous que Maître Mô puisse faire du tort à  son client ? Il a probablement changé un nom ou deux, de plus l'affaire est close, la presse a tout relayé, quel tort pensez vous que cela fasse à  Ahmed ? Aucun.

      Quel bien pensez vous que cela fasse à  Maitre Mô ? Je le pense pour ma part, suffisamment pour qu'il l'ait partagé ici, qu'on puisse en discuter, soulager un peu la pression justement. Peut être même avoir l'impression, avec nos commentaires, même si c'est présomptueux, de l'aider, de le soutenir dans les cas difficiles, justement.

      Impudeur....

      D'avoir livré ses sentiments profonds ? Je n'appelle pas ça de l'impudeur, j'appelle ça... de l'honnêteté ? Du courage de se mettre à  nu ?

      Ou bien je ne saisis pas le fond exact de votre pensée, ou bien je pense qu'en effet, il vous manque un soupçon d'empathie pour comprendre ce qui fait que cette situation n'est pas facile à  gérer... et le besoin de la partager.

      Sans offense ni aucune volonté de vous agresser, Miette.
  6. Betoka
    L'anecdote du juré est édifiante et me rappelle quelque chose. Pendant mes études à  l'université de toulouse le mirail, une de mes profs de psycho sociale à  été appelée à  être juré en cours d'assises. Sa spécialité: l'influence sociale et notamment l'autorité (Milgram pour l'exemple le plus connu). Et elle a vu exactement la même chose que cette juré, en le comprenant et sans rien pouvoir y faire. Si les 3 magistrats ont une idée arrêtée sur la culpabilité de l'accusé, l'autorité que leur confère leur statut va forcément influencer au moins 3 autres jurés qui vont faire confiance au magistrat "qui sait", "qui à  l'habitude"...
    Bref dans les faits, les jurés des cours d'assises, ce sont les trois magistrats. Une réforme à  ce sujet n'est elle pas urgente?
  7. Maître,

    Un grand bravo pour ce récit qui fait, je dois l'avouer, froid dans le dos.

    Le suspens est conservé jusqu'à  la fin, la révélation de votre client est juste abominable, vous qui étiez, au plus profond de vous même, sûr de son innocence, de l'amour qu'il portait à  ces enfants.

    Ce récit, et vous l'avez très bien exprimé, nous montre toute la difficulté de votre métier.

    Encore bravo donc pour ce récit !!!!
  8. Midship
    3 heures du mat', je n'ai pas pu enlever mes yeux de l'écran depuis deux heures (je lis lentement). Bon, y'a plus qu'à  essayer de dormir. Cela surprendra certains, mais je vous dit bravo et merci.
  9. Marco
    Mon Cher Confrère,

    Edifiant et passionnant récit, qui transcrit bien la réalité de la Cour d'Assises, et du délibéré, cet endroit mythique où nous n'irons jamais, afin de continuer de plaider. S'il est vrai que le dernier mot devrait revenir à  la Défense, c'est bien aux magistrats du siège qu'il revient.

    Oui parfois ils nous mentent, parfois nous les acquittons, parfois nous hurlons, et parfois nous vomissons nos tripes au sortir d'une audience. Mais c'est finalement là  que se trouve je le crois l'âme du métier.

    Bravo à  vous, d'avoir trouvé la force de retourner aux assises avec celui-là , qui semble-t-il avait retrouvé un semblant de moralité. D'avoir continuer à  exercer notre sacerdoce, plaider pour convaincre, quelle que soit la cause, et quel que soit l'enjeu.

    VBD
  10. maigret-salomon
    Maître, Il serait assez extraordinaire que vous ne connaissiez par Primal Fear, avec R.GERE et E. NORTON (1996). Mais si tel était le cas, courrez le louer. Vraiment ... Vite ...
      1. Pom l'AJ
        - Commentaire n° 128.2.1
        Très bon film en effet ! Edward Norton est génial (comme souvent) ! Il a été écrit pour vous :P

        Et c'est là  qu'est le problème : vos affaires sont pires que les histoires imaginées dans les films. La réalité dépasse bien trop souvent la fiction.
        Je frémis d'un Ahmed, de son refus l'air de rien de vous dire son mobile, suite à  l'aveu de son crime.

        Et je me demande : s'il vous avait révélé sa culpabilité et son mobile dès le début, auriez-vous pu soutenir qu'il était innocent - juste pour lui éviter prison ? - Bon, ça paraît un peu too much et vous êtes trop bien :lol: pour faire un truc pareil. ok question idiote :?

        Autre situation : serait-il envisageable de plaider l'innocence d'un assassin dont vous connaîtriez la culpabilité pour lui éviter la prison (ainsi que famille d'accueil pour ses enfants et tutti quanti) ou reste-t'on toujours dans une plaidoirie sur les circonstances atténuantes
        De telles circonstances peuvent-elles aller jusqu'à  une exemption de peine (pénale en tous cas), alors même que l'infraction a été réalisée ?

        C'est vraiment dur le droit pénal, très intéressant mais de l'extérieur. Je deviens déjà  parano sur le moindre défaut dans une construction, sur les interventions nullissimes des syndics, et j'en passe .. , que serais-je si je faisais du pénal je verrais des Ahmed partout, équiperais mes filles (5 et 3 ans) de flashball et leur apprendrait le karaté.. :x :roll: grave.. bref, vive le droit immobilier :mrgreen:
      2. enniop
        - Commentaire n° 128.2.2
        Maitre, votre notoriété (méritée) atteint des sommets !!!
        la télévision française l'a programmé spécialement pour vous puissiez le regarder.
        :D :D :D
        en ce moment même sur FR3
  11. Tocquevil
    A propos de la réticence d'Ahmed a accuser Roger : ne faut-il pas y voir une variante du Dilemme du Prisonnier ? Tous deux peuvent être individuellement condamnés ou acquittés, ou bien conjointement condamnés. Doivent-ils (1) dirent la vérité, qui les condamnerait tous les deux, ou bien (2) nier, ou encore (3) nier tout en chargeant leur complice ? Si Ahmed, poussé par son avocat, choisissait cette dernière option - très dangereuse pour Roger - il pousserait Roger - qui oscille entre les options (2) et (3) - à  adopter la position (1) : en racontant la vérité, Roger minimiserait alors sa condamnation, et mettrait en grandes difficultés Ahmed, le principal protagoniste. Dès lors, Ahmed a tout intérêt à  conserver l'option (2).

    Ce raisonnement me semble largement à  la portée d'Ahmed, qui ne semble pas être un imbécile vu ses capacités de dissimulation.
  12. Beau récit, proche d'une nouvelle publiable. Effectivement difficile métier que celui d'avocat. En tant que citoyen je m'interroge souvent sur ce métier, les avocats des grands criminels ou des multirécidivistes connaissent il la vérité sur leur client ou s'efforcent ils de les défendre dans un élan de "on a tous les droit à  un avocat" sans profonde conviction. Bravo.
  13. Della
    Cher Confrère,

    Je suis pétrifiée.
    Pour avoir plaidé des cas (notamment un cas, mon Ahmed à  moi) où il fallait chercher bien loin une once de moralité, je comprends parfaitement votre effroi et j'ai crié en lisant certains passages de votre récit épique.
    La moralité de cette histoire est peut être qu'il est dangereux de se faire juge et partie.... ou même témoin de moralité de son client....
    Dans cette affaire plus que dans toute autre, il fallait précisément être l'avocat du diable....
    Mille Bravos pour votre courage anyway.....

    Della
  14. memoriante
    une question, concernant l'affaire du meurtre : l'accusation prétend que Madame est montée dans le véhicule de Roger..... mais vous dites que seules les traces de Roger et Ahmed y ont été relevées, pas celles de Geneviève ?
  15. NAVARRE
    PASSIONNANT MAIS PERSONNELLEMENT J'AI DU MAL A CROIRE À L'AUTHENTICITÉ DE LA SCÈNE DE LA RENCONTRE NOCTURNE DE LA VIEILLE DAME JURÉE AVEC L'AVOCAT DÉVASTÉ ( IL NE MANQUE QUE LA PLUIE ET C'EST DU SCORCESE ) . LES JURÉS QUITTENT LE TRIBUNAL APRÈS LE VERDICT ;ET SE TIENT ENSUITE L'AUDIENCE CIVILE ;ON NE VOIT PAS LA BONNE VIEILLE ATTENDRE LONGTEMPS LA SORTIE DU TÉNOR POUR LE CONSOLER ET BAVER SUR LES JUGES QUI C'EST BIEN CONNU ONT POUR MISSION DE FAIRE CONDAMNER DES INNOCENTS ( LA PREUVE DANS CETTE AFFAIRE )" SI NON È VERO È BEN TROVATO" .PAR AILLEURS UN PEU DE Mô..DESTIE Eà›T ÉTÉ DE BIENVENUE LORS DE L'ÉVOCATION DE LA BRILLANTE MAIS VAINE PLAIDOIRIE DU DIT TÉNOR ...
    1. Je n'ai pas dit qu'il ne pleuvait pas...

      Si je l'avais écrit en majuscules, vous y auriez plus crû ? Bon, comme à  part vous dire que c'est vrai (j'ai "maquillé" un truc dans cette scène, et si je vous disais ce que c'est, vous me croiriez encore moins...), je ne vois pas comment vous en convaincre, je vous laisse à  vos doutes ; juste, raconter ça en l'inventant n'aurait pas grand intérêt, vous savez...

      Et sur le second point, je m'en suis expliqué dans le texte je crois ; mais ça se discute sûrement. Allez, je vous réponds par une petite boutade bien connue sur le sujet : la modestie, je la laisse à  ceux qui en ont besoin !
    2. Crevek
      Quitte à  utiliser de l'italien autant le faire sans fautes. Cela fait moins tâche : "Se non è vero, è bene trovato". Si en français se dit se (lire cé) en italien, et même si le "é" final de bene ne s'entend pas, vu à  la vitesse à  laquelle ils parlent, à  l'écrit il existe.

      Maitre j'attends toujours vos éclairements sur mes questions.

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