C’est un magnifique moment de Justice.
J’ai eu la chance d’en connaître huit, mais celui-là , si loin, si intense, résultant d’un tel travail, de tels combats…
Alors, un peu en forme de1 très sincères excuses : je souhaite vous expliquer pourquoi je n’arrive pas à me sortir de ce moment récent où, debout2 devant le box des accusés, l’on a compris que les personnes que nous défendions étaient acquittées…
J’arrive parfaitement à revenir au sein de ma famille, à “redresser” le cabinet en avalant le boulot en retard, mais je n’arrive pas à écrire ici : question de contraste d’intensités, vous comprenez ?
Non ? Alors, venez-y, sur ce banc des avocats, allons ensemble jusqu’à un instant avant le verdict…
Pour mes deux confrères, trois années de travail acharné, un dossier d’un volume effrayant, qu’ils connaissent pourtant par cœur, et cette précédente décision de condamnation, comme une claque dans leurs visages et comme une mise à néant de tout ce travail passionné…
Pour moi, le respect de ce même travail, le leur donc, j’ai trouvé en arrivant un nouveau dossier côté témoin par témoin, avec pour chaque audition des notes incroyablement fiables me disant qui a dit quoi et quand, qui dit l’inverse, et comment soit conforter les déclarations de ce témoin, soit les invalider (A l’audience, nous disposons ainsi de trois tomes bien pesés chacun)…
Et un petit stress supplémentaire, deux plutôt : je suis attendu, en tant qu’élément nouveau; et je suis en terre plus qu’étrangère : je n’y étais pas avant, je ne suis pas d’ici, et je ne connais ni les lieux, ni aucune des personnes concernées, qu’il s’agisse des témoins3, des accusés eux-mêmes, des confrères et des magistrats -même la salle, je ne l’ai jamais pratiquée – je constate vite qu’elle est climatisée, merci Dieu des Plaideurs, et que les greffières y sont aussi sympas et drôles qu’ailleurs, elles qui voient tout; que l’huissier audiencier est un vieux de la vieille, ici comme ailleurs, avec qui il fait bon échanger la petite phrase qui tue lors des suspensions, ici comme ailleurs, mais voilà tout, la peur de n’être pas moi-même demeure…
Trois, plutôt : Moustachix, l’avocat qui m’a demandé de venir, est un ami, et un type admirable qui fait l’honneur de notre profession : le décevoir serait une trahison supplémentaire…
Voilà le contexte général, auquel doivent être ajoutés le décalage horaire4, la séparation d’avec mon immense femme et mes deux marmots adorés5, et l’incroyable tension qui règne sur ce dossier, dont j’apprendrai rapidement qu’elle ne vient pas que du dossier lui-même, mais peu importe ici, j’ai dit “brève” et ça digresse déjà , on ne se refait pas…
Deux semaines de travail invraisemblable, en ce sens que lorsqu’on ne travaille pas on travaille encore : on se lève tôt, on en parle, on va au Palais, on en parle6, la journée s’écoule au rythme des témoignages et on se bat, sur tout, tout le temps : il y a eu je crois 84 témoins entendus, six experts, huit policiers : à chaque audition, l’avocat de la partie civile est debout avec six questions; l’avocat général est debout avec trois questions; nous sommes tous trois debout avec ( (six+trois = neuf) x trois = ) vingt-sept questions.7 .. Sans parler ici des incidents d’audiences, sortes de petites “piques” inutiles mais alourdissant encore la chose, surtout pour Moustachix, directement mis en cause et dont je ne crains pas de dire ici qu’il est un héros8 …
On sort du Palais après ces audiences forcément exténuantes, et on en parle; on fait la route inverse pour rentrer, on en parle, et on en parle encore toute la soirée; on en rêve, forcément, et on se lève tôt, on en parle…
Onze jours à ce rythme, tout est devenu obsession, même si on parvient souvent à rire entre deux angoisses.
Arrive le dernier jour, celui où tout le monde est soulagé qu’il n’y ait plus de témoins, et la première avocate plaide, après avoir écouté les -longues- histoires contées par nos deux adversaires : MLF, tel est son pseudo, tel est son nom, et croyez-moi ça lui va comme une épitoge va à une robe, est la première à plaider, et elle nous fait la faveur de débroussailler sérieusement le terrain, de l’enquête aux constatations médico-légales, des inexactitudes aux omissions, des présupposés aux pré-jugements…
Lorsqu’on repart ce soir-là , Moustachix et moi convenons de nous lever vers deux heures, et d’écrire nos plaidoiries en nous répartissant plus ou moins les choses qui doivent encore être dites…
Ce qui fut fait : j’ai un souvenir précis de cette nuit d’avant plaidoiries, que nous avons passée, chacun dans une pièce différente, à travailler encore, une dernière fois, en s’échangeant les procès-verbaux de différentes auditions, en demandant à l’autre s’il parlerait de ci ou de ça, compulsivement et les stylos en sueur, le tout en caleçon, à voix sensées être basses9, et en nous faisant des cafés toutes les demi-heures…
Départ à sept heures, silence dans la voiture, tension, encore, fatigues pour l’instant contenues, direction, une dernière fois, la salle d’assises qui s’avérera bien-sûr être comble…
Moustachix plaide deux heures trente, magnifiquement, avec fougue et émotion : il dit à lui seul toute l’injustice de cette affaire, et se rassoit la voix cassée…
Pause.
Je sors fumer une cigarette, il était prévu que si mon confrère était très long, l’audience serait suspendue pour le déjeuner et que je plaiderai l’après-midi, ce qui ne me réjouissait pas, il s’agit de midis que les avocats connaissent bien, détestables, où votre peur a le temps de vous rattraper, et où vous ne mangez rien et ne dites pas un mot, de crainte de mélanger et déjà tout à vos futurs propos… Mais finalement, je peux plaider dès ce matin, dans dix minutes…
Je fume, les gens sentent bien que ce n’est pas le moment de venir m’expliquer la vie; un élève-avocat qui me connait est en stage là -bas, et vient me saluer, en me demandant si ça va : comme je peux difficilement l’étrangler de mes mains puis sauter dessus à pieds joints, je lui réponds que ça ira mieux dans quelques instants, et que ce salopard de Moustachix a tellement bien plaidé et tellement dit de choses que je dois réorganiser mes pensées encore une fois, et que j’ai l’impression de n’avoir plus rien à dire…
Retour, et je plaide, deux heures. Attente debout, seul et complètement fermé, dans une salle pleine et avec en tête l’enjeu qu’à ce moment-là vous voyez comme une sorte de montagne colossale, je recommande chaudement ces instants à toute personne qui veux tester sa résistance au stress…
Démarrage laborieux, syndrome du fumeur dit “de la langue collée dans la bouche sèche”, ça passe au bout de quelques minutes mais il faut parvenir à articuler quand-même sans que ça ne se voie trop pendant ce laps de temps… Puis ça plaide : outre le “tronc commun” du dossier, j’ai moi à développer deux derniers points : les témoins, si controversés, de l’emploi du temps d’Antoine pour l’après-midi, ses “alibis”; et une thèse alternative, celle de F.K., magnifique coupable potentiel, ce que je fais donc…
Je finis, sincèrement ému, en parlant d’une citation de Zola10 puis de la fille d’Antoine, que les jurés ont vu à la barre, adorable gamine de seize ans qui veut faire du droit, à qui je demande qu’on montre ce qu’est le droit, ce qu’est la Justice, en acquittant son père.
J’ai la gorge serrée et les yeux piquants en me rasseyant, voix éraillée à mon tour, dans le silence, j’ai le plaisir de constater que des jurés sont comme moi, et même… MLF, aussi, qui brille du regard…
J’écoute avec mes confrères l’avertissement aux jurés et les formules cabalistiques de toute fin d’audience, puis nous sortons, des gens nous félicitent, nos clients aussi, mais nous sommes en pleine “retombée”, et nous savons, même si nous sommes forcément contents d’avoir fait notre boulot, qu’un ultime et dernier stress commence, l’attente du verdict : nous partons déjeuner à trois, loin de tout ça, avec la grande fille juriste de Moustachix, un soutien moral n’étant pas de trop…
L’huissier, comme dans toutes les Cour d’Assises, possède l’un de nos numéros de portables, il nous appellera…
Un point fait l’unanimité dans nos discussions : en tout cas, les jurés ont été d’une rare attention tout au long des plaidoiries, constamment…
Nous nous armons intellectuellement pour une éventuelle longue attente, sept heures je crois en première instance, et essayons de nous parler de nos interventions respectives, mais c’est un exercice délicat à ce stade, de ne pas trop espérer, devenus soudains trois vieilles superstitieuses en diable, nous mangeons sans appétit et buvons peu, en plein soleil, attablés sur une terrasse proche du Palais, vers lequel nous envoyons tout ce qui nous reste d’ondes positives…
Personne n’oserait émettre le moindre pronostic, et nous essayons tant bien que mal de nous dire que quoi qu’il arrive, nous avons fait notre travail, à peu près… Moustachix, involontairement, me plonge dans de nouvelles affres en me faisant remarquer que j’ai oublié de parler d’un témoin, en développant la thèse du faux-coupable, ce qui est vrai, je suis consterné, “pas grave ça a été largement dit dans les débats”, me disent en chœur mes deux camarades… Oui mais n’empêche, me voilà un peu coupable si d’aventure…
Une heure est passée, la fatigue, extrême, nous tombe dessus avec la chaleur; la jeune-fille qui nous sert est originaire de l’aîle des Pins, elle nous reconnait et “croise les doigts” pour nous, elle est venue écouter ce matin, elle nous félicite…
Le téléphone de Moustachix sonne au bout d’une heure, j’en crache ma gorgée de vin blanc : c’est un client, je remplis à nouveau mon verre…
Nous sourions parfois à l’évocation de telle ou telle scène, et nous parlons de nos expériences de ces moments affreux où plus rien ne vous appartient, et où, sous peine de blessure profonde, il faut absolument parvenir à penser qu’on a à peu près tout dit… Nous tombons d’accord, en tout cas, sur deux choses : si le délibéré dure trop longtemps, c’est mauvais; et si en rentrant tout à l’heure la Cour et les jurés ne nous regardent pas, c’est très mauvais (“J’aime bien l’avocat, mais j’ai condamné son client, je n’ose pas le regarder…”).
Le même téléphone sonne une nouvelle fois, et cette fois c’est la bonne, l’huissier nous appelle : nous regardons tous nos montres, une heure trente de délibéré… On se regarde, personne n’ose formuler à voix haute ce qu’il pense à cet instant, “c’est bon signe”, nous sommes soudain terrorisés, terriblement et irrémédiablement superstitieux maintenant.
On regagne la voiture en courant presque, et sans un mot désormais.
Nous entrons dans la salle qui est à nouveau bondée, toutes les places assises sont occupées et il y a des personnes debout le long de tous les murs. Elle est pourtant totalement silencieuse…
Nous reprenons nos robes, je serre la main d’Antoine en murmurant “cette fois on y est”, et nous nous asseyons pour la dernière fois à notre banc, toujours silencieux. Devant nous, greffière et huissier, avec lesquels on “cause” d’habitude aux suspensions, ne se retournent pas et regardent devant eux…
Nous demeurons ainsi dix minutes, dix très longues minutes de silence, pendant lesquelles chacun pense compulsivement, en regardant dans le vide… Je pleure presque sur la pensée omniprésente que ça ne peut pas être une condamnation, pas après tout ce travail, pas dans ce dossier pourri, pas cet homme-là … La sonnerie retentit et nous fait sursauter : “La Cour” !
Debout, Moustachix et moi échangeons un regard affolé : les jurés ont les yeux baissés ou braqués vers la foule, aucun, même ceux qui sont les plus proches de nous, avec lesquels nous avons souvent souris ces dernières semaines, ne tourne la tête d’un millimètre vers nous…
On se rassoit, et le Président tient à faire une annonce informelle avant le prononcé de la décision : “J‘avertis que je ne tolèrerai aucune manifestation publique à l’énoncé du verdict, quel qu’il soit.” A cet instant, je me dis que c’est foutu, cette annonce ne me semble pas avoir de sens autrement…
“Messieurs, levez-vous” : nos clients sont debout dans leur box, leurs trois avocats se lèvent aussi, en bas devant eux, c’est la tradition aux assises, une façon d’assumer jusqu’au bout, le dernier rempart… Le silence est total, je me force à lever la tête et à regarder le Président lire la décision.
“A la première question : “L’accusé Ambroise-Dydime KONHU a-t-il volontairement donné la mort à Mika Kusama, la Cour et le jury ont répondu “non”.”.
Toujours le silence : Dydime avait été acquitté, son acquittement était à nouveau requis, rien n’est jamais certain mais l’on pouvait raisonnablement penser qu’il en serait ainsi; une pause, pendant que le cerveau fonctionne maintenant dans une sorte de vis sans fin, sans air, sans plus aucun air…
“A la seconde question :”L’accusé Antoine KOHNU a-t-il volontairement donné la mort à Mika Jusama, la Cour et le jury -pause, Président je te hais, je ne veux plus jamais être avocat- ont répondu “non” …” !!!
Je n’entends plus rien, pas même le prononcé des acquittements eux-mêmes dans un instant : je fonds en larmes, toute la tension accumulée retombe; dès cet instant je me tourne vers Moustachix et MLF, on se regarde, tous les trois en pleurs, on sourit et on se prend dans les bras; la salle bruisse, ils commencent à comprendre dès ce moment, en nous voyant aussi sans doute, mais ils attendent le mot “acquittement” et là , la salle explose, une sorte d’ovation, tout le monde pleure, pendant que nous embrassons déjà les clients, et que les jurés maintenant nous regardent et nous sourient…
Je dis “merci” à l’une d’eux, de loin, elle me fait un clin d’œil; on s’étreint à trois, les avocats, et ça pleure de plus belle, déjà les journalistes sont à côté de nous, et je vois le Président traverser la salle et partir, je vois les gens du Comité de Soutien pleurer aussi et se congratuler, je vois la famille et les kuniés qui sourient à n’en plus finir…
Je ne bouge plus, je m’adosse au box des accusés et je savoure, totalement, je regarde la salle, les jurés, mes deux vaillants Confrères, les magistrats, nos clients, la presse, je stocke et je fais durer, je suis, putain de merde, mes amis, ma femme et mes enfants, Moustachix mon frère d’armes qui m’a permis de vivre ça, je suis AVOCAT… Je souris en pleurant, comme un benêt, comme tout le monde…
On donnera les interviews de rigueur, très émus; très retenus, aussi, parce que sur le banc des victimes, les parents de Mika sont effondrés, évidemment…
Antoine dira lui aussi à quel point la Justice l’avait trahi depuis sept ans, à quel point il n’y croyait plus…
Puis on rangera une dernière fois les tonnes de papier du dossier, les cartes, et on quittera la salle, que je regarde une dernière fois depuis la porte, du plafond au sol, et que je n’oublierai pas plus que le reste, jamais…
Il y aura une fête kunié et la coutume, devant le Palais, puis une fête tout court, avant l’avion que je reprends dès demain matin, et entre les deux le (premier !) verre bu juste avec Moustachix, chez lui, en attendant d’être rejoints par les autres…
Mais j’ai pu graver dans mon crâne ce moment incroyable du prononcé du verdict, là -bas, debout devant le banc de la Défense, cette sorte d’incroyable déferlement de joie pure…
Alors oui, j’avoue que pour l’instant, je suis encore un peu debout devant ce banc, à entendre, non, à recevoir, cette belle décision…
A tirer les leçons de ce travail de mes confrères, de la tenue de cette audience, de ce que j’ai bien ou mal fait, à ce même banc…
A comprendre mes faiblesses, digérer mes forces, retenir qu’ils n’ont, ni les uns ni les autres, strictement jamais renoncé ni baissé les bras, retenir que pendant tout ce cheminement vers cette dernière journée, Moustachix est demeuré soutenu par les siens, retenir la force incroyable que procure le fait de savoir que ce qu’on fait ou qu’on dit est juste, simplement juste…
Et à me demander, à vrai dire, au sujet de ce banc…
Comment je peux, définitivement, y rester. Debout dessus.
- Très petites, faut quand-même pas exagérer, on ne se doit pas grand chose, n’est-ce-pas ? [↩]
- Trois avocats, le pluriel n’est pas majestatif mais si quand-même un peu… [↩]
- Ah, les noms et prénoms kuniés !!! Je les mélange tous, sans jamais savoir vraiment qui a dit quoi et qui est avec qui : que du bonheur… [↩]
- Excuse cependant facile dont par définition il est exclu que je me serve [↩]
- Excuse moins facile mais dont, sens de l’honneur et orgueil à la con aidant, il est tout aussi exclu que je me serve [↩]
- Longs embouteillages jusque Nouméa Centre le matin, fatigue progressive aidant, ça va vite devenir le moment de vide cervical de la journée, c’est vous dire ! [↩]
- Pour le principe, au moins… Le législateur a voulu que la défense questionne en dernier : il n’avait pas prévu que la partie civile en ferait autant, bien fait, mais hors de question de se laisser pilonner sans réagir, n’est-ce pas, fut-ce après une heure d’audition… Le législateur en a eu pour son argent, croyez-moi !!! [↩]
- Si tu me lis, je le pense, et ne t’embête pas à commenter : je sais parfaitement que tu me répondrais “J’ai juste fait mon boulot” ! [↩]
- Encore toutes mes excuses à la famille Moustachix, nous avons des voix trop graves pour être réellement basses, je le sais… [↩]
- Si concerné par le gars du Nord que je suis ! Sa phrase, dégottée la veille par… Madame Moustachix, qui n’en finit pas de nous supporter, dans tous les sens du terme, dit en substance (je ne retrouve pas l’original, là ): “La Justice ne craint pas d’affirmer qu’un condamné est innocent, et ne croit pas insulter les juges qui l’ont condamné en le disant” ! Opportun… [↩]
La différence sémantique n'est pas mince et n'est pas que sémantique !!
amitiés de l'été austral
Je vois que rien ne change, ou presque, quel que soit le soleil sous lequel on se chauffe...
Quelques éléments de sémantique juridique, donc !
D'abord, vous le savez, même si parfois c'est malheureusement théorique, une personne est présumée innocente tant qu'un jugement définitif ne l'a pas déclarée coupable (Article Préliminaire du CPP, III).
On pourrait s'arrêter là : Antoine n'a pas été déclaré coupable, et demeure, à jamais, présumé innocent.
Mais au surplus, on différencie usuellement une décision de relaxe (correctionnelle) et d'acquittement (criminelle) par le fait que, dans le premier cas, il ne s'agisse pas obligatoirement d'une déclaration d'innocence, tandis que dans le second, si. Pourquoi ? Parce que ça se déduit des libellés des textes régissant l'une et l'autre, et que, en gros, s'il existe la "relaxe au bénéfice du doute", qui est même la plus fréquente, il n'existe pas d'"acquittement au bénéfice du doute", en droit français : en matière criminelle, la Cour d'Assises juge qu'on est coupable ou qu'on ne l'est pas, point.
La relaxe est définie par l'article 470 : "Si le tribunal estime que le fait poursuivi ne constitue aucune infraction à la loi pénale ou que le fait n'est pas établi, ou qu'il n'est pas imputable au prévenu, il renvoie celui-ci des fins de la poursuite."
S'ajoute à ce texte le fait que le Tribunal Correctionnel, contrairement à la Cour d'Assises, motive obligatoirement ses jugements, et peut ainsi prononcer expressément une relaxe au bénéfice du fameux doute, qui comme chacun sait profite à la personne poursuivie.
Pour la Cour d'Assises, c'est différent, plusieurs textes entrent en jeu, les articles 355 et suivants du CPP, d'où il résulte, pour ce qui nous concerne :
- au préalable, article 349, que les questions posées à la cour seront ainsi libellées : "Chaque question principale est posée ainsi qu'il suit : "L'accusé est-il coupable d'avoir commis tel fait ?"
- de l'article 356, que chaque juré et magistrat vote secrètement sur chacune des questions posées à la Cour, et que sa réponse est "oui" ou "non" (pas "peut-être mais je ne peux pas le prouver", oui ou non, point) ; en l'occurrence (souvenez-vous du moment terrible où le Président a lu publiquement la réponse à cette question...) : "L'accusé Antoine Konhu est-il coupable d'avoir volontairement donné la mort...?"... "Est-il coupable ?" : réponse : non !
ça s'appelle incontestablement une déclaration d'innocence, si les mots on un sens !
- de l'article 359, on déduit que puisqu'il faut dix voix en appel pour une décision défavorable (sur quinze), il faut donc au moins six voix pour une décision favorable ; je crois bien, mais c'est juste pour l'anecdote, qu'on en a eu un peu plus, d'après la rumeur à la sortie du Palais, qui parlait même d'une décision prise à la majorité absolue, avec le double de voix que le nombre requis...
- pour enfoncer le clou, il ressort, enfin, par exemple de l'article 361-1 (..."elle déclare l'accusé non coupable" !), et surtout 363 : "Si le fait retenu contre l'accusé ne tombe pas ou ne tombe plus sous l'application de la loi pénale, ou si l'accusé est déclaré non coupable, la cour d'assises prononce l'acquittement de celui-ci.", que la déclaration de la Cour, avant prononcé de l'acquittement, est, expressément et sans le moindre doute possible, une déclaration de non culpabilité, et que l'acquittement n'est que la résultante de cette non-culpabilité !
Coupable, en français : "personne qui a commis une faute". Non coupable : qui n'en a pas commis. Synonyme : innocent.
Voilà , j'ai voulu décomposer, pour vous donner du grain à moudre, mais il n'y a aucune discussion possible, tous ces textes étant au surplus de droit pénal, et donc d'interprétation stricte : l'acquittement d'un accusé est une déclaration d'innocence, point barre.
Si donc quelqu'un se permet, après décision définitive d'acquittement, de jeter le moindre doute sur l'innocence de la personne, elle viole la loi et commet le délit de diffamation (je croyais même à vrai dire qu'un texte spécifique réprimait le fait de nier une décision de justice, mais j'ai du rêver, je ne le trouve pas, mais peu importe). Il me semble même qu'on pourrait aussi utiliser l'article 9-1 du Code Civil, cette fois, qui protège la présomption d'innocence avant condamnation - mais donc je suppose également aussi après déclaration d'innocence !
Bref, Antoine et Dydime sont innocents, et toutes déclaration du contraire constitue un délit.
Bonne journée !
Nouméa, le 10 septembre 2010
à Madame Alliot-Marie,
Ministre de la Justice, Garde des Sceaux
Madame le Ministre,
Le 2 mai 2002, disparaissait à l’Ile des Pins une jeune touriste japonaise voyageant seule,
Mika Kusama. Le 6 mai son cadavre était découvert sur un îlot et le 7 , deux frères kanak, Didyme
et Antoine Konhu, étaient arrêtés, soupçonnés d’être les auteurs du meurtre. Un fiasco judiciaire et
policier a suivi, en partie redressé depuis, il est vrai, du moins pour ceux qui avaient été injustement
accusés (et pour l’un lourdement condamné en première instance), sept ans plus tard, à l’issue du
procès en appel.
Informée en 2004 des nombreuses anomalies accumulées dès la découverte du cadavre puis
au cours de l’instruction, la Ligue des Droits de l’Homme et du citoyen de Nouvelle Calédonie, a,
aux côtés du comité de soutien des accusés, décidé de se mettre en mouvement pour un procès
équitable, pour le respect des règles de procédure et pour le bénéfice du doute envers les
accusés dès lors que la preuve de leur culpabilité n’était pas apportée par l’accusation.
Pour l’honneur de la Justice, notre organisation, sollicitant et entraînant des personnalités
locales unanimement respectées en Nouvelle-Calédonie :
- s’est élevée contre une accusation sans preuve,
- a relevé avec les avocats de la défense de nombreuses irrégularités et vices de
procédures,
- a dénoncé le harcèlement à l’encontre des accusés visant à les amener à devoir prouver
leur innocence alors que c’est en droit à l’accusation d’apporter la preuve de leur
culpabilité,
- s’est indignée, au lendemain du verdict du 12 décembre 2007 que le doute n’ait pas
bénéficié à l’un des deux accusés alors qu’aucune preuve de sa culpabilité n’avait été
apportée,
- a participé attentivement dans les rangs du public, aux onze journées du procès d’assises
tenu en appel à Nouméa.
Nous avons salué le professionnalisme avec lequel le président de la cour d’assises d’appel
a mené les débats du 14 au 28 avril 2009 et nous nous sommes réjouis qu’à l’issue d’un délibéré
exceptionnellement bref, Didyme et Antoine Konhu aient été reconnus innocents du crime
commis sur la personne de Mika Kusama.
La qualité des débats publics lors du second procès a permis d’établir l’étendue des
dysfonctionnements qui avaient entaché gravement le déroulement du premier procès comme de
l’enquête et de l’instruction initiale.
Subsistent à ce jour des pistes sérieuses pas ou peu explorées, évoquées précisément au
procès par plusieurs enquêteurs. Malgré le temps gaspillé à courir derrière des préjugés, malgré
des éléments perdus sans doute à jamais parce que non collectés à temps, ou ignorés par parti-pris,
malgré les incohérences passées, des professionnels avisés peuvent, s’ils sont mandatés, analyser les
éléments disponibles, dont ceux révélés au procès lui-même, et opérer des rapprochements
nouveaux susceptibles de faire à terme émerger la vérité et dans un premier temps, d’en approcher.
L’un de nos adhérents a rédigé son témoignage, paru le 31 mars 2010 aux éditions
L’Harmattan, dans lequel il narre l’essentiel du procès en appel et publie quelques unes des
contributions des personnalités appartenant aux sphères de la religion, de la science, des arts et des
lettres qui avaient participé à la démarche citoyenne engagée.
Depuis le verdict, nous sommes restés vigilants et avons constaté que le parquet comme
vous-même n’avez pas annoncé publiquement la nouvelle information que légitimement, toute
la population néo calédonienne attend : le déni de justice que subissent depuis huit ans les parents
de la victime, le doute dévastateur qui rôde encore dans les esprits à l’encontre de deux innocents,
seront dans un premier temps atténués, lorsqu’aura enfin été ordonnée cette nouvelle information.
Cette initiative attendue sera de nature à restaurer un peu la confiance des citoyens envers
l’institution judiciaire qu’un journaliste local décrivait, rendant compte du livre paru sur l’affaire,
comme « le dernier rempart de la démocratie ».
Que ceux qui, nonobstant leur fonction dans l’institution judiciaire ou en marge de celle-ci,
ont dénoncé sans preuve les «Konhu», se murent dans le silence aujourd’hui est compréhensible.
Mais que la Justice française, comme institution de la République, compte durablement
parmi les muets dans cette affaire serait indigne pour les citoyens, dramatique pour l’image
donnée à l’étranger d’un pays comme la France, et probablement plus périlleux pour l’Etat
en Nouvelle Calédonie que nulle part ailleurs. Nous comptons sur vous, madame la Ministre pour
que cessent sans délai les atermoiements. Cette information nouvelle est attendue. Elle doit être
prise et faire l’objet d’une communication publique. Comme nous l’avons fait sans faiblesse ni
relâchement de 2004 à 2009, nous engagerions à nouveau une démarche légitime par tous moyens à
notre portée si cette décision devait être durablement différée.
Tout citoyen digne de ce nom demande légitimement à la Justice de mener dans cette
affaire son travail jusqu’au bout, cette fois sans préjugé d’aucune sorte, quelles que soient les
difficultés et les conséquences.
Avec mes salutations déférentes,
Elie Poigoune
Président de la LDH-NC
Il y avait un moment que je n'étais pas revenu consulter les blogs évoquant cette abominable affaire de l'île des pins.
Oui, les avocats qui ont défendu les deux frères si injustement acquittés méritent les qualificatifs les plus élogieux . Ils ont illustré la valeur et la portée de leur serment .Ils ont démontré que ce n'était pas un slogan et lui ont donné vie du plus profond d'eux mêmes.
J'espère que mon témoignage (qui se vend en Nouvelle Calédonie mais malheureusement assez peu en France où à ma connaissance seuls le canard enchaîné et le courrier international s'agissant de la presse écrite de grande diffusion, en ont recommandé la lecture) a su leur rendre hommage. Merci à toutes celles et ceux qui ont la possibilité de le faire connaître de ne pas se priver. Il ne me semble pas que les ouvrages de cette nature soient légion mais je peux me tromper. Croyez moi, l'affaire "Konhu" mérite la réflexion d'un maximum de citoyens , et c'est une exigence morale, tout simplement morale, oui, qui peut créer pour un citoyen, un beau jour, le devoir impérieux de se mêler du traitement judiciaire d'un meutre sordide et même de prendre la plume. Je ne l'avais pas envisagé pendant les soixante permières années de ma vie.
Je me demande encore comment ces deux hommes ont pu ainsi être accusés de ce meurtre. Aujourd'hui, 16 mois bientôt après le verdict qui les a reconnus innocents, mon indignation reste entière.
La garde des sceaux , patronne des parquets bien qu'elle s'en défende, si attentive aux plans du président de la république en dépit de la séparation des pouvoirs, n'a depuis pas exigé le supplément d'information qui, au prix d'une instruction menée dans les règles de l'art, aurait des chances raisonnables de déboucher sur l'identification du véritable meurtrier. Si elle lit ce blog ou si un de ses collaborateurs le fait pour elle, qu'elle démente mon propos, pour l'honneur de la Justice!
_La recherche d'identification du meurtrier d'une "étrangère" ne mériterait-elle pas un nouveau supplément d'information alors que plusieurs enquêteurs interrogés au procès, et non des moindres, ont indiqué les pistes sérieuses restées en jachère?
_L' innocence jugée, de surcroît en appel, resterait-elle sujette à caution?
_Le goût amer laissé sous les képis et les hermines notamment, d'un plantage retentissant imposerait-il l'oubli comme seule suite?
_La répétition (signalée par le canard enchaîné du 12 mai 2010) d'errements comparables dans le traitement judiciaire de deux affaires de meurtre, jugées en premier lieu à Nouméa et avec les trois mêmes juges initialement aux manettes (instruction, président, avocat général), toutes deux terminées en appel par un verdict d'innocence, expliquerait-elle le mutisme ministériel?
_Y a-t-il des personnages à ménager dans le fragile contexte néocalédonien ?
_Un prochain plan de l'Elysée, avec des retombées locales éventuellement, inspirerait -il une consigne de "verrouillage"à de zélés serviteurs dans le secret ?
_Le coût de quelques recherches d'ADN est il devenu insupportable pour un Etat en grande difficulté financière?
_Craint-on qu'une autre institution que la Justice puisse être aussi montrée du doigt quand sera cherché le véritable meurtrier?
_Faudrait il prendre le risque de voir la population néo calédonienne admettre que l'institution judiciaire est, en tout cas à Nouméa, restée asssez largement encore imperméable à une évolution sociale, sociétale ,économique, culturelle et politique supposée rompre depuis 22 ans avec la logique coloniale qui avait prévalu trop longtemps? Faudrait il de surcroît admettre que pareil risque émerge comme la conclusion "magistrale" d'une affaire pénale si mal engagée?
Plutôt que de rechercher des intentions inavouées et de multiplier les suppositions , n'est il pas temps d'engager une campagne puissante de l'opinion par tous les moyens démocratiques disponibles pour que l'institution judiciaire termine son travail à Nouméa tant dans l'affaire inexpliquée du meurtre de Mika Kusama que dans celle du meurtre ,également inexpliqué, de Nadia Athanase?
Faites lire "Le procès Konhu.."édité chez l'harmattan, même s'il est quelquefois difficile à trouver(sauf "en ligne")mais surtout engagez les initiatives citoyennes appropriées.
Gérard Sarda, auteur
Pingback : Affaire Konhu : le livre ! | Maître Mô
On tremble avec vous jusqu'au bout, c'est passionant de vivre ça de l'intérieur, quoique par procuration.
Je me trompe peut-être, mais j'ai l'impression que, d'une façon générale, l'importance du rôle des avocats est inversement proportionnel à la qualité du travail des magistrats et autres enquêteurs ?
Bon, le seul problème maintenant c'est qu'on attend avec impatience les sept autres grands moments de justice (ben oui, mais fallait pas faire envie aussi... c'est de votre faute maître !)
A un de ces 5.
TAL TOUL COMME DISENT LES CHEUNES;
cORDIALEMENT
abo
Salut à toi, et à toute la famille, vraiment !
Tu sais, je ne désespère pas de réussir à revenir sur votre île magnifique, mais cette fois en touriste, avec Madame Mô -et je profiterai à fond de votre sens de l'accueil, je sais très bien que tu n'as qu'une parole !
Embrasse tous les tiens.
Je suis vos pérégrinations depuis quelques temps mais n'étais encore jamais intervenu.
Or je reviens ce soir de mes premières Assises suivies du début à la fin.
Et je n'ai pas pu m'empêcher de penser à votre récit tandis que nous attendions le délibéré...même verre en terrasse histoire de décompresser après les plaidoiries, puis de stresser à l'idée de la décision des jurés.
Même attente, même coup de fil, même empressement, même silence en parcourant les quelques rues qui nous séparaient de la Cour, même regard vers les jurés...
Et surtout (quasiment) même sentiment, le client ayant été partiellement relaxé, et ne retournant pas en détention (la peine ferme étant couverte par la détention provisoire).
Un mélange d'adrénaline, de gorge nouée, et de reconcentration pour répondre aux demandes civiles.
Enfin, une pensée commune aux quelques confrères présents : "On ne s'y fait jamais ! "
Merci pour vos récits.
Le Sheriff Adjoint
vous avez un nouveau lecteur, mon fils !
Il a eu une boule au ventre, en vous lisant.
il fait circuler !!!
L'avocat en pénal a un rôle tellement important dans les grosses affaires, les prévenus se raccrochent à vous car vous avez la connaissance mais vous semblez tellement hautain et lointain de par cette connaissance ou cette habitude, qu'il était opportun qu'ils sachent, les prisonniers, que peut être derrière avocat, il y a aussi "l'humain" près d'eux.
bon, par contre, je n'ai pas dit que c'était gagné !!!
3 mots: Bravo, Merci, et Courage !
Ju./.
Ces avocats lillois qui font carton plein aux quatre coins du monde
Et pourtant, un doute m'assaille, et certains commentaires sur ce blog et celui d'Eolas l'entretiennent. Aussi, pour ceux de vos lecteurs qui espèrent vivre un jour de tels moments, et pour les autres qui grâce à vous comprennent de mieux en mieux la profonde implication de ce métier, je vous soumets une humble requête, quitte à refroidir l'ambiance.
Auriez-vous le temps d'écrire un texte d'une intensité comparable, et qui décrive avec vos môts la rage, l'impuissance, le sentiment d'échec, la culpabilité mêlée de colère envers ce *** de juge qui n'a rien compris, et toute l'arc-en-ciel de grisaille qui plombe les jours et les semaines suivant un jugement défavorable dans un procès aussi incertain ? L'avez-vous déjà vécu ? Et surtout, quels conseils donner, quelles qualités faut-il cultiver, pour se ressaisir au plus vite avant l'audience suivante, les autres dossiers à défendre, et parvenir à ne pas faire peser tout ça sur la famille Mô ?
Sans aller jusqu'à fonder SOS avocats en détresse, j'ai l'impression qu'une vie de pénaliste est parsemée de terribles moments de doute. Peut-être que certains sauront tirer profit de votre expérience à ce sujet, Maître.
J'espère qu'en vous donnant ce genre d'idée, je ne vais pas me faire agonir d'injures par tous ceux qui désespèrent de lire un jour la fin du
feuilleton le plus haletant de la blogosphère
Je viens de lire, que dis-je ? de dé-gus-ter le récit de ce moment de... triomphe (ben oui, c'est exactement ça, le triomphe, rien d'autre que ce moment de grâce où l'on est suspendu au ciel du désir satisfait !) et je regrette, mais alors, qu'est ce que je regrette que la vie ne m'ait pas permis d'embrasser cette profession à laquelle j'aspirais et à qui vous faites ici tellement honneur !
Merci maître pour tout ça...
Et merci pour cette plume qui, trempée dans votre passion, me transporte à mon tour au ciel de votre triomphe pour le partager !
J'ai tout fait, oui, tout, y compris effacer des commentaires de mon blog sans les lire, pour éviter soigneusement de savoir votre nom. Je l'ai énergiquement oublié, sitôt que je l'ai su, car comment ne pas connaître le nom d'un si brillant tribun, suite à une si brillante victoire ? Je vous jure que je dis la vérité quand je dis que je l'ai oublié, car pour moi, vous n'êtes pas un nom. Vous êtes un modèle, un encouragement, une bénédiction qui me permet de continuer de croire au genre humain...
Je me souviens du temps où vous aviez le temps de croquer des affiches de vos lecteurs alors peu nombreux. Aujourd'hui, vous aurez encore moins de temps car sans doute ce succès fera-t-il de vous un avocat encore plus recherché. Mais s'il vous plait, Maître, je vous en prie, NE CHANGEZ PAS ! Je sais que vous ne changerez pas. Et ma confiance est votre prison.
Je vous aime et vous admire et suis fière de compter parmi ceux qui, les premiers, ont mordu à l'hameçon de votre grand coeur et de votre immense talent !
Passionnément vôtre,
Imaniyé
Merci de décrire aussi bien cette introspection intérieure vécue lors d'un procès
Merci d'honorer notre profession
Merci et encore BRAVO
Ce n'est pas quelque chose de simple d'avoir à juger un autre homme.
C'est d'ailleurs une nouvelle que j'ai d'abord refusé quand j'ai su que j'avais été retenu.
De quel droit ? .Le droit, et les devoirs d'un citoyen... De quel droit pouvais je juger un semblable et pourtant je ne pouvais me soustraire à mon devoir de citoyen, de part la loi bien sur, mais en mon for intérieur surement
Ainsi petit à petit s'est imposé à moi qu' être juré d'assise est sans doute l'acte le plus démocratique qui soit et le plus grave aussi. C'est cette évidence qui m'a permis de remplir ce rôle en mon ame et conscience comme le veut la formule
Il me semble que de la première lettre me désignant juré jusqu'à la fin de la dernière audience je pourrais me souvenir de tout. Pourrais je l'écrire, le dire je ne sais pas. C'est un moment si particulier.
Votre texte m'a profondément ému, à la fois fragile et fort, sobre et dans la retenue, il dit l'intime et l'essentiel
Merci
Ainsi que votre réflexion sincère sur les affres d'un juré : on dit trop peu à quel point ça doit être difficile, et marquer profondément... Je crois (cela ne m'arrivera malheureusement pas) que je serais passé, à votre place, par exactement la même interrogation fondamentale : de quel droit juger/de quel droit refuser de le faire...
C'est pourtant aussi un moyen, je crois, de mieux se connaître, et d'une force terrible, n'est-ce-pas..?
Après 2 jours de débats où chacun a pu s'exprimer et s'expliquer, l'accusé a été condamné mais en simple spectatrice ( je n'étais pas dans le dossier) j'ai eu la conviction que c'était au terme d'un procès juste et la certitude de sa culpabilité.
Juste histoire de préciser que même les avocats reconnaissent qu'ils existent des coupables qui doivent être sanctionnés ( le comment étant un vaste débat qui a d'ailleurs lieu régulièrement céans....).
je ne dirais qu'une seule chose
BRAVO MA COUILLE
je l'savais qu't'étais l'meilleur
Bon ben c'est pas tout ça, mais finis de te gratouiller le trou du nombril en sirotant un de ces cocktails d'enfer entouré de monsieur muscle et de femmes qui n'en sont pas moins. Bref en un mot qui maintenant n'est plus.... ben tu nous as manqué mon grapouillis (bon d'accord certainement moins que ta ch'tite Famille) mais quand même c'était long.
J'avoue que j'attendais avec impatience le post qui nous donnerait le résultat
(si je puis me permettre, votre anonymat est en péril: le lien que vous donnez vers les Nouvelles Calédoniennes permet de tomber assez facilement sur une belle photo de vous, accompagnée de votre nom )
Il y a une assez jolie chose qui se passe avec mon anonymat : beaucoup de personnes connaissent maintenant mon vrai nom (je savais que poster sur l'affaire du Rocher engendrerait ça, mais comment ne pas en parler..!), mais tout le monde fait comme si on ne le savait pas : ce blog est définitivement un espace de rencontre de gentils !
Quelle force !
J'ai rarement été aussi émue par un post...
MERCI !
Je vous félicite, et vous encourage à continuer !
BRAVO !