Elle s’appelle Sandrine, pas question de ne pas dire son vrai prénom. C’est une de mes rares vraies amies filles, je veux dire par là sans aucune arrière-pensée, juste amis pour de bon, comme avec mes amis mecs.
Il faut dire qu’avoir la chance de la rencontrer et ne pas devenir son ami serait une ineptie : elle a tout. Elle est belle, elle est drôle (et quand elle rit de bon cœur, ce qui lui arrive souvent, elle guérit deux mille dépressifs d’un seul coup), elle est intelligente, elle est généreuse, et ce qui la caractérise le plus à mes yeux est son absolue gentillesse : je ne sais pas si vous connaissez autour de vous une seule personne que vous n’avez jamais entendue dire de mal de quelqu’un, jamais entendue se plaindre non plus ? Moi oui, grâce à elle.
Elle a même fini par rencontrer le bonhomme lui aussi parfait, lui aussi un ami, David, qui lui ressemble tellement, même si lui est un colosse au crâne rasé qui ressemble aussi à Monsieur Propre – je l’ai vite surnommé comme ça et c’est resté, ça la met en joie et ça lui donne un prétexte pour lui faire un bisou consolateur quand je le chambre avec ça.
Oh, au tout début, inutile de le nier, je l’ai d’abord aimée pour son physique – j’étais jeune avocat, je croisais souvent une bombasse pleine de sourires pleins de belles dents dans l’immeuble qui abritait mon cabinet, faut pas déconner non plus, je les lui rendais ses sourires, hein, on n’est pas de bois.
Elle était secrétaire dans un autre cabinet, d’avocates, en-dessous du mien. La mienne, devenue aussi amie avec elle (je vous dis, impossible de faire autrement), avait convenu avec elle d’un tour de rôle dans le ramassage du courrier pour aller le déposer à la Poste, et c’est à travers ce petit rituel de 17 h, au détour de l’offre d’un thé ou d’un café, qu’on a commencé à se fréquenter – ça m’a toujours gonflé de porter le courrier, mais quand c’était son tour et qu’il fallait lui apporter le nôtre, curieusement je montais facilement à la place de ma secrétaire, que ça faisait sourire…
Cinq minutes avant, rapidement, pour qu’on puisse papoter en buvant un café.
C’est inexplicable comme ça, vu mon charme incroyable1 et sa parfaite joliesse, mais je pense qu’on a assez vite compris qu’il ne se passerait jamais rien d’amoureux entre nous – il faut dire qu’elle avait un mec à l’époque, le seul avant David je crois, et qu’elle était aussi du genre fidèle, honnête et voulant une vraie Histoire d’Amour, pas une coucherie provisoire – et moi à l’époque je… Bon, bref, elle avait compris que je ne serais pas ça. Ça nous a vite fait rire encore plus, du coup, que tout l’immeuble jase de nos petits rendez-vous – j’étais flatté à mort pour ma part, je ne démentais jamais, faut pas déconner…
Bref, la vie est ainsi faite qu’on est devenus de vrais amis, intimes et durables, c’est comme ça que ça avait commencé, je voulais m’en souvenir, là, maintenant.
Je voulais vous parler d’elle…
Je veux te parler, ma puce.
On en a fait des conneries, hein ma belle ? On a ri aux larmes des tas de fois, rien que pour ça tu mérites le Paradis…
Tu te souviens de la façon dont tu m’as présenté David, dis ?
Trois heures du matin, vous étiez torchés, bon restau en ville et boîte derrière je crois, et vous avez vu de la lumière aux fenêtres de ma baraque, en passant, et tu t’es dit “pourquoi pas”, sans savoir que ton coup de sonnette allait ruiner les heures de tentative de séduction que je venais de passer avec une jeune dame, alors assise à mes côtés et résistant encore… Et tu as débarqué – lui ne voulait pas, pas aussi fou que toi, je ne l’avais jamais vu ! Mais toi oui, et tu avais bien fait – si ça se trouve la belle m’aurait dit non de toute façon, et quelle fin de soirée hein ? Sauf ce moment où, quelques heures plus tard et après je pense deux ou trois bouteilles de plus, tu as soudain voulu nous prouver que tu pouvais parfaitement faire le cochon pendu à l’une de mes fenêtres, et que tout à coup nous n’avons plus vu que tes semelles, vu que le reste de ton corps se balançait à l’extérieur, dans le vide… Il a couru plus vite que moi, toi tu riais comme une folle, lui était déjà amoureux comme je l’ai rarement vu, et il t’a ramenée chez moi d’un seul coup de bras puissant, mais il tremblait après – et toi tu riais, parce que je crois que tu étais très heureuse et que tu avais voulu son sauvetage…
Enfin, on a rebu un coup quand même – mais cette fois j’avais fermé les fenêtres, quand même aussi (et la jeune femme était partie, en se disant sans doute qu’elle n’avait rien à faire dans un asile, merci encore hein…)
Vingt ans qu’on se connaît, dis, c’est pas rien…
Lorsque j’ai monté mon deuxième cabinet, mon associé cherchait une secrétaire, alors évidemment je lui ai parlé de toi, et tu as eu envie de quitter ton boulot pour nous, et tu es venue ; je ne m’étais pas posé la question de savoir ce que ça ferait de travailler avec toi, si ça pourrait nous gêner ou pas, et j’avais bien fait, ça s’est mis en place si naturellement, tout de suite – personne, parmi les trois employeurs que je t’ai connus, n’a jamais mis en cause une seule fois ta compétence professionnelle, t’amenant parfois (souvent !) à être plus exigeante que l’avocat pour qui tu bossais – encore une qualité, je sais bien, mais tu peux rougir tant que tu veux, c’est un fait – je sais que tu reçois les compliments avec bonheur mais que tu ne les crois jamais vraiment, je peux bien te le dire : tu as tort, dans ton cas personne n’a jamais eu besoin de faire semblant.
Et puis avec toi, avec moi, avec ma secrétaire adorée, avec bientôt les deux collaborateurs qui nous avaient rejoint, le cabinet grandissant, ceux que tu surnommais et allais surnommer à vie “les bébés”, on partageait une philosophie de travail assez simple : être sérieux ne veut pas dire se prendre au sérieux, bosser sérieusement n’exclut jamais les fous-rires…
Il y en a eu, hein, un peu..? Tous les jours, tu dis ? Oui, maintenant que j’y réfléchis… Tu te souviens de la fameuse bataille d’eau, dis ? Je savais que vous rentriez à peu près tous en même temps de la pause déjeuner, pour une fois je n’avais pas pu venir, je vous guettais plus ou moins à la fenêtre du coup, armé du seau d’eau de la femme de ménage (encore une amie si je ne m’abuse, Dalila ?) rempli à ras bord… Oui c’est très con, mais j’ai encore mal au bide de rire en pensant à toi et Aurélien trempés en bas, totalement sidérés – et à votre revanche, une fois montés, qui m’avait obligé à me retrancher dans les chiottes devant la porte desquels vous étiez tous embusqués avec vos récipients… Il a bien fallu que je sorte, vous aviez juste oublié que dans les toilettes il y a aussi l’eau courante : j’ai ouvert, on s’est regardé, et on s’est balancé notre flotte à bout portant, en pleine tronche, en pleurant de rire comme deux gamins, puis ça a dégénéré en bagarre individuelle générale – Jeanne, acculée contre le mur du fond, qu’on a finalement trempée à deux, le mur qui en a gardé la trace des années…
J’ai reçu mes clients en chemise mouillée ce jour-là, tu me faisais tes sourires à la con à chaque rendez-vous…
Je garde de ces années-là non seulement un sourire qui fait chaud, mais encore la certitude qu’on est passé tout près du cabinet idéal, même si la vie a fait qu’il n’est pas resté, celui où les gens nous aimaient parce qu’on était bons et travailleurs, bien sûr, mais pas seulement ; parce qu’on prenait du vrai plaisir à tout, aussi – j’en ai reparlé aux bébés récemment, logique : ils ont les mêmes regrets doux…
Et cette fois où ta mère, greffière au Palais, qui avait exactement la même voix que toi au téléphone ce que j’ignorais, m’a appelé avec ton portable car tu étais souffrante ? Oui, j’ai décroché en disant “Salut grosse vache !”, oui tu aurais répondu “Salut grand con” et non pas comme ta maman “Euh… Je suis la mère de Sandrine…”, et oui, ça te mettait en joie de savoir que je m’étais senti très mal par la suite – ta mère aussi d’ailleurs, elle n’a jamais manqué de me le rappeler dans son bureau…
La vie a filé, tu es partie ailleurs (quand tu me l’as annoncé, tu te souviens, on était à un mariage et passablement saouls, j’ai pleuré, tu étais toute désolée, on a fini par sourire…), j’ai quitté le cabinet pour fonder l’actuel, tout ça – mais on a toujours continué à se voir, avec David et ma femme qui t’adorait aussi, évidemment ; à faire des soirées ensemble, surtout celles l’un chez l’autre, les anniversaires notamment – énormes… Et puis les travaux, aussi. On a acheté nos lofts en même temps, et des deux côtés il y avait du boulot, on en a passé quelques-uns de week-ends “perforateur-champagne”, hein ? Douze heures non-stop pour les chambres des enfants, parce que mes beaux-parents venaient à Noël et qu’il fallait terminer : à chaque fois que j’y vais, tous les jours donc, je regarde les voutins en briques à 4 mètres de haut et je revois David sacquant dedans en tenant le perfo d’onze kilos d’une seule main, et toi avec la perche et le rouleau de blanc t’escrimant comme une dingue sur ces briques blanches, le tout dans un nuage de poussière, d’odeurs de peinture et de vapeurs de Ruinart… On a fini à temps pour que je puisse recevoir ma famille, mais on ne tenait plus debout…
Vous couvriez nos enfants, arrivés entre-temps, de cadeaux, ils vous attendaient comme le Messie – et avec David on avait eu depuis plusieurs années l’idée de se challenger, comme disent les précieux, sur nos cadeaux à nous, les plus énormes, les plus chers, les plus beaux – ça vous faisait râler gentiment, nos conjointes, on en rajoutait d’autant plus…
Cette autre fois-là, c’était les sabres laser, plus vrais que nature, des trucs de collection qui valaient une fortune… Ta tête vers trois heures quand les petits, réveillés par nos hurlements, ont fait irruption dans le salon alors que tu venais de basculer au-dessus du canapé en repoussant nos attaques de sabres, au milieu des éclairs rouges et bleus – et des cadavres de bouteilles, un peu aussi, faut dire…
Je crois que c’est cette fois-là qu’on fêtait ta rémission ?
Oui, ça me revient maintenant, pour une raison évidente d’ailleurs : au départ tu n’avais pas voulu venir, parce que tu étais chauve comme un œuf, résultat de la toute dernière chimio, tes cheveux avaient mis plus de temps à repousser que les fois précédentes, tu avais peur de faire peur aux enfants ! On t’avait convaincue quand même et comme on avait eu raison, d’abord parce que c’était une des meilleures soirées qu’on ait passées à quatre, on “niquait le cancer” tous les quarts d’heure, tu te souviens ? Ensuite parce que, c’est incroyable à dire vu ton immense féminité, mais tu étais toujours aussi parfaitement belle sans cheveux ! Je suppose que la nature, qui avait aussi permis que tu développes cette merde, t’avait en prévision dotée d’un crâne parfait… On dit ça ? Oui, on va lui donner cette petite excuse-là…
Tu avais lutté un an et demi, tu en avais chié comme une perdue, malgré une peur terrible que David lui aussi avait tant peiné, parfois, à endiguer, mais tu avais gagné, la vie était belle finalement, d’autant que malgré l’opération tu avais pu préserver l’intégrité de ton corps…
Ça a duré combien ? Une bonne année, presque deux, non ? Mes souvenirs de cette période sont un peu flous, je sais que tout était reparti comme avant, ton incroyable joie de vivre y compris – malgré les contrôles très fréquents auxquels tu étais astreinte, malgré la peur à chaque fois dont tu disais avec humour qu’au moins à chaque fois tu appréciais le soulagement, malgré les médicaments désormais intégrés à ta vie – que tu entendais bien vivre à fond plus que jamais avec Monsieur Propre, je le sais, c’était un tel soulagement – si je ne me trompe pas vous commenciez à parler doucement de savoir à quoi ressemblerait un petit être vivant qui serait un savant mélange de La Belle et La Bête…
C’est là que se situe ta soirée d’anniversaire que je n’ai jamais vue, celle où j’étais arrivé un peu tôt pour aider et où David avait eu la somptueuse idée d’ouvrir un magnum rien que pour nous deux “en attendant”, de sorte que lors de l’arrivée des autres j’étais déjà à moitié aveugle ? Ou bien celle où j’ai défié David, autre surnom Musclor, au vélo d’appartement, vers six heures du matin, comme un abruti, alors qu’on t’avait offert ce soir-là un punching-ball géant, un certain “Black Mamba” je m’en souviens, et qu’on s’était tous éclaté les mains en tapant dessus pour le faire tomber, ce qui était impossible..? Je ne sais plus, je les mélange toutes un peu : à chaque fois c’était si bon, de t’entendre rire et de rire avec toi…
Ou la mienne où on a trinqué un peu trop fort, ta coupette t’a explosé dans l’œil et où avec David, dessaoulé aussi vite que moi, on t’a bloqué la paupière et emmenée fissa à la salle de bain pour t’enlever tous les petits bouts de verre en t’empêchant de cligner… La trouille a été telle ce soir-là qu’on a tous les deux fait un malaise lui et moi après, merde, c’est un don chez toi de faire peur à ceux qui t’aiment, des fois, hein..?
Quand la cochonnerie est revenue la deuxième fois, tu n’avais pas eu le courage d’appeler pour le dire, toute à ton désespoir, c’est David qui m’a appelé. Il était très malheureux lui aussi, vous aviez cru en être quittes, tous les deux, mais on dirait souvent que la gentillesse absolue est un tel cadeau qu’il faut payer le prix fort…
Tu t’es battue à nouveau, plus durement encore cette fois mais d’abord c’était une récidive, le mot est lourd de sens, ensuite tu ne pourrais pas préserver ton corps, on te l’a dit très vite – par précaution cette fois on “taillerait large”, histoire de ne rien laisser de noir en toi…
Tu as à nouveau gagné, mais on s’était un peu moins vus tout de même, tu ne voulais tellement pas paraître diminuée devant tes proches, petite orgueilleuse, c’était devenu plus compliqué de rire ensemble, tu étais aussi beaucoup plus fatiguée que la première fois, les traitements, tous, étaient nettement plus lourds, tu étais souvent épuisée, trop pour accepter les propositions de rencontre des veinards inconscients et égoïstes qui voulaient encore profiter de toi, pas toutes en tout cas…
David nous demandait de te maintenir le moral alors au téléphone, je continuais à déconner comme avant, à ne jamais manquer par exemple de te reprocher de creuser le trou de la Sécu, ou bien si ça ne t’ennuyait pas trop d’aller chez tes parents désormais retraités loin dans le Sud, au soleil, pendant qu’on se crevait au boulot… Tu riais souvent, on parlait beaucoup plus sérieusement souvent, tu parlais de tes peurs et de ton immense lassitude, je t’encourageais, je me disais persuadé que cette fois tu avais tué ton cancer, comme d’autres y étaient parvenus – et cette fois on y a tous bien cru, il y a quoi, quatre ans ? Vous avez de nouveau vécu une année heureuse, presque normale, avec David, je me souviens d’un voyage à Barcelone qui t’avait émerveillée, de ton rire revenu avec tes cheveux, que tu portais plus courts désormais – “moins de boulot de coupe si ça recommençait”, disais-tu, tu étais comme ça ma belle, je le sais, en tapant ces mots je t’entends et tu es là.
C’est revenu encore.
C’est revenu encore et cette fois encore plus gravement, à plein de titres. Ça s’était un peu généralisé, tu avais mal, il fallait désormais alterner des soins intenses, un peu de “repos”, puis repartir encore… Tu as fait le choix d’aller vivre chez tes parents, qui étaient prêts à être à tes côtés en permanence, Madame la fille unique gâtée-pourrie – aussi parce que tu ne pouvais désormais, par moments en tout cas, plus rester seule dans la journée, David travaillant bien sûr et devant lui rester à Lille pour des raisons familiales.
Tu es partie là-bas.
Et je te disais que ce retour de la maladie était plus grave à beaucoup de titres parce que ça a aussi compliqué toute éventuelle rencontre, tant c’était loin – oh, Sandrine, je ne vais surtout pas me plaindre ici, ce serait indécent, tu m’engueulerais et tu aurais raison, mais je m’en veux vraiment de ne pas y être allé, vingt fois on se l’est dit mais on s’est laissé faire par les contraintes, les enfants, les horaires, le boulot, tes propres souhaits aussi quand tu nous disais que non, pas en ce moment, trop fatiguée trop mal… Bien sûr qu’on aurait dû venir depuis longtemps, bien sûr que tout le reste était de la couille en barre, mais voilà, on est con jusqu’à ce que la vie nous le mette sous le nez, parfois…
Moi ou ma chérie on t’appelait, on s’envoyait des messages, je voyais un peu David qui nous tenait au courant – ces derniers mois, tu ne répondais plus beaucoup d’ailleurs, hein ? On trouvait le moyen de se dire que tu ne devais pas avoir envie, pauvres de nous ! J’ai su depuis par ta mère que tu n’arrivais plus depuis longtemps à taper correctement un SMS, et aussi que tu n’avais aucune envie qu’on te voie alitée et intubée à l’hosto, ou avec la peau qui partait tant les dernières chimios étaient devenues intenses… J’ai su depuis par David que vous aviez réussi à passer encore quelques jours au soleil cet été mais qu’il devait te porter à la piscine quand tu parvenais à avoir envie d’y être, si faible…
Je suis une merde. Je n’ai rien mesuré, et comme en fait je ne suis pas si idiot en principe, je crois que je n’ai pas voulu me confronter à ça, et que c’était commode d’avoir des contraintes, au fond… Mais ça on ne se le dit qu’après, n’est-ce pas..? Je vivrai avec le profond regret de n’être pas venu, au moins une fois, quand tu étais sur pieds et parlais encore, pour rire, encore et toujours, avec toi ; et toi, je te connais, tu m’excuseras, tu me diras sûrement que tu étais la première à m’en dissuader, ce qui est vrai mais que nous savons tous deux être en fait parfaitement faux. Je t’autorise tout à fait, pour une fois, à ne pas être gentille… Tu souffrais, et je n’ai pas fait cet effort, n’en parlons plus ou je vais me gifler.
Lundi, Anne, une autre amie commune, laisse un message sur mon téléphone, mais David m’avait prévenu deux jours plus tôt que ça n’allait pas bien, que tu avais dû pour la xiéme fois quitter la maison de tes parents pour être hospitalisée dans une clinique toute proche, n’étant plus soignable et ne pouvant surtout plus être soulagée de tes douleurs à domicile.
Il m’avait dit aussi, en larmes, que tes médecins lui avaient balancé que tu allais mourir, ils ne savaient pas quand, mais sans rémission possible désormais. Ton colosse vacillait, mais m’expliquait encore qu’il fallait tenir bon, pour toi, qu’à toi ils ne t’avaient rien dit, que toi tu pouvais et devais encore y croire, qu’au moins on te laisse ça… Je n’ai pas trouvé beaucoup de mots pour l’aider à se tenir encore debout… Il fonçait en tout cas vers toi séance tenante, en bagnole comme d’habitude, enquillant ses dix heures de conduite de nuit pour te retrouver au réveil – il me tiendrait informé dès que possible…
Le message me dit que ta mère a appelé Anne pour qu’elle batte le rappel des très proches, de “ceux que Sand’ aime vraiment”, et Anne me dit que ta mère ne l’a pas exprimé comme ça mais qu’elle avait l’air de dire qu’il ne te restait pas beaucoup de temps – qu’il ne nous restait, à tous, pas beaucoup de temps. Cet appel de ta mère, Sand’, a été l’un des plus beaux cadeaux de ma vie.
Cette fois on ne tergiverse plus, on n’y pense même plus, merci la Raison revenue. On s’organise, on fait renvoyer des audiences ou mon adorable collaboratrice les prendra comme elle pourra, ON S’EN FOUT, enfin ; on trouve un vol, une bagnole à louer et un hôtel, mes parents viendront garder les gosses, je viens te voir avec ma femme, ton amie aussi, en même temps que deux autres copines et Anne et son mec mais on ne se demande pas quel signal ça t’enverra si jamais tu parviens à nous voir, tant pis. On veut te voir. On veut que tu nous voies.
J’ai David, on vient jeudi, il me confirme que c’est la fin, même s’il n’y croit pas une seconde ; il pleure, il m’explique que soudain tu ne parles plus, que tu es sous machine et sédatée jusqu’à l’os, te “réveillant” parfois mais à peine, il trouve encore la noblesse de me dire qu’il ne sait même pas si tu auras conscience de notre venue et que même peut-être, comme on n’a pas pu se démerder pour être là avant jeudi…
Je l’insulte tendrement et je marmonne un truc pour dire que mes bras sont grands ouverts pour deux, mais que si ça doit n’être qu’un à y serrer, je serrerai plus fort. On se voit jeudi, tiens le coup d’ici-là mon frère, ce serait trop…
Jeudi, après tout le cirque rituel bagnole avion j’arrive enfin à garer la voiture de location pas loin de la clinique – les autres en ont une autre mais ne sont pas encore là, on saura tout à l’heure qu’ils se sont trompés et cherchent la chambre de Sandrine dans l’autre hôpital de la ville… Depuis tôt ce matin, on n’échange pas trop avec Madame Mô, non, la journée est grave, on le sait, chacun repense aux bons moments et se demande comment il va te trouver, comment tu vas être, si seulement, putain de merde, si seulement tu es encore vivante, il faut bien la dire cette horreur d’hypothèse – mais on n’en parle pas à voix haute, quand on a peur on devient superstitieux.
On se paume un peu mais on finit par trouver le bon bâtiment ; ma chère et tendre m’a dissuadé de venir avec des fleurs, elle a bien fait, on vient avec rien du tout et pour une fois c’est bien comme ça. On trouve la porte de la chambre, on se regarde, je souffle, les larmes me viennent déjà rien que d’être dans un de ces maudits couloirs d’un de ces maudits bâtiments, ma femme fronce le sourcil : on s’est bien dit, on n’est pas des cons, que si on avait la chance que “notre” Sandrine soit consciente, pas question d’être tristes, pas question de pleurer, on ne vient pas ajouter à tes peurs et ta douleur, on vient joyeusement revivre un bon moment, encore, avec toi…
Je frappe, on entre, j’ai un premier choc. Sandrine est allongée dans un lit d’hôpital, une grosse machine à côté qui tourne sans bruit, il y a là, au fond, c’est une grande chambre, ses parents, qui sourient en nous voyant mais dont l’appréhension est palpable, et David, qui lui sourit franco, et son fils, et leur meilleur copain, que j’ai souvent vu en soirée. Ses parents ont peur et pas seulement pour la vie de leur fille, ils ont peur parce qu’elle ne sait “officiellement” pas qu’elle va mourir bientôt, qu’ils ne savent ni si elle l’a compris – elle ne parle plus, ni si nous voir ne va pas la choquer terriblement, en mal, lui faire comprendre que c’est la fin – ils ont pris ce risque pour nous permettre de la revoir et à elle de nous revoir, je ne leur en serai jamais assez reconnaissant…
Mais ce qui me frappe, alors que Sandrine semble dormir, c’est que mon imaginaire l’avait pensée décharnée, amaigrie au moins, ou bien livide, bref, modifiée, je pensais comme un con ignorant qu’à un tel stade au moins, son cancer se voyait – et non. Rien. Bien sûr elle est chauve, sa dernière chimio était si épuisante que pour ses parents c’est elle qui l’a conduite directement ici ; et elle a un tube fin dans le nez ; mais son visage est toujours exactement le même, son teint aussi, elle est même un tout petit peu maquillée, j’ai juste l’impression fugitive que ses doigts sont un peu plus fins, mais sinon on dirait vraiment qu’elle dort, belle comme d’habitude, et même en paix… J’en reste stupéfait, même si je ne le montre pas trop je crois.
Je fais des sourires à ses plus proches en même temps que des bises, sa mère m’embrasse longuement et me remercie d’être venu, on parle tous à voix basse mais presque normalement, je demande des nouvelles, des explications, j’ai même brillamment osé un “ça va ?” à son père, que je connais moins, mais oui espèce de gros connard ces gens sont en train de veiller et de perdre leur fille unique deux semaines après ses quarante-quatre ans et l’amour de sa vie est en train de lui humecter les lèvres pendant qu’elle est inconsciente, elle va mourir et personne ne peut rien faire d’autre que de souhaiter qu’elle ne souffre pas, mais sinon ils vont tous très bien…
Je me retourne encore, je regarde Sandrine, et, comme eux je suppose en fait, je n’y crois pas, c’est impossible, elle ne va pas partir en fait, elle peut encore guérir. Mais je sais que non, c’est juste que c’est incroyable, au sens propre.
Sa maman et David m’expliquent, pendant qu’elle “dort” encore, mais que des petits signes deviennent progressivement plus fréquents, un bras qui tressaute, une paupière qui cligne : elle est sous un traitement lourd géré par la machine pour qu’elle ne souffre pas, mais qui du coup la rend presque constamment inconsciente ; ils ont pris la décision, en accord avec les médecins, de couper la machine aujourd’hui, il y a une bonne heure déjà, pour autant de temps que Sandrine tiendra si ça marche et qu’elle reprend conscience, pour justement qu’elle soit consciente, qu’elle ouvre les yeux et puisse nous voir, qu’elle puisse nous entendre… Ah mes putains de larmes reviennent à la charge en entendant cela, forcément… Sa mère m’explique qu’il faut du temps pour qu’elle sorte du coma, et qu’elle ne devrait pas souffrir à nouveau tout de suite, les produits massivement injectés en elle mettront du temps à se barrer et encore ce matin elle savait manifester sa douleur, en plissant le front…
Alors on attend, en parlant aussi de plein d’autres choses, j’essaie de faire le clown, par exemple sa maman me dit que mon épouse, qu’elle ne connaissait pas, est très belle, ce qui est vrai, je lui réponds que je n’allais pas non plus choisir de la merde, ahahah, elle fait semblant de s’offusquer, on échange tous comme on peut, en réalité je pense tous un peu effarés d’être là de cette façon – et pendant ces bêtises Sandrine bouge de plus en plus, elle vient manifestement doucement à nous – il va encore falloir une heure environ…
Puis elle ouvre les yeux, le colosse qui lui sert d’amoureux est le premier qu’elle voit, un temps déguisé en fabricant de porcelaine quand il lui demande à l’oreille si elle veut de l’eau, puis pour lui tenir le verre au bord des lèvres…
Elle est encore sonnée, on le voit, elle referme souvent les yeux et son regard roule un peu, c’est la morphine, mais elle arrive souvent à surnager, je me demanderai après au prix de quels efforts mais pas pour l’instant, pour l’instant sa tête pivote lentement sur l’oreiller parce qu’elle a perçu qu’il y a d’autres gens que tout à l’heure, et son regard arrive sur moi, qui me tiens à deux mètres comme un moine, un sourire figé sur la gueule pour dire de, et elle me voit – et son visage s’anime et une expression hyper violente d’incrédulité totale s’y affiche, elle s’est presque redressée, grands yeux, bouche ouverte, là tant pis mes larmes coulent et je lui dis que ben oui c’est moi je suis là, tant pis pour elle il va falloir me subir, on a vu de la lumière on est venu, putain fais pas cette tête on dirait que tu me détestes… Et en même temps, je souris sans rien faire pour cette fois, juste parce que la stupeur passée, elle aussi l’a esquissé, son joli sourire – à moitié seulement et elle est retombée lourdement sur l’oreiller en fermant les yeux, épuisée je pense ; mais je n’ai pas rêvé la scène, je me tourne vers tout le monde et oui, elle s’est bien passée, je le vois dans tous les yeux…
J’ai cette image, celle de son visage à cet instant, en moi, constamment, depuis.
On a pu se voir, on s’est souri. Elle était contente. Je suis tellement heureux d’être venu…
Les autres sont arrivés ensuite, nous ont fait rire avec leur histoire de mauvais hôpital, Sandrine est revenue à la conscience des dizaines de fois pendant les trois heures qui ont suivi, on lui parlait, on riait, on s’est remémoré chacun devant elle les scènes dont je vous parlais tout à l’heure, et bien d’autres encore, chacun avait les siennes ; elle surnageait, ouvrait les yeux, nous regardait tour à tour, réclamait souvent de l’eau que David prenait un soin infini à lui donner, presque goutte par goutte ; il y avait des silences, aussi, on était tous profondément émus, plein de regards, chacun à un moment a aidé à la redresser un peu ou lui a pris la main, elle serrait si faiblement qu’il fallait demander à sa propre peau d’ouvrir des connections anormales pour le sentir, mais elle essayait – au prix de quels efforts, avec quelles pensées terribles de nous voir tous là en même temps… J’espère, je crois, qu’on ne lui a pas laissé le temps ni l’énergie de trop y penser…
On est descendus fumer, les garçons, à un moment, on a essayé de maintenir le colosse debout, lui qui l’était depuis si longtemps sans nous, enculés que nous sommes…
On a beaucoup parlé avec ses parents, dehors aussi, puis on est revenus, on lui a un peu raconté nos enfants – y avait pas trois mois qu’elle nous demandait encore une photo…
Elle entendait ou écoutait avec plus de difficultés, se tortillait un peu plus dans son lit, la douleur revenait lentement je pense, elle avait du mal à respirer, et vingt fois elle a essayé, levant très lentement un bras pour ramener ses doigts dessus, de virer son tube nasal – qu’à chaque fois David ou l’un de ses parents lui replaçait tout doucement, non ça il ne faut pas, tu en as besoin… On a décidé d’un regard qu’il fallait repartir, il faisait nuit maintenant et il était hors de question d’attendre encore pour que la machine qui la soulageait recommence à le faire…
On lui a posé les lèvres sur le visage, chacun notre tour, on a mis du temps, j’ai pris David dans mes bras, il allait prendre la suite de sa belle-mère en dormant là, au chevet de sa belle, mais forcément si seul… Mais le roc disait au gravillon que je me suis senti être que ça allait aller, qu’il fallait filer…
J’étais presque dehors qu’il m’a rappelé, par mon prénom, un peu fort ; je me suis retourné et j’ai vu Sandrine qui me regardait et soutenait l’un de ses bras avec l’autre, un effort surhumain je pense, juste pour faire ce petit signe qu’on connaît tous, ce bye-bye avec la main qui salue doucement de haut en bas, pour dire au revoir… Je lui ai rendu, cette fois j’étais au bout de mes sourires de commande, mais j’ai eu le temps de voir le sien, de sourire : il y était, déjà ; et il était sincère, je le sais ; et il était triste, je suis certain qu’elle avait compris qu’on ne se reverrait pas, et peut-être même, misère, qu’elle avait peur, mais à cet instant-là je n’ai pas lu de peur sur son visage : ce sourire, malgré tout, il était aussi un peu heureux, je vous assure que c’est vrai.
Et comme moi je ne suis qu’un homme pas très courageux, je me suis retourné et je suis vite sorti, et on est vite descendus avec des gens tristes ou gais dans un grand ascenseur, des vieux et des petits-enfants, je ne sais plus trop, on est sortis de cet immeuble et j’ai chialé enfin toutes les larmes de mon corps comme jamais, tourné vers un buisson qui lui ne me regardait pas.
Ainsi s’est-on revus, finalement, Sand’. Tu étais incroyable, et de ce jeudi qui devait être si sombre, je ne retiens pourtant que ta lumière, celle qui m’a rempli du sentiment violent d’être à ma place, d’être là où ta mère, avec laquelle tu étais si fusionnelle, avait parfaitement compris qu’on devait tous être, que tu le souhaitais certainement…
Avais-tu conscience que, malgré ton immense fatigue, malgré cette usure qui te rongeait du dedans, à plusieurs reprises tu as péniblement remonté un bras vers l’échancrure de ton pull, pour le remonter un peu parce qu’il te dégageait légèrement l’épaule ? De la pudeur, à ce moment-là, j’ai peine à y croire – mais on l’a tous vu, je peux te le dire maintenant on s’est regardés en souriant, genre “on ne la changera pas”… Et je crois que pour nous ça signifiait surtout que tu savais parfaitement qu’on était vraiment devant toi…
David m’a prévenu de ta mort, trois jours plus tard, dans ses bras. Il m’a dit qu’ils avaient remis la machine en route après notre départ et que tu n’étais plus vraiment sortie ensuite de cette inconscience qu’elle te fabriquait…
Je suis revenu pour ton enterrement, dans ce qui est je pense devenu ton village, là-bas loin au Sud – pas pour toi ni pour moi cette fois, pour les tiens, pour pleurer avec eux ; il y avait les bébés, ces deux jeunes avocats que tu avais vus grandir et qui t’aimaient tant, eux aussi…
Tu as vu ? Cette fois j’ai eu beau faire le con, au fond de l’église (tu m’as entendu dire aux petits que l’organiste féminine aveugle qui était là était le sosie de Gilbert Montagné ? Si tu avais été là je me serais pris un coup de coude dans les côtes, pour le manque de respect…), rien n’y a fait, on pleurait tous, pas moyen de s’arrêter…
J’y suis allé pour soutenir David et tes parents, mais toi tu t’en foutais cette fois, puisque tu es morte.
Comment une femme comme toi peut mourir, aussi injustement, comment concevoir que la vie t’ait forcée avant à tant de combats, à tant de peine..? J’ai envie de m’excuser pour elle, Sandrine, de te demander pardon tant c’est forcément une erreur…
Je ne crois, tu le sais, ni au Paradis ni à l’Enfer, je crois qu’il n’y a rien après la mort et que nous retournons juste à la poussière, c’est tout, et que c’est même pour ça qu’il faut se presser de vivre, de rire, de chanter, de voir, d’honorer ses amis et de les prendre dans ses bras…
Pourtant, cette scène, te revoir si vivante, si ressemblante à ce que tu étais, te voir vaincre ta faiblesse juste pour nous, pour parvenir à nous vivre ce jour-là… Je n’oublierai jamais.
Et du coup…
Oh, tu n’es assise à la droite d’aucun dieu, tu n’existes plus dans aucun prétendu royaume. Sauf en nous. Je me dis que si tu avais si totalement disparu, ton visage ne me sauterait pas aux yeux à l’instant, je n’esquisserais pas un sourire en visualisant le tien et en entendant ta voix, je ne pourrais pas revoir en boucle ton total étonnement en me voyant, cette tête que tu as eue qui nous aurait tant fait marrer autrement…
La vérité est que oui, par ta magie et la grâce de cette journée incroyable qui m’a totalement retourné les tripes et l’âme, oui, bien sûr, tu es vivante en moi – comment pourrais-je t’écrire, sinon ? Je sais déjà que de temps à autres on se parlera, que je verrai tel ou tel épisode de ma vie avec tes yeux à toi, en me demandant ce que tu en aurais pensé – et peut-être bien que tu me le diras…
Ton Paradis existe et tu y es, heureuse, à l’intérieur de David, de ta mère, de ton père, de tes amis, de moi. Oui je le sais, que tu es heureuse, arrête de nous faire pleurer, imbécile : je viens encore de te voir sourire.
Alors… A bientôt, ma puce. Forcément.
- Laissez, c’est pour moi… [↩]
J’ai repensé à ce texte, qui m’avait ému aux larmes lorsqu’il était paru. Je l’ai relu, avec encore plus d’émotion.
Désolée de ne pas avoir été là à temps. À bientôt Me Mô.
La première fois, il m'a eu par surprise. En fait, pas tout à fait : la première phrase est claire sur la conclusion du récit, mais je ne voulais pas y croire, alors je me suis forcé à l'oublier. Et puis la réalité s'est imposé à moi: la vie est courte, la vie est cruelle, et il faut en profiter avec de vrais amis pendant que c'est possible.
Désormais quand je viens, je sais à quoi m'attendre. Je sais que je finirai en larmes, comme un con, seul devant mon ordinateur. Mais c'est sincèrement la plus belle chose que j'ai jamais lu sur internet. Alors j'y reviens, et ça me donne de la force.
Aujourd'hui pourtant, je pleure pour une autre raison. L'auteur de ces lignes a rejoint Sandrine, et me revoilà, à chialer seul devant mon écran, à penser que c'est injuste et que la vie est une garce. Et malgré tout, relire ce témoignage d'amour absolu me réconforte. Alors merci, Maître Mô, merci profondément pour ce récit et pour tous les autres, merci pour ces lignes qui respirent l'humanité.
Je continuerai à venir relire ces lignes, en souvenir de Sandrine, et en souvenir de toi.
Forcément.
J'ai été si rapidement happée par ce texte, tant je l'ai trouvé imagé et vivant. En passant du rire aux larmes, en s'imaginant les scènes, en laissant libre cours à mon esprit pour représenter les visages, les lieux... Les différentes émotions filtrent au travers des mots. C'est une façon magnifique d'immortaliser une tranche de vie, que de l'écrire.
Nous, parfaits étrangers, vivons cela par procuration, au travers de vos publications. Ce fut ainsi pour moi, en tout cas !
Je ne découvre ce site qu'aujourd'hui, mais laisser un petit mot me semblait important. Votre style d'écriture a une résonance particulière, et ce blog risque de devenir mon livre de chevet jusqu'au dernier article !
Ps : j’écris cela ce jour après que j’ai appris que le texte d’Antoine Leiris précité a été adapté au théâtre => à quand pour vos textes maître ?
Je suis toujours très touché quand les "anciens" passent (encore...) ici ; merci de ce mot...
Ne regrettez pas encore trop ce blog : il n'est pas mort, je l'ai refait à neuf, il doit y avoir une raison - et vous en trouverez 137 (!) dans le petit encart "Môs à venir" dans la colonne de droite de la page d'accueil...
Quant au théâtre, ma foi, sur le principe pourquoi pas, par exemple une pièce reprenant le huis-clos formidable que pourrait être "Au guet-apens" serait géniale (cette nouvelle-là a bien failli devenir un film...) ; mais pas ce texte. Si un jour vous le voyez dit sur une scène, c'est que j'y serai monté - moi et personne d'autre, pour le coup...
Tenez bon : plusieurs des brouillons dont je parlais plus haut sont très avancés, je vais bien finir par arriver à les terminer...
J’ai tout lu, alors que je passe peu de temps sur Twitter d’habitude.
Je suis un de vos Confrères mais aussi voire surtout un homme qui a aussi vécu « ça ». Il s’appelait Arnaud. Avait lui aussi 42 ans quand il est mort d’un cancer après avoir entendu un an plus tôt du cancérologue qui le suivait « qu’au moins il ne mourrait pas de ça ». Il n’avait pas de femme ni d’enfants. Ses parents et nous, c’est tout. Nous, c’est une bande d’amis de toujours qui l’avons veillé jour et nuit les deux dernières semaines. Deux semaines au cours desquelles nous sommes constamment passés du rire aux larmes, du sourire à la colère. Nous n’en sommes pas sorti pareil nous non plus. Puis le temps est passé. Presque 8 ans déjà. Il est toujours en nous. J’aurais aimé prendre le temps d’écrire ce que vous avez écrit. Ou du moins essayer. Vous m’avez donné envie de le faire en tout cas. Merci.
Je vous suis depuis longtemps et ne peux m’empecher que de vous apporter tout mon soutien et toute ma
sympathie. Je ne peux que compatir à votre tristesse tant votre hommage est touchant. Votre témoignage me conforte dans l’idee que peu importe les « contraintes », le boulot, les enfants...passez du temps avec nos proches avec celles et ceux qui comptent pour nous et ne pas attendre pour leur dire, leur redire et leur marteler encore, c’est essentiel.
Je vous envoie tout ce que j’ai de pensées positives en stock. Forza.
François
Peur interdite, enfouie, ou non assumée, parce qu'« incroyable », est le mot juste : je sais que cela peut mal tourner, mais je ne le croirai jamais. Les gens qu'on aime ne disparaissent pas.
Maintenant c'est moi qui pleure, ma peur qui sort. Merci. Merci. Merci. De m'avoir permis de la ressentir un instant.
Je clique d'un tweet à un autre, d'un profil puis au Votre.
Sur les blogs, je me promène, je découvre.
Des liens que je referme et ré-ouvre.
Et puis "A bientôt ma puce, forcément"...
Il m'a fallu vous lire sans reprendre mon souffle, d'un bout à l'autre, avec les sourires qui savent bientôt le trop plein de larmes.
Parce que la fin. On la devine au tout début.
Parce qu'on redoute d'y arriver, parce qu'on espère un peu ne pas le devoir.
Malgré la tragédie, malgré le chagrin, malgré cette putain d'injustice. Malgré la mort... Ce que je retiens de ce récit, c'est l'amour.
L'amour de la Vie, l'amour pour Sandrine, l'amour de tous ceux qui gravitent ici et là autour de Vous, autour d'Elle.
Merci d'avoir pu, d'avoir su, retranscrire ces émotions.
Et me dire, qu'on aimerait tous avoir été aimé ainsi avant de partir.
Qu'Elle le savait, forcément.
Merci, beaucoup, pour ce mot, Leannan.
Merci, Maître.
J'ai mis du temps à comprendre. La maladie m'a sauté aux yeux par surprise, au détour d'une phrase, au creux d'une ligne... Un peu comme elle a dû vous sauter à la figure au tournant... ce diagnostic qu'on attend pas, qu'on ne veut pas connaître et qui vous change complètement...
Je n'avais fait que rire avant de comprendre, avant de lire ce mot, ce vilain petit démon, ces six lettres et deux syllabes : cancer.
Ensuite j'ai oscillé, mi-fous rires, mi-cœur serré.
Merci pour ce texte, et (comme cette formule semble vide, mais je n'en ai pas d'autres !) toutes mes sincères condoléances.
Salutations
Et merci pour ce texte émouvant. Il me rappelle combien il est urgent de dire à ceux que l'on aime qu'on les aime, avant que la faucheuse ne vienne faire son sale boulot.
J'ai envie de te tutoyer. Te dire que ton amie vit dans ton coeur et que cela aussi est une part de réel, même si personne ne peut rien prouver de ce côté-là de la barrière.
Moi, j'ai aimé ta lettre d'amour. Pense à en écrire d'aussi belles à ceux qui te sont chers, pendant qu'ils peuvent lire...
Sympathie et compassion, pas si cul-cul que cela, même si ce terme est quasiment propriété du dogme chrétien...
Fab.