Vous le savez, on l’attendait, c’est tombé tout à l’heure : l’arrêt de Grande Chambre Medvedyev et autres contre France est tombé ce matin -et je vous livre à chaud une analyse rapide personnelle, qui est en réalité qu’il n’y a pas grand chose à en tirer juridiquement sur la base des moyens qui y étaient débattus eux-mêmes, mais que paradoxalement, ce n’est qu’à “son occasion”, pour ainsi dire, que la Cour rappelle ce qui me semblerait devoir constituer une légitime évidence dans un grand Etat de droit comme l’est la France.
Qu’est-ce que ça raconte, au vu au moins de ce communiqué de presse -et vive de toute façon la CEDH rien que pour le fait de communiquer sur ses décisions et en temps réel, déjà ?
Des trucs rigolos, et qui, paradoxalement donc, ne tiennent pas à la condamnation de la France, mais bien à sa mise hors de cause partielle.
Des marins sont sur un cargo, soupçonné de transporter de la drogue. La France l’intercepte, sur ordre du parquet, et les marins précités sont présentés treize jours plus tard à un juge d’instruction, qui les place en détention provisoire.
A noter que six d’entre eux seront finalement innocentés, je dis ça je dis rien.
Tous, quoi qu’il en soit, avaient cependant saisi la CEDH, sur deux fondements :
– article 5 § 1, “illégalité de leur privation de liberté (en) alléguant que les autorités françaises n’étaient pas compétentes à ce titre.”
– article 5 § 3 : “délai s’étant écoulé avant leur présentation à un « magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires » au sens de cette disposition”.
Ils ont gagné en première instance, uniquement sur le premier fondement, la Cour ayant estimé qu’ils n’avaient pas été privés de leur liberté selon les voies légales, mais pas sur le second, la Cour ayant estimé que des circonstances exceptionnelles avaient, seules, généré le délai invoqué (délais de retour du bateau).
Appel de la France, et décision de ce jour de la Grande Chambre, avec confirmation de la condamnation de la France sur le premier moyen (en gros, pas de texte ni de circonstances spéciales permettant la privation de liberté entreprise, seul l’arraisonnement du bateau étant légal), ce dont très sincèrement on se fiche, même si on est content pour eux.
Mais surtout, confirmation également de la seconde partie de la décision initiale, avec rejet du second moyen -et c’est là que ça devient rigolo.
En effet, la Cour, d’abord, “rappelle que l’article 5 figure parmi les principales dispositions garantissant les droits fondamentaux qui protègent la sécurité physique des personnes et que trois grands principes ressortent de sa jurisprudence: une interprétation étroite des exceptions, la régularité de la détention, la rapidité des contrôles juridictionnels, qui doivent être automatiques et effectués par un magistrat présentant des garanties d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties et ayant la possibilité d’ordonner la mise en liberté après avoir examiné le bien fondé de la détention.
Si la Cour a déjà admis que les infractions terroristes placent les autorités devant des problèmes particuliers, cela ne signifie pas qu’elles aient carte blanche pour placer des suspects en garde à vue en dehors de tout contrôle effectif. Il en va de même pour la lutte contre le trafic de stupéfiants en haute mer.
En l’espèce, la présentation des requérants à des juges d’instruction, lesquels peuvent assurément être qualifiés de « juge ou autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires » au sens de l’article 5 § 3, est intervenue treize jours après leur arrestation en haute mer (la Cour regrette que le Gouvernement n’ait apporté des informations étayées concernant la présentation à ces juges d’instruction que devant la Grande Chambre).
Au moment de son interception, le Winner se trouvait au large des îles du Cap Vert et donc loin des côtes françaises. Rien n’indique que son acheminement vers la France ait pris plus de temps que nécessaire, compte tenu notamment de son état de délabrement avancé et des conditions météorologiques qui ne permettaient pas une navigation plus rapide. En présence de ces « circonstances tout à fait exceptionnelles », il était matériellement impossible de présenter les requérants plus tôt aux juges d’instruction, sachant que cette présentation est finalement intervenue huit à neuf heures après leur arrivée, ce qui représente un délai compatible avec les exigences de l’article 5 § 3.
La Cour conclut donc, par neuf voix contre huit, à la non violation de l’article 5 § 3″
Ah, oui, au fait, Article 5 § 3 : ” Toute personne arrêtée ou détenue […] doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires, et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure.”
Ce qui importe, c’est que, si la Cour retient ici que des circonstances spéciales, assimilables à un cas de force majeure, ont, et elles seules, interdit que les requérants soient présentés rapidement à un tel juge, c’est à dire un juge d’instruction, qui est assurément le “juge” du texte précité, elle en profite, à nouveau, pour réaffirmer avec une force certaine l’un des grands principes dégagés par sa jurisprudence en la matière :
ce “juge ou autre magistrat habilité par la loi”, seul habilité, notamment, à priver durablement les gens de liberté, doit “présenter des garanties d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties”.
Ça vous semble logique ? Oui, à n’importe quel juriste ou légaliste aussi.
Mais pas au gouvernement français lorsqu’il propose, comme actuellement, justement la suppression du juge d’instruction, dont la Grande Chambre vient de rappeler que lui est bien le “juge” de l’article 5 § 3, pour le remplacer par un procureur… Dont elle rappelle, à l’évidence et sauf à refuser de lire, que lui ne peut pas en être un.
Parce qu’un juge d’instruction, en France, actuellement, c’est un magistrat indépendant de tout pouvoir, et qui ne poursuit pas, directement en tout cas, l’une des “parties”, mais est en principe objectif, donc à la fois indépendant des parties et de l’exécutif.
Et que le procureur est un magistrat, actuellement comme dans la réforme souhaitée, qui est soumis à l’exécutif, qui est son supérieur hiérarchique légal, et qui, qui plus est, poursuit, très largement actuellement, et bientôt exclusivement, l’une des parties, celle qui est soupçonnée, et n’en est donc pas indépendant de celle-ci : il la veut ! Et ne peut donc, sauf à tomber sur la tête, à la fois la poursuivre, et juger du bien ou mal fondé de sa garde à vue, qu’il ordonne ou surveille, actuellement comme dans le projet, et a fortiori, comme dans le projet désormais, être à la fois la partie poursuivante initiale, puis celle qui instruira l’affaire, puis celle qui la fera juger, puis celle qui se retrouvera à nouveau à l’audience pour la poursuivre et en demander la condamnation.
Ce que dit la Cour, selon moi, même si elle le fait moins nettement qu’en première instance, c’est d’une part, que nos gardes à vue sont illégales, et continueront à l’être si la réforme envisagée est adoptée ; et d’autre part, que cette réforme contribuera à faire s’éloigner un peu plus nos procédures des vrais “juges”, en les confiant de plus en plus à des personnes qui “ne sont pas des autorités judiciaires indépendantes”.
Notez qu’on le savait déjà .
Notre Gardienne1 des Sceaux a d’ailleurs immédiatement pris acte de cette décision, si, si, le communiqué instantané le dit : pris acte de la condamnation, regretté à mi-mots que les circonstances n’aient pas validé les interpellations, mais bon on fera avec, et pour le surplus… Rien : tout baigne, pas de mise en cause du statut du parquet français, “certains” peuvent se la fermer.
Elle a, formellement, raison.
La Cour vient souligner que c’est un juge indépendant qui doit décider de la détention -je soutiens de ce fait que nos gardes à vue passées et à venir sont nulles, puisque ce n’est pas le cas, en tout cas pas “immédiatement”.
Mais en France, pour la détention elle-même, et ça continuera à être le cas si la réforme passe, c’est bien un juge qui décide du placement puis du maintien en détention (actuellement Juge d’Instruction, JLD ou Chambre de l’Instruction, bientôt JEL, TEL, CEL, et tout ce qui rime avec …EL).
Donc, sous réserve de ce que j’affirme sur la garde à vue, comme un petit insolent, elle a raison.
Mais stricto sensu seulement, désolé -et c’est tout l’intérêt de ces attendus de principes de la Cour.
Parce que la cour dit aussi que le procureur n’est pas une autorité judiciaire indépendante, et je soutiens qu’elle ne l’est ni de l’Exécutif, ni “des parties”, et que le projet de réforme en fait pourtant la première autorité judiciaire de France, les “juges”, les vrais, étant relégués à des rôles de contrôle en aval, ou d’arbitres, ou, enfin, de juges qui jugeront -mais ne le feront plus désormais que sur la base d’une enquête beaucoup trop librement menée par le parquet, tout puissant et disposant de tous les moyens d’investigation de la République, quand la Défense… N’aura à peu de chose près que ses mots.
Elle permet plus que jamais d’affirmer que la réforme envisagée, loin d’être l’avancée progressiste présentée, constitue en réalité une régression vers l’arbitraire et le déséquilibre des forces en présence, une véritable rupture de l’égalité des armes, et donne, sinon tous pouvoirs, du moins l’essentiel des pouvoirs, à une personne qui statutairement ne devrait pas pouvoir les détenir.
Dix fois plus schizophrène, soit dit en passant, que le juge d’instruction auquel il est tant fait ce grief…
En fait, cet arrêt, tout simplement, vient rappeler à la France, en peu de mots très simples…
Ce qu’est un juge.
Une autorité judiciaire indépendante du pouvoir et des parties.
Comme un avocat, quoi -mais en juge.
C’est pourquoi, “de plus fort”, comme on dit chez nous, il continue à me sembler évident que la réforme dev(r)ait, pour être conforme aux grands principes rappelés à cette occasion, et pour la garantie de la seule Justice qui soit, totalement indépendante, non pas supprimer le juge d’instruction, mais supprimer le procureur, ne laisser que des juges, et placer, au contraire, l’un de ces juges derrière chacun des barreaux de chaque détention, fût-ce ceux d’une garde à vue -et peut-être d’ailleurs d’abord derrière ceux-là .
- Vous savez peut-être que je déteste les féminisations laideronnes, justement, des mots, qui rendent autant hommage à la femme que le rictus au sourire, mais Sous Toutes Réserves m’a demandé de le préciser expressément, des fois qu’on croirait que j’ai basculé dans la mocheté, donc je ! [↩]
Je serais heureuse d'avoir votre avis sur l'histoire que je raconte... Rien que de très ordinaire, sans doute... mais qui m'a beaucoup choquée quand même !
- X, détenu à la maison d'arrêt de la ville d'Y dépose plainte compte-tenu de ses mauvaises conditions d'incarcération, et surtout de vie. (MA plus que surpeuplé et vétuste).
- le parquet, après enquête classe la plainte sans suite.
- que nenni, X, s'en remet au juge d'instruction en déposant plainte avec constitution de partie civile entre ses mains.
- Z, juge d'instruction, se dit qu'il serait intéressant d'enquêter sur cette maison d'arrêt et d'approfondir les choses.
- le parquet, s'y oppose fermement.
- la décision est en délibéré.
Retirez Z de ce récit, et voyez donc ce qu'il advient.
Sans oublier qu’en cas de représailles à l’encontre du détenu ,comme on peut l’imaginer dans de telles circonstances ,ce qui aggraverait la plainte pour mauvais traitement ,le parquet ne pourra que persister dans la négation des faits .Un bel exemple qui illustre parfaitement comment le parquet tel qu’il est peut devenir une source de violence et de justices entre quatre murs à l’abri des regards.
Sinon, dans un registre tout à fait différent, ça y est, et ce n'est pas un poisson d'avril périmé, la dématéralisation des procédures est lancée par chez moi......et c'est un beau "bordel". (même s'il ne s'agit que de copies de travail ou équivalents électroniques de procédures n'ayant pas la force juridique de la procédure écrite). Voyons voir avec le temps, ce que cela va donner mais les buggs ne vont pas tarder à arriver à mon sens. L'avenir nous le dira. En attendant, si au parquet et surtout au greffe, ils vont gagner du temps, nous, non.
Ensuite, pourquoi faire sans arrêt des procès d'intention au parquet ? il me semble que bcp de membres du parquet se sentent avant tout magistrat et certains doivent bien prendre des décisions "courageuses" ; de même certains juges d'instruction bien que magistrats du sièges s'endorment sur les dossiers ou n'instruisent qu'à charge...
Ceci dit, il n'y a pas réellement de raison, à mon avis, de maintenir ainsi le parquet à la "merci" du pouvoir exécutif pour son évolution de carrière (puisqu'au bout du compte, c'est de cela qu'il s'agit, non ?) quoique le parquetier en question doit disposer alors d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif je suppose en cas de "nommination-sanction" (j'avance cela sous le contrôle de Marie, ce n'est qu'une supposition de ma part).
Ce qui est réellement gênant, c'est l'intrusion du politique dans le domaine de la justice au moindre fait divers monté en épingle : dans ce cas pourquoi ne pas aller + loin que la modification du statut du parquet, pourquoi ne pas prévoir un garde des Sceaux qui serait une sorte d'autorité administrative indépendante nommée pour plusieurs années et garant d'une justice détachée des évolutions politiques(l'idée n'est pas de moi, mais de Monsieur Debré père, rendons à César...).
En même temps, je ne me leurre pas : cette "révolution là " n'est pas prête d'arriver
Pour ce qui est du second argument, celui qui fait une relation avec le contrôle de garde à vue (que ne pourrait donc pas exercer le parquet, puisque réservé à un juge), ne peut-on pas (nous ou la CEDH, ou, en fait, que sais-je) supposer faire une différence entre une détention "à temps" (j'entend sur une certaine durée) et la détention de 96 heures au plus (en criminalité organisée) d'une garde à vue?
Je sais que l'on ne peut tirer d'interprétation du droit pénal qui doit être stricte, mais bon!!!
Alors oui, allons-y ! réformons la procédure pénale, virons le juge d'instruction et donnons la place au parquet mais n'oublions pas que la cour européenne vient encore de dire que ce n'est pas une autorité judiciaire compétente...
n'oublions pas que beaucoup de décisions risquent tout simplement d'être contraire à la convention européenne des droits de l'Homme dont les dispositions ont vocation à s'appliquer directement en droit interne.
Et dire que certains osent annoncer que la Cour ne remet pas en cause le statut du parquet...
je vous propose un commentaire sur le sujet à cette adresse : http://vuparmwa.over-blog.com/article-le-nouvel-arret-medvedyev-est-arrive-47667797.html
Soyons sérieux ! Si l’interception s’inscrit véritablement dans un programme de lutte contre le trafic de drogue comme il est dit et martelé devant la Cour mais que l’Etat n’a pas eu recours à d’autres moyens pour acheminer au plus vite les mis en cause devant la justice, ni même prouvé qu’il a tenté de le faire ,que peut-on déduire alors ?
Que l’expulsions des étrangers est une priorité qui se situe loin devant la fumeuse prétendue « lutte contre la drogue » . C’est stupéfiant !
Sinon, je souligne à nouveau que six sur les 9 "ont été acquittés", entre temps -je suppose donc par un Cour d'Assises Spéciale, composée exclusivement de magistrats...
Ce qui dit beaucoup sur la garde à vue (qui pour ces innocents là a duré 13 jours, sur un bateau en pleine mer donc sans le moindre contrôle effectif extérieur, avocat ou même parquetier), sur les détentions provisoires, et sur les voies de recours dites "extraordinaires" de type CEDH : cet arrêt intervient alors qu'ils sont libres et innocentés depuis longtemps...
Gardienne des Sceaux c'est très laid ! Je sais que vous répugnez à la féminisation du vocabulaire, mais d'habitude vous le signalez.
Que se passe-t-il ? C'est votre colocatrice qui vous oblige, vous avez peur de ses frères vous aussi, ou bien vous abdiquez de vous-même ? Est-ce une sorte de lapsus qui trahit un manque de volonté ?
Reprenez-vous voyons ! Imaginez la phrase "la gardienne meurt mais ne se rend pas", c'est moins bien quand même.
Dans le style barbarité féministe, l'administration fiscale s'y met, puisque je lis régulièrement : "Mme Machin, agente des impôts".
Ha oui, sur le fond du billet, je suis d'accord avec vous, sauf que le statut actuel du parquet ne me gène pas, même si des aménagements sont nécessaires (notamment concernant la GAV), car je trouve normal que la politque pénale soit dictée par le Gouvernement, par soucis de cohérence (je sens que je vais me faire allumer). En revanche, étendre le rôle du parquet à l'instruction me parait une hérésie, d'autant plus déplaisante que j'ai (j'avais) beaucoup d'admiration pour MAM, qui était une très grand juriste (avant de faire de la politique à haut niveau).
Pour "la Gardienne", je vomis l'expression -unique raison de son emploi ! Mais effectivement, j'ai voulu taper vite, et ai omis la petite note habituelle : je répare ça de suite en l'intitulant de votre doux pseudo, voilà , bien fait !
Du coup, je deviens co-auteur du billet : je veux 50 % des droits, et l'exclusivité sur les produits dérivés. Pour les modalités pratiques, voyez avec mon avocat habituel
Profitant de cette mauvaise réputation (due notamment aux juges Lambert et Burgaud), le Gouvernement a alors entrepris de constituer les pôles de l'instruction (qui, me semble-t-il, entraînent depuis le début de l'année une collégialité systématique lors des affaires criminelles), avant de s'intéresser à la suppression du personnage judiciaire.
Alors que cette partie de la réforme de la carte judiciaire est désormais en vigueur et effective, l'idée de vouloir rattacher au Parquet l'instruction d'une affaire me paraît être une réelle ineptie.
Mais au fond, cette évolution du juge d'instruction au juge de l'instruction passera-t-elle un jour la Chancellerie au Parlement ?
C'est l'une des raisons pour lesquelles la Chancellerie est pressée -outre le fait de vouloir comme d'habitude squizer tout le monde -je ne sais pas où en est Marie, qui méditait un article général sur le projet de réforme, mais moi, je n'en ai pas encore lu la moitié, 245 pages pdf... Et on annonce déjà le tome 2 (sur le jugement) !
Quoiqu'il en soit, je ne sais pas où va la Justice, mais elle y va !
Et là , il n'y aura pas d'échappatoire possible puisque la question qui est posée aux parties par la Cour est la suivante :
Même les gouvernements mal-comprenants seront obligés de comprendre.
Il paraît que cette nouvelle affaire devrait être audiencée d'ici l'été. On peut peut-être espérer un délibéré plus rapide que pour l'arrêt Medvedyev (d'ici la fin de cette année ?), puisque les faits et le droit sont plus simples et que la jurisprudence de la Cour est bien balisée sur la question.
Je vais finir de convaincre mon Ordre d'en engager un et de le suivre, en choisissant un dossier où des aveux auront été passés en garde à vue dans un dossier criminel, histoire de clairement baliser les questions, là aussi. Je vous tiendrai au jus...
Dans le cadre du contrôle a priori encore appelé contrôle abstrait de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel était en quelque sorte dans sa bulle pour interpréter la Constitution.
Avec le contrôle a posteriori, les choses pourraient changer profondément car volens, nolens, le Conseil constitutionnel pourrait être obligé d'interpréter la Constitution en tenant compte des apports de la jurisprudence de la CEDH : politiquement, est-il concevable que le bloc de constitutionnalité (Constitution, Déclaration de 1789 et les principes à valeur constitutionnelle ainsi que les fameux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République) protège moins le droit à la sûreté et les droits de la défense pendant l'enquête que la Convention européenne ? Si non, à quoi bon affirmer le caractère "prioritaire" de la question de constitutionnalité par rapport au contrôle de conventionnalité ?
Je sais bien que certains s'attendent à ce que le Conseil constitutionnel botte en touche pour la seule raison qu'il s'est déjà prononcé dans le cadre du contrôle a priori sur la constitutionnalité de la GAV (en dernier lieu dans sa décision du 2 mars 2004).
Mais est-il concevable que le Conseil constitutionnel, qui sera sans doute saisi d'ici 2 mois de QPC relatives à la constitutionnalité de la GAV actuelle, juge en septembre que la GAV est conforme à la Constitution et que quelques semaines ou quelques mois plus tard la CEDH condamne la France ?
Il peut tout aussi bien considérer que la force d'attraction de la jurisprudence de la CEDH est telle que le passage du contrôle a priori au contrôle a posteriori de constitutionnalité réalise par lui-même un "changement de circonstance" qui l'autorise à revenir sur sa jurisprudence. Avec en plus pour ce qui le concerne la possibilité d'aménager dans le temps les conséquences d'une déclaration d'inconstitutionnalité (donc la possibilité de limiter les dégâts en ce qui concerne les procédures en cours, ce que ni la Cour de cassation ni la CEDH ne peuvent faire)
Ca va être chaud entre le Conseil constitutionnel et la Cour européenne
C'est le premier retour que j'en ai, j'ai installé ça il y a quelques semaines, et je m'en suis ch..., et pour la traduction encore plus !!
Donc, MERCI !! (Et ravi que ça marche !)
Comme un avocat, quoi -mais en juge.
Je suppose qu'il s'agit d'un clin d'œil, car il me semble évident qu'un avocat n'est pas indépendant des parties, du moins pas de celle qu'il représente.
Et c'est notamment en vertu de ce princiope que l'avocat peut refuser un client ou le débarquer.
C'est bon, la liberté. Cher, aussi. Mais bon !
Mais elle n'était pas gratuite : je pense, quand-même (allusion au com' de Marie plus haut) que le procureur est, par essence, lui aussi plus "au service" des parties civiles, et plus généralement de la société non-délinquante, que de la personne poursuivie.
Dès lors, je ne crois pas réaliste de penser que, partie poursuivante, il soit en capacité, dans le futur, d'enquêter ensuite "à charge et à décharge", comme je magistrat instructeur actuel en a l'obligation légale -et comme je pense qu'il le fait le plus souvent, étant précisé qu'un certain nombre de recours sont prévus si l'on pense qu'il ne le fait pas -recours plus ou moins effectifs, mais quand-même...
A chaque fois que je pense à cette réforme, je me vois en train de déposer directement auprès du Parquet les mêmes demandes d'actes que j'effectue actuellement, notamment par exemple dans ces dossiers dans lesquels je défends un violeur qui a tout avoué, et se trouve être assez frustre, et avec un passé qui n'est qu'un passif...
Ces dossiers-là , dont tout le monde pourrait se foutre -les faits sont là , identifiés et avoués, l'homme est sous les verrous ou sous main de justice, les victimes à l'abri et en attente de "réparation", je n'arrive pas à les imaginer dans l'avenir judiciaire qu'on nous trace.
J'ai du mal à penser qu'un procureur pourra, ou voudra, passer du temps à me donner les moyens de le défendre humainement, plus tard, et recherchera avec autant de moyens qu'actuellement les éléments de "sa" vérité humaine -le peu qui nous reste à l'audience, face aux jurés (si en plus il ne se tape pas une CRPC criminelle !).
Non pas, évidemment, qu'un procureur ait une moins haute conception, ou un moins grand cœur, qu'un autre, mais simplement parce que ce n'est pas sa fonction première, ni son métier -et qu'au surplus il sera tenu par un certain nombre d'impératifs qui n'existent pas pour les intervenants actuels -ne serait-ce par exemple que le jour où tomberont d'en haut des instructions visant à épargner le budget de la Justice, en refusant par exemple les enquêtes de personnalité frayeuses, les contre-expertises pas toujours fondamentales, etc... (Tiens, vous, Zythom, vos expertises informatiques onéreuses, là : attendez-vous à ce qu'il y en ait moins, vous verrez...)
Par ailleurs, comment imaginer la situation suivante : le procureur poursuit et veut voir condamner un homme. Il instruit son dossier, avec déjà , inévitablement, dans un coin de la tête, le fait qu'il souhaite toujours le faire condamner, faute de quoi il ne l'aurait pas poursuivi. Mais en plus après, il se rend au jugement, et c'est lui qui y soutient le débat nouvelle formule, par une accusation étayée en amont, et en y interrogeant directement les témoins -avec nécessairement donc dans la tête, lorsqu'il instruit, qu'il soutiendra encore cette accusation publiquement à l'audience.
Comment croire dès lors que l'ensemble sera objectif et autant à décharge qu'à charge ? Et que donc le même personnage fournira lui-même de bonne grâce à son adversaire les moyens de se faire battre ?
Je n'y crois pas, parce que ce n'est pas crédible.
J'aime l'idée qu'il y ait deux ou trois parties et un arbitre, à l'instruction notamment, que j'estime indispensable et fondamentale, pour la totale appréhension des crimes, notamment.
Je redoute l'idée qu'il n'y ait plus que deux ou trois parties, sans arbitre (en tout cas directement immergé dans le dossier), et que l'une de ces parties ait voix prépondérante en cas de désaccord.
Paradoxe des paradoxes : je déteste citer Outreau, mais tout de même, dans Outreau, c'est le Parquet qui poursuivait, et requérait mises en examen, détentions, et renvoi devant les Assises... Et si le magistrat instructeur a été sanctionné (à tort ou pas), c'est pour n'avoir pas joué son rôle de filtre, notamment, d'avoir trop facilement suivi... Alors, pour éviter ça... On s'est empressé de laisser désormais le Parquet seul maître initial de la même instruction ! Kafkaïen, non ?
Par ailleurs sa lecture m'interpelle concernant l'avocat; il écrit, je cite "l'infaillibilité et l'humanité de magistrat sont fonctions de celles de son aiguillon indispensables qu'est l'avocat" et "un avocat médiocre est un risque d'une médiocre justice, le bon défenseur pousse le magistrat dans ses retranchements, il le force à se remettre en cause, à regarder différemment une règle de droit et une situation humaine".
Et il dit aussi "le droit exige qu'on emprisonne une personne mais une application humaine de ce même droit permet qu'elle ne le soit pas", c'est un extra-terrestre .
C'est pour cette raison que je m'interroge à changer de conseil.
Je pense qu'un avocat est bon dans certains dossiers, dans certains cas humains. Je le sais, elle a de bons résultats, mais pas dans le notre. Ce n'est pas qu'une question de compétence, c'est autre chose...
Quoiqu'il en soit, en ce qui concerne la garde à vue dans l'avant-projet de code de procédure pénale, elle peut sans doute être "sauvée" des futurs recours devant la CEDH si c'est le JEL et non plus le parquet qui l'autorise, la prolonge et la contrôle... mais la chancellerie amendera-t-elle son texte sur ce point ???
Pour le reste, je me demande si réellement le parquet a besoin d'être indépendant pour mener les enquêtes, je ne pense pas que ce soit une condition indispensable si par ailleurs les avocats ont les moyens de faire réellement contrepoids... ???
Sur l'indépendance du Parquet, en fait, moi je me moque un peu que le procureur soit hiérarchiquement soumis à l'Exécutif, franchement : dans 9.9 cas sur dix, ça n'aura pas grand sens, et aucune influence, effectivement. En revanche, qu'il soit à la fois, je l'ai déjà dit ailleurs ici, poursuivant, puis instructeur, puis poursuivant à l'audience, choisie par lui, et demandeur de la peine, me pose le réel problème de son indépendance vis-à -vis de la partie poursuivie, notamment au stade de l'instruction... Justement parce que je ne vois pas dans le projet que l'avocat ait de quelconques moyens de lutter !
S'il y a un truc que la réforme ne change pas, c'est bien les moyens de la défense. Ils sont actuellement inexistants ou presque, mais c'est normal, puisqu'un juge indépendant recueille toutes les demandes de ladite défense et les ordonne, d'accord ou pas avec l'avis du parquet ; mais demain, c'est ce dernier qui recevra les demandes...
Ah, oui, il y aura des recours contre le refus du parquet, je sais... Mais il est compétent au premier chef ; et déjà actuellement, on répugne souvent à faire appel d'un refus d'acte pour un détenu, pour ne pas allonger les délais, quitte à perdre un moyen : donc demain...
Le truc fondamental que va changer au quotidien cette réforme, du point de vue de la défense, c'est que pour trouver un juge, il va falloir systématiquement exercer un recours, ce qui est onéreux, épuisant et long : le déséquilibre accusation/défense n'aura jamais été aussi flagrant, au stade de l'enquête en tout cas.
Si la Chancellerie soutient que non, je lui proposerais bien, dès lors, de nous la confier à nous, l'enquête, en inversant les rôles : après tout, avocat moi aussi d'une partie (comme le procureur l'est de la société et de son Ordre Public), je suis tout aussi capable de mener une enquête objective, non ?
Curieusement, je sens qu'ils ne voudront pas...
Et pourtant, ça augmenterait le nombre de non-lieux, et diminuerait le nombre de procès et la population carcérale, d'où économie...
Pourquoi le gouvernement ne s'empare pas de cette idée ?
Assurément. Et c'est pour ça que la Cour précise à l'intention des gouvernements qui ne comptent pas de juristes en leur sein ou de ceux qui ne sont pas légalistes que :
(c'est moi qui souligne).
Il me semble que la Cour fait aussi bien qu'elle peut, compte tenu des circonstances, puisqu'il n'est apparu que devant elle (ce n'était pas le cas en première instance) que les intéressés avaient été présentés devant le juge d'instruction le jour même de leur arrivée à Brest. Bref, l'incise de la Cour sur le ministère public qui en tant que partie poursuivante ne peut être qualifié de magistrat habilité à des fonctions judiciaires, n'était pas nécessaire sauf si, comme je le crois, elle a voulu adresser un avertissement à la France.
Il y a également un autre point sur lequel cette décision (et d'autres déjà avant elle) invalide et la pratique actuelle française et l'avant-projet de ce de pénal : c'est celui des restrictions aux droits de la défense au stade de la garde à vue pour cause de terrorisme, de bande organisée ou de trafics en tout genre, restrictions qui ne peuvent intervenir qu'au cas par cas, et non pas pour de manière abstraite par catégorie d'infractions.
Celui-ci comporte, comme droit nouveau du gardé à vue, celui de demander, en matière délictuelle (en matière criminelle se serait automatique) que ses auditions soient filmées (je milite pour que ce soit automatique tout le temps, parce que vous imaginez le gardé à vue : "Mon commandant, c'est pas que j'ai pas confiance, mais je voudrais que vous filmiez nos entretiens, au cas où...").
Le projet exclut le cas où, après prolongation, le suspect aurait demandé que son avocat y assiste : alors on ne filme plus. Bon, là , d'accord, à la rigueur, l'avocat vaut bien un enregistrement numérique (encore qu'en cas d'incident sur les questions qu'il pose entre lui et l'OPJ, un petit film mettrait tout le monde d'accord, mais enfin...).
Mais alors, là où c'est tristement drôle, c'est dans le cadre des régimes dérogatoires, notamment bande organisée : si j'ai bien lu, non seulement les gardes à vue sont étendues, et l'arrivée des avocats retardée, comme maintenant ; mais en plus le droit à enregistrement disparaît !!!
Vous comprenez, c'est tellement grave qu'on dit officiellement que dans ces cas-là , ça peut déraper, donc on ne filme pas !
Question de Mekeskidi : si MAM poursuit sa réforme, qu'elle est votée mais que cette réforme est contraire à ce que l'Europe demande, la loi ne sera-t-elle pas simplement non applicable et la France obligée de revoir sa copie ?
Il y a des filtres à cette loi, saisine du Conseil Constitutionnel notamment, effectivement. Mais vis à vis de la jurisprudence CEDH, à mon avis, il faudra un recours et une condamnation, donc après entrée en vigueur, et longs délais...
Le piège est au surplus que la réforme, à part le remplacement initial du juge d'instruction par le procureur, ne modifie pas fondamentalement en revanche, notamment, le régime de la détention provisoire, qui n'est pas confiée au parquet mais au Juge de l'Enquête et des Libertés, qui lui est un vrai juge.
Le bât blessera beaucoup plus sûrement en termes d'enquête impartiale et équitable (égalité des armes) que de détention, pour laquelle la situation actuelle sera peu ou prou inchangée.
Ah, mais MAM a bien précisé que le statut dépendant du Parquet n'était "pas négociable" dans le cadre de la réforme projetée ... Tant pis.
Mais je trouve grotesque, quand on lit le projet de réforme, d'avoir fait de ce reproche la cause essentielle de la suppression du juge d'instruction, qu'on remplace par un procureur encore plus soumis à cette critique, par nature.
Des motions partent de partout vers la Chancellerie pour exiger que la concertation (inexistante en l'état) porte sur tout le projet, sinon : on verra, qui sait -je sais que je suis idiot, mais je continue à créditer la personne de Madame Alliot-Marie d'une certaine droiture, d'où je tire qu'elle souhaite peut-être réellement cette concertation, et qu'il se peut que rien ne soit encore gravé dans le marbre...
C'est naïf, je sais, mais je n'arrive pas à penser que cet ovni pas dégringoler comme ça, un beau jour...
Pour le reste ... je ne sais pas. La concertation a apparemment été initiée dans les juridictions par une dépêche du ministère datée du 1er mars, sollicitant le rassemblement avant le 30 avril d'éventuelles contributions sous forme de modifications textuelles directement insérables, si j'ai bien compris.
Néanmoins ... vu le poids du pavé qu'est ce projet ... vu le temps limité dont nous disposons ... j'ignore si la chose est encore modifiable, et surtout si quelqu'un le souhaite vraiment.
Et je suis d'accord pour rappeler que la légitimité d'une action étatique ne peut justifier toutes les atteintes à la liberté. Il est remarquable que ce principe doit être aussi constamment rappelé sur les petits contrôles d'identité ou sur les gros.
ça nous est tous arrivé d'avoir à le faire et dans ce cas, notre seul chance, c'est l'inattention du juge (ou sa compétence relative pour ceux qui côtoient certaines juridictions non professionnelles).
Et là , elle plaide, en plus, contre la jurisprudence et contre la doctrine, spas facile, faut au moins lui rendre cet honneur
L’indépendance du Procureur est incontournable si on na veut pas que l’exécutif fasse du judiciaire .
Tout tripotage du statut du procureur est voué à être discrédité ,si le principe d’indépendance du procureur n’est pas garanti .Une garantie réelle et non celle d’un marchand d’électroménager . C'est-à -dire la nomination des procureurs se fait par une autorité indépendante du ministère et leur état avancement ne doit rien à un politique qui occupe le poste de garde des sceaux pendant une législature.
Il reste à MAM à choisir son camp .Elle fait partie d’un ancien régime qui confond l’exécutif et le judiciaire ou elle attache son nom à une nouvelle page de l’histoire de la justice.
ça sert à rien d’insulter les anglo-saxons et personne ne la suivra si elle veut passer pour une Jeanne d’Arc.
La justice est un instrument sérieux de l’Etat .Déjà qu’il est privé de moyens matériels effectifs pour rendre une justice équitable .Il a été amputé encore récemment de quelques tribunaux . MAM pourrait faire l’économie de com en expliquant sur quoi elle se fond pour refuser l’indépendance du parquet au lieu de répéter qu’il est déjà indépendant mais qu’il ne peut pas l’être . Elle est ou la schizophrénie donc ?
Bon, d'accord, mais là , un peu trop nombreux, les juges, ça pouvait pas -donc, au moins, elle pouvait se contenter d'un dépôt discret...
Les conseils de prud'hommes, par contre, je dois avouer ... j'en ai un qui m'a reproché de ne pas avoir rapporté une preuve négative, et un autre qui est persuadé qu'une décision de sursis à statuer est une décision au fond et que le principe d'unicité de l'instance s'oppose à ce que l'adversaire réintroduise son action, elle est pas belle la vie judiciaire ?
Ceci étant, c'est tout de même effectivement curieux, non pas que la France n'ait pas été condamnée pour ses gardes à vue, mais qu'aucune procédure européenne n'ait été engagée par un français sur ce point, je crois.
Ceci dit, je conçois plus difficilement qu"il soit impartial (par définition) et ça me paraît quand même éventuellement, un chouia, légèrement, un tout petit peu, gênant de lui confier la direction complète de toutes les investigations (ouais, je sais, c'est déjà le cas de la plupart des dossiers aujourd'hui, mais d'une part la procédure actuelle n'est pas forcément top (cf la moitié des billets de Me Mô) et, d'autre part, la victime peut se constituer partie civile et déclencher l'ouverture d'une instruction s'il lui paraît que le parquetier a négligé son rôle - ce qui arrive une fois tous les 10 000 ans, mais bon...).
En fait, l'équilibre actuel lors de l'instruction me paraît plus logique (oui j'ai l'esprit tordu) au sens où le pouvoir (du parquet, avec les réqisitoires, ses demandes...etc) arrête le pouvoir (du juge d'instruction) et où un juge met en état l'affaire qui sera plaidée plus tard par le parquet.
En gros, même si en pratique le parquet peut tout à fait effectuer des actes d'instruction qui servent la défense, ça me paraît structurellment plus cohérent de demander à l'accusation...ben, d'accuser (et à la défense de défendre et à un juge au milieu de chercher la vérité, quelque soient les moyens du suspect).
C'est si bêtement logique que ça ne pouvait qu'être modifié par le projet de réforme... (Quand on pense que la lettre de mission du rapport Léger, source (intarissable) principale de la réforme, comportait notamment la simplification de la procédure pénale...)
D'ailleurs, c'est presqu'amusant, mais voici ce qu'en dit le Ministère lui-même sur son site, pour présenter ledit projet, et donc apparemment d'accord avec vous : "L'objectif de la réforme est de recentrer chacun sur son cœur de métier. Le procureur enquête, l'avocat défend et le juge indépendant contrôle et arbitre." !
Sauf que l'examen approfondi du projet fait que l'on aurait en réalité du écrire : "Le procureur garde à vue, déferre, enquête, renvoie et poursuit, l'avocat défend et le juge indépendant contrôle".
J'avoue n'être pas de ceux qui pensent que le Gouvernement tente délibérément de confisquer une partie du pouvoir aux juges, je ne crois pas à cette volonté concertée, je continue à penser que trop de magistrats sont impliqués dans ce projet, et qu'ils auraient, si c'était le cas, refusé leur rôle.
Mais dés lors se pose la question : pourquoi veut-on a tout crin et de manière non-négociable que le parquet remplace le juge d'instruction ? Je ne trouve nulle part la moindre justification plausible de cette volonté farouche : on fait principalement le reproche au JI d'être un peu à la fois enquêteur et poursuivant, donc partial -et on ne trouve rien de mieux pour contrer ce prétendu état de fait que de donner au poursuivant par nature le statut d'enquêteur ! Sincèrement, je ne comprends pas.
Effectivement, "presqu’amusant" pour le rapport Léger est le terme exact (à mon avis tout est dans le presque, mais je dis ça, je dis rien...) Enfin, disons qu'il vaut mieux en rire qu'en pleurer.
Sur le fait de penser que le gouvernement tient à contrôler toutes les enquêtes, je plussoie Me, je n'y crois pas trop non plus.
A l'annonce de la suppression du juge d'instruction je me suis dit que c'était pour transférer ses compétences à la défense (ben ouais, comme juriste en herbe, j'aime bien les modèles tout faits, donc "accusatoire nous voilà " !) et faire des économies en transférant aux accusés la charge (financière surtout) de faire les expertises et autres actes d'instruction pour leur défense. A priori ce n'est pas le sens de la réforme (voyez, ça aurait pû être pire !), même si on n' est pas à l'abri d'une nouvelle simpification de procédure...
Ceci dit, si les responsables politiques se fichent tout à fait de 95% des affaires judiciaires (si certains nous lisent : c'est TRES bien, continuez comme ça !), ça paraît logique que certains veuillent garder un "droit de regard" pour les 5% qui restent (on pense souvent aux fameuses affaires politico-financièro-judiciaires, mais beaucoup plus simplement il suffit qu'une affaire soit médiatisée - et là on sort de l'ultra exceptionnel quand même - pour qu'elle devienne un enjeu politique, à torts, certes, mais c'est l'occasion - de faire une loi sur les "chiens dangereux" ou les "bandes" - qui fait le larron, non ?). C'est pas qu'ils ont pas confiance, hein, attention, non non, mais bon, ça n'empêche pas la prudence.
Ce qui me convainc de ça est tout simplement le refus (concerté-mais-définitif-d'emblée, sinon c'est pas drôle) de rendre le parquet indépendant. J'ai beau chercher, c'est tout ce que j'ai trouvé comme explication logique (ouais, je cherche de ces trucs, pfff, "logique", et puis quoi encore, juste tant qu'on y est ?!)
Je crois pour ma part que le problème ne se pose pas ainsi. Pourquoi n'est-il plus possible de dissoudre une personne morale pour escroquerie ? Pourquoi un bouclier fiscal ? Pourquoi un juge d'instruction disparaît alors qu'il a fait éclater des affaires financières énormes ? Pourquoi rogner sans cesse sur des budgets aussi importants, surtout pour les plus pauvres - 50% des français gagnent moins de 1600 euros par mois - que l'Education Nationale ou la Santé ? Pourquoi fait-on une telle chasse aux petits arnaqueurs de la sécu et du Pôle Emploi qui détournent quelques milliers d'euros et ne fait-on rien contre des banques - celles-là même à qui on a donné des sommes colossales quand elles nous ont mises KO en vivant au-dessus de leurs moyens - qui ont des filiales dans des paradis fiscaux ? Le gouvernement ne confisque pas une partie du pouvoir aux juges. Nos élus préparent l'avenir de leurs riches et influents amis et le leur (bah faut bien penser à sa reconversion !).
C'est l'ère du copinage, du lobbying et des réseaux.
- les personnes morales risquent toujours la dissolution en cas de délit ou de crime : art 131-39
- faire "la chasse aux petits arnaqueurs de la Sécu et de Pôle emploi" vous parait immoral ? Hé bien pour moi ça tombe sous le sens, notamment parce que l'argent qu'ils prélèvent indument vient en moins à ceux qui en ont besoin. Alors dire que ce n'est pas grave parce que c'est le fait de peu de personnes qui ne prélèvent que (sic) quelques milliers d'euros, revient à encourager le plus grand nombre à le faire : si on ne risque rien, autant en profiter, comme tout le monde. Auriez-vous la même indulgence si je vous disais que je trouve honteux de ponctioner d'impôts et de charges sociales de entreprises qui peinent à payer leurs salariés, et dont les dirigeant gagnent moins que le SMIC ?
- le bouclier fiscal tant décrié permet entre autre une exonération des droits de succession (pour simplifier). Vous trouvez peut être cela injuste, mais lorsque vos parents ou votre conjoint décède, vous êtes désormais bien content de ne pas avoir d'impôts à payer. Si vous achetez votre logement principal, vous bénéficiez d'un crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunts, c'est pas grand chose, mais ça soulage quand même votre budget. Et au final, ça ne revient pas à si cher pour l'Etat (de l'ordre de quelques centaines de millions d'euros - tout est affaire d'ordres de grandeurs).
- concernant les banques, je peux me tromper mais il me semble qu'on ne leur a pas donné de l'argent, mais qu'on leur a prêté. Je crois même que ces sommes ont été rendues. Alors on peut critiquer le principe (si on souhaitait le chaos), on peut critiquer les modalités, on doit même les critiquer lorsqu'une fois renflouées les banques ont refusé tout crédit aux entreprises, mais dire qu'on leur a donné de l'argent relève soit de la méconnaissance, soit de la malhonnêteté (mais je vous présume de bonne foi, ne vous en faites pas).
Vous voyez tout en noir, et je vous comprends, les lendemains qui chantent, ben justement c'est pas pour demain. mais voir dans tout ceci un grand complot pour ecraser la populace au profit de nantis me parait un choïa excessif.
Concernant le "paquet fiscal", je maintiens mes déclarations, et précise que l'augmentation de l'abattement des droits de successions pour les enfants n'est en fait que la revalorisation normale de l'abattement de 100 000 francs, qui datait de 1959 ! Je pourrais en dire d'autres, mais ce n'est pas le sujet ici.
Concernant la dissolution des personnes morales, le hic est l'art 124-33 de la loi de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures. Qui oublie l'alinéa 1 de la l'art 131-39 rendant la dissolution impossible.
Faire la chasse aux petits arnaqueurs ne me paraît pas immoral et je n'ai jamais écrit que ce n'était pas grave de détourner de l'argent. Où avez-vous lu ça ?! Mais ils ont été pointés du doigt par l'actuel gouvernement comme étant responsables de tous les maux de la France pendant que le bouclier fiscal était voté. Par contre, ne rien faire contre des sociétés et notamment des banques qui ont des filiales dans les paradis fiscaux, oui, je trouve ça immoral car le préjudice pour l'Etat est considérable. Et en plus on leur "prête" de l'argent (je plaide coupable, vous avez raison il s'agit d'un prêt, mais écrire prêter quand il y a défiscalisation dans des paradis fiscaux, j'ai du mal).
Le bouclier fiscal favorise quelques centaines de personnes détenant les plus gros patrimoines (66% du coût du bouclier) et en effet plusieurs milliers de personnes dont des familles aux petits revenus, voire très pauvres mais possédant un bien immobilier d'une forte valeur (1% du coût du bouclier). Je vois à l'instant que vous avez rectifié de vous-même l'erreur entre bouclier fiscal et paquet fiscal et que vous avez rajouté que les droits de succession existent toujours. Une augmentation de l'abattement ne me paraît pas non plus absurde.
Je vous renvoie aux chiffres de l'INSEE en matière de patrimoine, revenus, seuil de pauvreté qui vous feront comprendre que même le paquet fiscal ne concerne qu'une minorité de français. Pour reprendre l'exemple initialement donné, les 50% de français gagnant moins de 1600 euros détiennent 7% du patrimoine français. Pouvoir acheter et conserver un bien immobilier tant que l'emprunt n'est pas remboursé avec 1600 euros me paraît très utopique surtout vu le chômage et sans compter la maladie qui peut vous tomber dessus à tout moment. Je fais partie de ce qu'on appelle la classe moyenne et si je suis propriétaire aujourd'hui c'est parce que j'ai acheté il y a longtemps - dommage ! pas de paquet fiscal - durant une année où l'Etat n'avait pas octroyé de défiscalisation des intérêts d'emprunt (cela existait en effet déjà ) - re dommage ! - et aujourd'hui je ne pourrais certainement pas souscrire un emprunt pour acheter le même bien. Au mieux pourrais-je peut-être prétendre à quelque chose encore plus éloigné et de plus petite taille mais contre plusieurs heures de transport par jour et en y sacrifiant ma famille.
Dernière précision : ce que vous avez interprété comme l'exaspération de voir le complot des nantis contre la populace n'était que l'expression de ma colère quand je vois où mènent le copinage, le lobbying et les réseaux de ceux qui devraient se soucier de la situation de tous et pas seulement de la leur. Enfin, du moins il me semble que c'est le rôle des élus.
Mais je n'ai pas dû être claire dans ma façon d'écrire.
Je comprend votre point de vue, mais ne le partage pas entièrement. Mais s'agissant d'un billet sur le statut du parquet, je préfère arrêter là , pour aujourd'hui, car nous "polluons" un site qui ne nous appartient pas, avec un débat qui ne porte pas sur le sujet initial.
Enfin, je suis très content de vous avoir présumée de bonne foi, puisque vous l'êtes manifestement, et vous souhaite une bonne fin de journée.
A vous aussi, bonne fin de journée.
« Mais dire qu’on leur a donné de l’argent relève soit de la méconnaissance, soit de la malhonnêteté (mais je vous présume de bonne foi, ne vous en faites pas). »
On ne leur a ni donné ni prêté . En effet ,on a fait mieux . Le gouvernement les a laissé disposer d’un argent imaginaire qui n’existe pas.
Si vous aviez une banque ,et que vous faisiez partie d’un club du Fouquet’s par exemple ou d’une de ses filiations , vous auriez eu droit à voir votre compte un certain minuit ,augmenter d’un chiffre avec des zéros à l’infini derrière. Un cadeau ,avec la bénédiction d’un Etat surendetté jusqu’au cou .Vous auriez eu droit en même temps de refacturer des envois de courriers par exemple à 1000% du tarif postal à vos clients et de multiplier au même pourcentage des prestations identiques à celles de certaines entreprises ordinaires qui ne s’appellent pas banques . Vous auriez eu droit à donner des consignes strictes à vos employés pour ne prêter aux clients que s’ils présentent des garanties avec un montant équivalent à la hauteur du prêt. Vous auriez même droit de jouer à la bourse et de régaler chichement ceux qui jouent dans votre salle . De l’argent dont vous disposez avec un taux défiant toute concurrence et il faut être vraiment taré pour ne pas le fructifier en si peu temps ou droitdelhomiste gaucho avec un cœur fragile pour se priver de dépouiller les petites gens. Bref ,vous auriez le droit de tuer , de dépouiller vos victimes et de rembourser l’arme du crime payée avec l'emprut. Tout dans une impunité totale. Vous auriez le droit de maintenir votre position dominante avec vos « concurrents » devant le client vache à lait ,puisque votre « prêteur » l'Etat refuserait la naissance de toute banque de proximité ou alternative qui risquerait de vous piquer votre clientèle à qui vous lui faites signifier sans cesse que vous vous porterez bien mieux sans elle. Aucun représentant de l’Etat « prêteur » ne siègerait à votre conseil d’administration .Vous ne signerez aucune charte de bonne conduite et vous disposez d’un argent pour lequel vous n’avez souscris aucune assurance ,pas un centime de payé à un assurence providenciel ,alors que vous avez le droit de faire payer une assurance obligatoire au prix fort l’élu à qui vous accordez vous-même un prêt ,le prêt classique .
Quand vous rembourserez ,l’Etat s’occupera de la com. ,convoquera la presse et dira : Vous voyez les banques remboursent leurs dettes. C'était pas un don aux banques, ce ne fût qu'un prêt !
Un lifting bancaire avec la peau et les entrailles dévorées des contribuables .
ça pue le sang tout de même.
En ce qui concerne la Grèce , il ne reste plus aux grandes entreprises bradées et dénationalisées dans toutes l’Europe dont la France ,que d’entrer dans l’arène pour faire des affaires. On dira à la Grèce que c’est pour lui rendre service ! Ainsi ,elle ne devra rien ,ni à l’Europe ni au FMI. Dans l'attente du pays suivant.