Nous entrons tous les trois dans la salle d’audience, elle est déjà là . Nous adresse un grand sourire, un peu intimidé, mais en nous regardant droit dans les yeux.
Je vois son avocate réprimer une grimace en nous voyant nous installer. Elle doit penser qu’elle a hérité d’une mauvaise composition, le Tribunal par lequel sa cliente sera jugée aujourd’hui en comparution immédiate étant constitué de trois juges par ailleurs parents d’enfants en bas âge. C’est d’ailleurs également le cas de la substitut qui soutiendra l’accusation.
La présidente vérifie l’identité de Jennifer, qui ressemble à une adolescente, fluette, minuscule, mais a en réalité 25 ans. Qui a deux enfants, et va devoir répondre de violences habituelles commises sur la plus jeune d’entre eux, âgée de six mois, ainsi que de privation de soins. Elle est d’accord pour être jugée aujourd’hui, ne veut pas de délai, “aime autant en finir tout de suite”.
On lui demande tout d’abord de nous parler d’elle-même, ce qu’elle fait de bonne grâce pour nous décrire, sourire hésitant aux lèvres et regard candide, une authentique vie de merde : elle n’a pas connu son père, qui a laissé tomber sa mère plusieurs mois avant sa naissance, et n’a jamais souhaité connaître leur enfant-accident. A dix ans, elle était régulièrement battue par sa mère, ne se rappelle d’ailleurs pas l’avoir vraiment aimée, encore moins avoir été aimée d’elle. Il lui semble avoir toujours attendu le moment où elle pourrait la quitter, et dès qu’elle en a eu l’occasion, à peine sortie de l’enfance, elle est partie vivre avec un garçon plus vieux qu’elle, puis un autre, puis la rue, les petits vols pour manger, les squats, la chienne qu’elle avait prise avec elle pour se protéger. Les arnaques pour soutirer quelques euros aux personnes âgées qui se laissent avoir plus facilement que les autres. Le sentiment de ne pouvoir faire autrement, aucun employeur ne pouvant vouloir d’elle, sans compétence aucune, sans formation, même pas le bac. La découverte de l’héroïne, prévisible.
La rencontre avec Kevin, toxico comme elle, l’a tirée de la rue. Ils sont tombés amoureux, suffisamment pour ne jamais se quitter, arrêter l’héro (plus ou moins), se marier et faire très vite un enfant, Styvie, désiré, dorloté, “la plus belle chose de sa vie”. Kevin la bat, occasionnellement, ou plus souvent lorsqu’il a un coup dans le nez, mais elle ne lui en veut pas. Elle n’a jamais déposé plainte contre lui, et même lorsque les coups portaient plus fort que d’habitude, avait tendance à se soigner à la maison plutôt qu’aller chercher les ennuis à l’hôpital. Ils avaient justement réussi à trouver une maison, presque un taudis, mais le leur, et à y vivre tant bien que mal, essentiellement des allocs, du peu que la famille de Kevin leur donnait parfois pour les aider, de jobs occasionnels et des coups de main des copains qui dormaient fréquemment chez eux pour quelques jours ou quelques semaines. Jennifer avait même commencé à se demander si elle ne pourrait pas obtenir une formation par le biais de l’AFPA ou autre, afin de travailler, enfin.
Et puis un jour, la catastrophe.
Styvie n’a que trois mois lorsque Jennifer tombe de nouveau enceinte. Elle ne s’en aperçoit que trop tard pour avorter, et se retrouve sans autre choix que de poursuivre cette grossesse non désirée, survenue elle ne sait trop comment ni quand – elle a ses règles trop rarement pour compter les jours, n’a de toute façon pas envie de se faire suivre. La seule chose qui l’intéresse, c’est de s’occuper de son fils et de son mari, pas de cette nouvelle vie à venir. Elle traverse donc sa grossesse davantage qu’elle ne la vit, attendant essentiellement d’être débarrassée de ce fardeau.
Elle accouche d’un minuscule bébé d’à peine plus de deux kilos, Samantha, et signe presque immédiatement une décharge pour quitter la maternité moins de 24 heures après la naissance, sans sa fille. “Le bébé, je n’avais pas envie de m’en occuper, il y avait plein de médecins pour ça, alors que mon mari et mon fils étaient tout seuls à la maison. Je ne peux pas me passer d’eux.”
Bizarrement, ce comportement maternel pour le moins atypique n’alerte pas suffisamment ceux qui en sont témoins pour les inciter à signaler les faits au Parquet. Les jeunes parents récupèrent leur fille, une semaine après sa naissance. Une assistante sociale sera désignée pour suivre le bébé dans le cadre de la PMI, si j’ai bien compris, mais l’enfant n’apparaîtra pas en danger avant son sixième mois. Au mois de février, une puéricultrice rend visite au couple et remarque quelques traces suspectes sur le visage et le cou du bébé, ainsi qu’une hygiène défaillante – ce dernier point concernant l’ensemble de la maisonnée. Elle relève également la prise de poids insuffisante de l’enfant, qui ne pèse pas quatre kilos. Elle prévient qu’une de ses collègues repassera dans la semaine, et quitte les lieux.
Quelques jours plus tard, la seconde puéricultrice signale après son passage ce qui lui a semblé être un hématome sur l’oreille de Samantha, et les services sociaux emmènent l’enfant à l’hôpital, avec l’accord du jeune couple, afin qu’un pédiatre réalise un check-up complet. Le médecin découvre une quinzaine d’hématomes répartis sur tout le corps, de multiples rougeurs et griffures, ainsi que plusieurs traces de brûlures de cigarette. Il remarque que l’enfant, malgré son très jeune âge, semble paniquée lorsqu’on l’approche, se débat et tremble au moindre contact.
Kevin et Jennifer sont placés en garde à vue, et elle reconnaît immédiatement … tout. Les gendarmes sont les premiers à remarquer la candeur et l’honnêteté avec lesquelles cette presque jeune fille leur raconte le calvaire traversé par son bébé durant ses six premiers mois de vie.
Depuis son arrivée au foyer de ses parents, Samantha passait ses nuits seule dans une chambre assez éloignée, tandis que son frère aîné dormait avec ses parents et la chienne que Jennifer avait gardée depuis ses années dans la rue. Détail sordide parmi des centaines d’autres : cette chambre était la seule à ne pas être chauffée, les autres pièces disposant de radiateurs électriques, “mais elle, elle avait ses couvertures, quoi, donc on se disait que ça suffisait”.
“Pourquoi avoir laissé votre nourrisson dormir seul dans sa chambre alors que tout le reste de la famille dormait dans la même pièce ?
– Parce que Styvie, je l’aime, c’est mon fils, il faut toujours que je sache qu’il va bien et qu’il est près de moi. Comme ça, s’il lui arrive quelque chose, un cauchemar ou qu’il est malade, je suis là .
– Et votre fille, vous ne vous en inquiétiez pas ? Vous n’aviez pas peur qu’il lui arrive quelque chose et de ne pas l’entendre, en pleine nuit ?
– Non, Madame. Elle allait toujours bien. Elle n’a pas vraiment été malade, depuis qu’elle est née.
– Si elle avait crié la nuit, vous l’auriez entendue ?
– Je crois … Mais de toute façon, Samantha n’a jamais vraiment crié la nuit, elle faisait déjà ses nuits à l’hôpital.
– Comment le savez-vous, puisque vous êtes tout de suite sortie de l’hôpital ?
– Ils me l’avaient dit quand on l’a reprise … Et puis j’ai bien vu qu’elle faisait de grosses nuits, dès qu’elle est arrivée à la maison.
– Vous préférez Styvie, ou bien vous aimez vos deux enfants de la même façon ?
– Je préfère Styvie, Madame, je vous le dis clairement. Lui je l’ai voulu, c’est mon fils, et je l’aimerai toujours. Samantha … C’est un accident, voilà . C’est pour ça que je n’avais pas envie de la garder près de moi.”
Sur question de ma part, Jennifer indique que Samantha réclamait environ quatre ou cinq biberons par jour, le premier à 9 heures, le dernier à 23 heures. Elle précise d’elle-même, comme d’ailleurs devant les enquêteurs, que n’ayant jamais eu plaisir à nourrir son bébé ni à la serrer contre elle, elle avait dès le premier mois pris coutume, pour le dernier repas du soir surtout, de lui “planter le biberon dans la bouche, en le calant avec une peluche, ou avec le bord du lit, ou une couverture” et de retourner se coucher. Elle nous assure qu’en général, Samantha se débrouillait pour boire ce dont elle avait besoin, et que de toute façon, elle avait peu d’appétit.
La vie s’est ainsi poursuivie pour Kevin, Jennifer, Styvie et Samantha, la dernière grandissant comme elle le peut, aux bons non-soins de sa mère en journée, pendant que Kevin effectue des missions d’intérim ou joue sur console avec ses potes, et bénéficiant tout de même des câlins de son père le soir. Kevin est le seul à s’amuser avec sa fille (“Lui, il en était fou, de sa fille” nous dit Jennifer), à la bercer, et à la nourrir lorsqu’il y pense. Il dira aux gendarmes qu’il n’aurait jamais imaginé que Jennifer ne prenne pas soin de la petite comme elle l’avait fait pour Styvie.
Cependant, Kevin ne baigne jamais Samantha, ni ne la change. Ce sont des tâches qui ne lui plaisent pas trop, et qu’il estime incomber, après tout, à son épouse au foyer plutôt qu’à lui. C’est en tout cas ainsi qu’il explique ne pas avoir vu les marques.
Lorsqu’on demande à Jennifer d’où viennent les multiples traces de violences découvertes sur le corps de son bébé, elle explique très simplement qu’un beau jour, énervée d’entendre Samantha pleurer et crier, elle est allée la voir dans sa chambre, furieuse, et l’a giflée. La petite fille s’est arrêtée, ou en tout cas a baissé d’un ton, tandis que sa mère y trouvait … une sorte de soulagement, elle ne sait pas trop de quoi …
A compter de ce jour, Jennifer reconnaît n’avoir pratiquement pas passé une journée sans frapper sa fille. Violemment.
“Parce qu’elle pleurait ?
– Oh non, pas forcément. Quand je la changeais, je la griffais, je la tapais. Des fois, j’y allais exprès, je faisais semblant d’aller voir comment elle allait, et je la frappais au ventre, dans le dos, je la pinçais … Et après, j’étais mieux. Mais je faisais toujours attention de ne pas la frapper au visage, parce que je me disais bien que Kevin allait me battre s’il s’en apercevait.
– Et l’assistante, sociale, la puéricultrice ? Vous ne vous doutiez pas qu’elles s’apercevraient que cette enfant était maltraitée ?
– Ben non Madame, je n’y ai pas pensé.”
Et de fait, jamais Jennifer n’a empêché les services sociaux d’accéder à son enfant, ni n’a tenté de leur cacher ses conditions d'”éducation”. Entre deux visites (peu fréquentes, il faut l’avouer), les coups reprenaient, subrepticement.
“Quel genre de coups ?
– Ca dépendait des fois, des coups de poing des fois, dans le ventre … Le plus souvent, je la pinçais, ça c’était tous les jours. Elle pleurait un peu, mais au bout d’un certain temps, plus beaucoup.
– Vous l’avez brûlée avec des cigarettes ?
– NON ! Ca, je ne l’ai jamais fait !
– Comment expliquez-vous alors ces petites cicatrices rondes, si caractéristiques ?
– Je n’en sais rien, mais je ne l’ai jamais brûlée, je l’ai dit aux gendarmes. Ca doit être sa peau qui s’est irritée, elle a toujours des boutons et des infections, les bébés c’est comme ça, de toute façon …
– Pourquoi faisiez-vous ça ?
– Au début, c’était quand elle m’énervait, et puis petit à petit, c’était tout simplement quand j’étais énervée, ça me calmait. Et puis des fois, vers la fin, je me suis mise à revoir ma mère à moi, quand elle me frappait, j’avais l’impression de l’entendre qui m’encourageait, qui me disait : “Vas-y, elle l’a bien cherché, elle le mérite, tu as le droit, tu es sa mère !” et je ne pouvais plus m’arrêter … Pourtant, je savais bien que ce n’était pas vrai, qu’on ne doit pas faire ça à un bébé normalement, mais je ne pouvais pas m’en empêcher.
– Vous avez déjà fait du mal à Styvie comme vous en avez fait à Samantha ?
– NON ! C’est mon fils, je l’aime, et lui, je ne lui ferai jamais de mal.
– Mais Samantha, c’est votre fille ?
– (haussement d’épaule) Oui.
– Et qu’est-ce que vous pensez de ce que vous lui avez fait ?
– C’est horrible, je le sais … Mais je ne pouvais pas m’en empêcher, même si je savais que c’était pas bien, et pas juste, et que j’allais bien me faire attraper un jour …
– Pourquoi lui avoir fait du mal à elle, et pas à lui ?
– Madame, je l’ai toujours dit, ils sont tous les deux mes enfants, mais je le préfère lui, largement. Et je ne pourrai jamais le faire souffrir, lui. D’ailleurs, un jour, il m’a vue en train de frapper sa soeur, et je l’ai vu qui me voyait, planté là avec de grands yeux, et quand j’ai réalisé ce qu’il devait penser de moi, je me suis arrêtée tout de suite et je n’ai plus touché à Samantha de la journée.”
Styvie a bien entendu été examiné, à son tour, par un médecin, qui n’a relevé aucune trace de quelque violence que ce soit. Son état de santé est normal, son niveau d’éveil aussi.
Intrigué, au cours de sa garde à vue, par la franchise de Jennifer quant aux faits gravissimes qu’elle reconnaissait, le parquetier de permanence a ordonné une expertise psychiatrique avant son défèrement. L’expert a relevé divers troubles du comportement, comme on pouvait s’y attendre, ainsi qu’une grande confiance en autrui, qui la pousse à s’exprimer avec cette candeur pour le moins désarmante, sans qu’il semble lui venir à l’esprit de dissimuler une partie des faits pour apparaître sous un jour plus favorable. Il l’a jugée entièrement responsable de ses actes.
Son casier judiciaire est vierge de toute condamnation. Et les vols dont elle nous a parlé tout à l’heure ? “Je ne me suis jamais fait prendre” nous dit-elle simplement.
Les deux enfants ont fait l’objet d’une ordonnance de placement provisoire dès le placement en garde à vue de leurs parents, et seront suivis désormais par un juge des enfants. Cela inquiète un peu Jennifer, qui nous demande, lorsqu’on lui donne une dernière fois la parole, quand elle pourra revoir Styvie, et s’il va retourner vivre bientôt avec son père, qui est dans la salle. La présidente lui répond que ce n’est pas forcément à l’ordre du jour, que le juge des enfants va devoir travailler avec Kevin pour voir si le petit garçon peut retourner en toute sécurité vivre auprès de lui, et qu’il est possible, eu égard à la décision que nous allons prendre, qu’elle ne revoie pas son fils avant plusieurs mois.
De grosses larmes tombent sans bruit des yeux de Jennifer.
L’avocate du Conseil général, qui a été nommé administrateur ad hoc de Samantha, plaide très brièvement, rappelant, bien évidemment, la souffrance quotidienne qu’a vécue l’enfant durant les six premiers mois de sa vie. Elle demande un renvoi sur intérêts civils avec désignation d’un expert aux fins de déterminer l’ensemble des préjudices subis par le bébé des mains de sa mère.
Le Parquet prend ensuite la parole, rappelle chaque fait, chaque coup, chaque biberon abandonné à portée de ce bébé de deux mois sans que l’on se préoccupe de savoir s’il le finit, s’il ne s’est pas étranglé en déglutissant mal, chaque hématome relevé par le pédiatre. L’hygiène désastreuse, les chairs du cou rongées par une mycose, les traces qui ne peuvent correspondre qu’à des brûlures de cigarette, la maigreur. La peur d’être touchée, d’être approchée, même. Le fait qu’au cours de trois jours ayant séparé son examen médical du défèrement de sa mère, Samantha a grossi de 300 grammes, démontrant ainsi son état de malnutrition antérieur.
La gorge nouée, le Parquet requiert quatre ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt.
Son avocate défend ensuite Jennifer, axant sa plaidoirie sur la pauvre vie qui a été la sienne jusqu’à sa rencontre avec Kevin, son jeune âge, sa panique lors de la grossesse non désirée, son absence totale de repères éducatifs, les violences qu’elle a elle-même subies de sa mère et n’a fait que reproduire.
La parole est enfin donnée à Jennifer, qui nous demande, avec un sourire plein d’espoir, de ne pas l’empêcher trop longtemps de voir son fils et son mari “même si je sais bien que vous allez me mettre en prison, c’est normal vu ce que j’ai fait, il faut que je paye.”
A l’issue du délibéré, elle est condamnée à une peine de quatre ans d’emprisonnement, dont deux avec sursis assorti d’une mise à l’épreuve pendant trois ans, comprenant notamment une obligation de soins, le tout avec mandat de dépôt.
Jennifer ouvre de grands yeux pleins de larmes, hoche la tête, nous dit “Je comprends, merci”, sourit une dernière fois et quitte la salle entre trois gendarmes, envoyant au passage un baiser à son mari.
[EDIT : je viens d’avoir des nouvelles de Samantha, qui va bien, et voit son père deux fois par mois. Par ailleurs, je ne l’ai mentionné qu’en commentaire et non dans le texte, mais le Tribunal a prononcé à l’encontre de Jennifer la déchéance de son autorité parentale sur Samantha.]
(même pour des grossesses découvertes tardivement, où nous renvoyons à l'étranger)
Ce billet me conforte dans l'importance de cette possibilité.
Définitivement non, je n'aurais jamais pu faire votre métier (heu, sacerdoce plutôt non?). Jouer la balance (de Roberval s'entend, pas le délateur ) entre les éléments à charge et à décharge, dans un cas comme celui-là, brr... j'en ai des frissons que de l'imaginer.
Et, comme d'autres, le truc qui m'interpelle quand même profondément, c'est que personne n'ai "tiqué" suite à l'attitude de Jennifer à la maternité: j'accouche, j'me barre et je reviens une semaine après récupérer mon enfant... D'ailleurs je ne pensais même pas cela possible.
Encore bravo pour vos billets, Marie (même si je commente douze mille ans après ).
Cette histoire est triste et touchante à la fois, merci de l'avoir racontée.
Les services sociaux n'auraient-ils pas dû enquêter plus tôt, et faire en sorte de placer ce bébé non aimé ?
On devrait pourtant savoir que l'amour est nécessaire à un bébé, et qu'il n'est pas automatique. La conduite de la mère à la maternité aurait dû alerter. Pour moi, la société est plus responsable que la mère, qui vit dans un tel contexte que oui, je pense qu'elle ne peut s'empêcher de maltraiter, et qu'elle n'est pas non plus capable de demander de l'aide (en a-t-elle jamais reçu ?)
C'est pas trop du jeu, là ! :((
On attend depuis des mois la fin d'histoires noires, si vous avez trop de travail je comprends Maître, mais alors vous avez qu'à dire à Marie de l'écrire comme ça on vous "embêtera" plus !
PS : je vous ai vu à la télé dans "La France a peur", vous êtes sexy comme avocat, le mien aussi il est trop beau mais lui c'est un ange alors... ! :))
Et je me demande pourquoi certains sont armés à la naissance pour résister à la reproduction de schémas familiaux et d'autres pas. La conscience, la lucidité, sont forcément les outils pour ne pas reproduire, mais d'où viennent donc celles-ci... et pourquoi sont-elles distribuées de manière aussi aléatoire.
Bien sûr je n'attends pas de réponse à cela, c'était juste une réflexion qui me taraude depuis longtemps.
Je vois d'autres facteurs :
- Certaines mères, mêmes monstrueuses, aiment cependant leur enfant, d'une certaine façon. Elles vont réussir à le lui montrer, parfois. Ce qui, sans "compenser", rattrape un peu les dégâts
- Certains enfants mal aimés et/ou maltraités vont faire des rencontres. Pas forcément des gens qui savent ce qu'ils vivent, mais qui les aideront (prof sympa qui leur ouvrira des "fenêtres" sur un avenir possible, voisine aimante qui jouera les mamies de substitution...). D'autres n'en feront pas.
...
2 histoires d'enfants mal aimés ne sont jamais identiques, 2 mères violentes et méchantes ne sont pas pareilles... Chaque cas est particulier.
Ensuite, je pense qu'il y a aussi une capacité de résilience, une capacité à penser son propre avenir, à se dire que tout n'est joué, qu'on a toujours une chance... et que cette capacité est propre à chacun.
Même si mon questionnement intérieur reste ouvert par rapport à cela. La capacité de résilience dépend justement d'un éventuel entourage.
Et je pensais à des cas quasi idendiques, par exemple des enfants de même famille, ayant subi les mêmes choses.
Et lorsqu'il n'y a pas d'entourage du tout, pour compenser ceci ou cela et donc une résilience à laquelle je ne crois pas trop, comme vous dites, cette capacité à s'extraire d'une situation donnée, ou d'un schéma reproducteur est propre à chacun. C'est justement ça que je voudrais comprendre, qu'est-ce qui fait que...
Cela m'aurait intéressé d'avoir un résultat de recherche génétique là -dessus. Les émotions, leur gestion, étant tellement dépendantes de la capacité des neuro-transmetteurs à se mettre en mouvement ou pas...
Qu'est-ce qui fait qu'une victime va se dire : Non, pour rien au monde, je ne voudrais ressembler à ces gens là ?
Est-ce de l'ordre purement neuro-biologique ? Est-ce de l'ordre de ce que l'on appelle l'âme ? Deux âmes différentes, pour autant que l'on admette que cela existe, auront forcément des réactions différentes, de par leur vécu au delà du temps. Ceci pourrait-il être mesurable sur le plan génétique ?
Que de questions qui ne trouveront pas de réponse avant que je ne quitte cette planète
La seule chose qui est sûre pour moi, c'est que j'aurais été incapable de juger cette affaire, ni de la défendre. Et je trouve assez courageux, dans une société où ma foi, le Tribunal est un passage obligatoire, de prendre le risque d'émettre un jugement ou de défendre des cas, qui vont inévitablement faire se poser la question une vie durant : Ai-je bien fait ou pas ?
J'en viendrais presque à regretter les anciens "tribunaux" africains, où tout le village était présent en cas de conflit, où tout le monde avait le droit de participer, où la victime ou le coupable pouvait donner son point de vue et où le verdict était très rarement de l'exclusion, ou alors temporaire et où tout le monde avait pardonné une fois le verdict posé. La résilience c'est aussi cela, c'est une résilience collective, ce n'est pas unidirectionnel.
Aujourd'hui, les personnes jugées, restent des personnes jugées à vie.
qui apporte un éclairage intéressant sur ce sujet
j'avoue que pour moi Jennifer s'est retrouvée "coincée" : pas les moyens (soutien, suivi psy, etc...) d'analyser ce qu'elle avait vécu enfant et ce qu'elle risquait de projeter sur un enfant, et surtout sur une fille non désirée
pas les moyens non plus (du fait de son mari en particulier) d'abandonner sa fille et de la confier à quelqu'un moins abimée qu'elle même
Non ?
Bah, j'aurai essayé...
Même si je suis seule dans ce cas sur ce blog, je n'arrive pas à trouver la peine trop lourde
C'est difficile, mais il faut garder une vue d'ensemble: quoiqu'il arrive, Jennifer sera toujours la mère de Samantha (au moins d'un point de vue psychologique, même si ce n'est plus vrai du pont de vue légal). Quoiqu'il arrive, Jennifer aura une vie après la prison. Quoiqu'il arrive, Jennifer sera toujours la mère de Styvie. Une peine adaptée doit prendre en compte ces 3 éléments, quelle que soit l'horreur des faits.
Ben non , je ne vois nulle part qu'elle soit déchue de l'autorité parentale ,et pas non plus question de tutelle , ni d'incapacité de la mère .
Le tribunal (ou le J.E.) ont apparemment statué sur le droit de garde , ce qui est un peu différent .
Donc sacré boulot à faire pour préparer la sortie de détention , foultitude d'intervenants sociaux et judiciaires ( pas toujours d'accord ) autour de cette famille .Lourde , très lourde prise en charge .
Plusieurs générations qui se sont succédées pour arriver à cette misère , il en faudra peut-être plusieurs pour réparer .
Il y a aussi heureusement de merveilleuses familles d'accueil qu'on oublie un peu et qui aident à reconstruire .
Je suis à la retraite , bien content d'avoir pris un peu de distance avec cette douleur et cette misère qui ne m'a pas laissé indemne , et ma part de masochisme à suivre ce blog ...
Merci Marie , de nous retourner les tripes comme ça , on ne risque pas de s'endormir .
A titre personnel, je pense que c'en était. Et que leur auteur a été condamné à ce titre, notamment.
Je ne sais pas si c'est positif : elle ment, donc il y a une part d'horreur qui est moins évidente pour elle que le reste, et qui peut-être laissera place au remords,
ou négatif : rien de tout ça, mais elle sait juste (objectivement, comme elle savait que ce n'était pas bien tout en continuant) que c'est trop mal vu, et que ça ne passerait vraiment pas. Et il ne reste que l'horreur du geste, qui va au-delà du besoin pathologique et irrépressible de punching ball (que je ressens à la lecture de votre récit et qui, même s'il n'excuse rien, ressemble sur ce point à une addiction) pour se transformer en cruauté.
J'aurais tendance à penser le contraire - il me semble que ceux qui jugent le plus sévèrement le comportement des parents (et donc la maltraitance) sont justement ceux qui n'en sont pas. Les autres savent à quel point c'est dûr, de s'occuper d'un enfant.
Si votre raisonnement est exact (et il est assez séduisant), on juge à partir de grands principes abstraits lorsque l'on n'a pas d'enfant.
Mais n'est-ce pas le rôle du juge? Juger en toute impartialité, c'est selon moi éviter de s'identifier aux parties. L'impartialité présuppose l'objectivité. Faut-il avoir tué pour juger un meurtrier convenablement? Non, l'empathie au point décrit par QIAH, c'est le règne du subjectif et ça me paraît abolir tout objectivité, comme elle le ressent et vous le décrit.
Or, être objectif n'est pas nécessairement être trop sévère : dans les grands principes qui doivent guider le jugement, il existe aussi la prise en considération de la personne et de son contexte. L'écoute est une qualité pimordiale, elle induit la capacité à se représenter la situation de la personne sans se mettre soi-même à sa place.
Juger à l'aune de "nos personnes dans la même situation", ça me paraît mauvais. Et ça laisse la porte ouverte aux jugements les plus divers en fonction de l'image que l'on se fait de soi et en fonction de ses qualités personnelles.
On n'est pas soi-même la mesure, le standard de l'homme raisonnable ou du citoyen normal respectueux des lois.
En outre, raisonner de la sorte conduit à être miséricordieux lorsque vos principes vous guident dans cette voie. Nombre de mères, au contraire, réagissent en vouant aux gémonies celle qui a touché ainsi à son enfant. D'ailleurs, ayant vécu les difficultés de la maternité, elles n'ont pas maltraité... pourquoi excuser celle qui l'a fait de manière véritablement brutale et extrême?
Lorsqu'on voit les réactions des assocs de victimes ou de l'opinion publique aux crimes odieux, on peut douter de votre conclusion sur la magnanimité de la personne qui réagit avec ses tripes plutôt qu'avec la loi seule.
D'ailleurs, j'en veux pour preuve le comportement des codétenues de mères incarcérées pour avoir maltraité leurs enfants. Les difficultés, la galère, la violence, elles connaissent, mais ça elles ne pardonnent pas.
J'attends mon premier bébé pour dans 2 mois, et j'ai le sentiment que la compassion est toujours là , peut-être amplifiée parce que je sais à quel point une grossesse peut être vécue de façon ambivalente, à quel point le poids des responsabilités vous tombe dessus, à quel point une grossesse, même idéale sur le plan de la santé, et désirée, est fatigante et pesante parfois.
Je fais partie des privilégiés, si je n'arrivais pas à établir de contact avec mon bébé, je consulterais, j'ai un compagnon qui est prêt à être père et qui est attentif, un entourage bienveillant...
Elles font quoi, celles qui n'ont pas tout ça, quand tout n'est pas rose et qu'elles traînent des casseroles ?
J'aurais toujours beaucoup beaucoup beaucoup de compassion pour Véronique Courjeault, Jennifer, leurs famille (autres enfants et maris, grands oubliés de l'histoire, souvent) et leurs enfants. L'amour est un coup de chance et n'est pas automatique. L'instinct n'est qu'une vaste fumisterie destiné a faire plaisir au femme qui le ressente (moi par exemple) et culpabiliser celle qui ne le ressente pas. Et quand ça "ne marche pas" on fait quoi ?
A nous (femmes et hommes) de savoir être solidaires de ces femmes là .
Souhaite du fond du coeur une meilleure vie à la petite et à son p'tit frérot...
Sur le reste, concernant la mère, la Justice est passée, no comment.
@Marie
Merci pour le billet.:)
Et merci aussi pour vos réponses aux différents commentaires, qui représentent une valeur ajoutée non négligeable à l'article.
Je vous souhaite une bonne continuation, et du courage en attendant de vous relire impatiemment ( puisque cher Mô semble nous délaisser ^^
)
Pas d'inquiétude, Mô travaille à son retour - moi, je comble en l'attendant ...
Allons, abat la modestie, J'attends ( et je ne suis pas le seul ) vos billets de la même façon que j'attends ceux de Mô. C'est à dire impatiemment. Vous illuminez clairement notre quotidien du web ! C'est d'ailleurs, la force de ce blog, de ne pas être dépendant entièrement aux aléas ( naturels ) de la seule vie de Maitre Mô.
Donc Merci encore, et n'ayez pas peur d'assumer votre ( nouveau ? ) statut sur ce blog ^^
Et n'hésitez pas à donner des nouvelles de la petite, au cas où vous en auriez.
++
Puisqu'elle part de l'hôpital sans elle, elle aurait pu simplement ne pas revenir.
Comment savoir
Elle a été indifférente après la naissance, et aurait dû être psychologiquement suivie, c'est certain. Cela aurait pu éviter beaucoup de dégâts, et pas seulement en ce qui concerne Samantha. Mais socialement, elle était suivie. Et c'est ce suivi même qui a permis le "sauvetage" de la petite fille. Quid si ses parents avaient été des bourgeois bien sous tous rapports, sobres, instruits, avec un travail stable ? Peut être la "chance" de cette petite fille mal-aimée a-t-elle été de naître dans une famille "connue des services sociaux", et non avec une cuillère d'argent dans la bouche...
C'est ce que je me suis dit aussi.
La maltraitance dans les familles "bien-sous-tous-rapports" a ceci de terrible qu'elle demeure camouflée et perdure.
Par contre, quand vous dîtes pourquoi lui aurait-on proposé d’accoucher sous X, à cette jeune femme ? Parce qu’elle était pauvre et que son bébé n’avait pas été "programmé. Euh non, parce qu'elle ne voulait pas ce bébé et qu'elle n'y était pas attachée, c'est tout.
Pour le reste, entièrement d'accord avec vous sur l'absence de talent divinatoire du personnel hospitalier.
Quant à la "pension" (suisse ou pas), elle est plus un moyen d'éviter que les "gosses de riches" se mêlent au peuple que de se débarrasser de leur présence. De plus, la pension, ce n'est pas quand l'enfant a six mois qu'on peut l'y envoyer, mais bien plus tard (en général, à l'âge du collège). Un enfant martyr a tout le temps d'être détruit avant de pouvoir y trouver sa place.
Lorsque vous dites qu'il serait nécessaire que Kévin approuve la naissance sous X, voulez-vous dire que son accord serait obligatoire ? J'avais cru comprendre qu'une femme, même mariée, pouvait accoucher sous X sans l'accord du père. Peut-être vouliez-vous simplement dire qu'il fallait qu'il l'approuvât au sens où il aurait pu s'étonner que sa compagne parte accoucher et revienne sans l'enfant et lui fasse payer les conséquences de cet abandon ?
- Mais où étais-tu passée ? Je t'attends depuis des heures... Mais... tu as maigri...
- J'étais à la maternité.
- Et le bébé ? Il est où, notre bébé ?
- J'en voulais pas. Je l'ai donné à l'adoption. Peu importe ton avis. Peu importe si tu l'aimais. J'avais le droit.
- .....
Il va dire quoi, Kevin (ou Pierre-Antoine, d'ailleurs, mais, bizarrement, personne n'imagine Bénédicte faire ce coup-là à Pierre-Antoine) ? Viens dans mes bras, que je t'embrasse ?
Vous me faites rire ! Et j'en ai honte !
Mais sur le fond, une femme mariée peut effectivement accoucher sous X, rien ne l'en empêche.
Terrible de souffrance pour la petite Samantha qui démarre dans la vie avec six mois de violence, sans compter ceux qu'elle a subis dans le ventre de sa mère.
Je crois qu'il n'y a rien de plus horrible qu'une mère qui dit pincer sa fille parce que cela la soulage de ses propres maux.
Mais c'est également terrible pour la mère, malgré tout.
Elle qui n'a rien connu d'autre que la violence et qui se retrouve face à un enfant dont elle ne voulait pas.
Et elle ne sait pas quoi faire, elle n'en veut pas mais c'est la sienne donc que faire d'autre?
Personne ne lui a appris, ne lui a montré, personne ne l'a aimé sauf son petit garçon.
C'est triste. Il n'y a pas d'autre mot.
La triste vie de Samantha n'excuse pas les violences sur sa fille mais elle en explique l'origine.
La peine est effectivement sévère mais juger n'est pas chose aisée.
J'ai fait avocate, je n'aurais pas pu être magistrate.
Le coup de la gosse qui panique et tremble au moindre contact, je crois que c'est ça qui m'a achevé, finalement plus que la description des violences. J'ai pensé à mon bébé d'un an, si rieur et si ouvert et je l'ai imaginé dans cet état....
Bonne chance à toi petite, tu vas en avoir besoin.
A côté, les images d'hématomes et de blessures diverses étaient presque anodines ...
1/ Quelle peine maximum risquait Jennifer en correctionnelle ? 5 ans (Article 222-14) car ITT < 8 jours ?
Maitre Mô trouve la peine prononcée sévère pour une personne ayant tout avoué si candidement. Mais bon, la particulière vulnérabilité de la victime a dû beaucoup jour.
2/ Aurez-vous, avez-vous des nouvelles de Samantha ?
3/ Que va-t-il arriver au père ?
Qu'il ne voit pas les traces sur le corps car il ne va pas s'abaisser à laver / changer sa petite fille par machisme passe encore...
Mais qu'il ne s’étonne pas que la petite dorme dans une pièce sans chauffage alors que lui, , cela dénote un sens particulier de l'amour d'un père pour son enfant.
Ce qui m'a choqué le plus dans ce récit c'est que de façon constante, Jennifer semble dénier le statut d'être humain à sa fille.
Si elle aime alors elle va choyer, si elle n'aime pas, alors elle va maltraiter.
J'espère pour son jules qu'elle va toujours l'aimer, sinon il risque direct le bouillon de onze heures !
1/ L'ITT de Samantha était de quinze jours : dix ans, donc.
2/ J'ai eu de ses nouvelles quelques semaines après : elle était encore en observation à l'hôpital (elle y est restée plus d'un mois), mais sa santé était excellente, sa prise de poids considérable, et elle commençait dès les premiers jours à prendre confiance en ceux qui la soignaient, manifestant notamment un certain plaisir à être baignée.
3/ Kevin (dont il m'avait aussi semblé pour le moins curieux qu'il ne note pas la situation de la chambre, ni ne retrouve jamais le biberon laissé toute la nuit dans le petit lit, entre autres) a été poursuivi et condamné pour les violences exercées sur Jennifer. Il a dès le début sollicité un permis pour voir sa femme au parloir, et attend impatiemment sa sortie.
Il s’agit de la période pendant laquelle la victime est dans l’incapacité d’effectuer les actes de la vie courante (manger, dormir, se laver, s'habiller, faire ses courses, se déplacer, se rendre au travail).
Elle ne correspond en aucun cas à un arrêt de travail (il est donc possible de déterminer une ITT pour un enfant, une personne âgée ou un chômeur). Il y a incapacité aux occupations quotidiennes.
Elle est nécessaire pour l’évaluation des préjudices de la victime au plan judiciaire.
(source : http://www.avocatpenal.com/incapacite-temporaire-travail-itt.php)
En clair, il s'agit d'évaluer le préjudice subi, que la victime travaille ou non, qu'elle soit déjà autonome ou non (Samantha est de toute façon incapable de s'habiller, manger seule etc. du fait de son âge).
Peut-être a-t-il remarqué que sa femme maltraitait la petite. En tout cas, il n'a pas pu ne pas remarquer qu'elle la traitait différemment de son frère. Qu'elle l'aimait moins, voire qu'elle ne l'aimait pas. Mais outre qu' appeler les flics ou les services sociaux n'est facile pour personne, et sans doute encore moins pour un (ex ?) toxicomane passablement violent que pour vouzémoi, il y a de fortes chances qu'il ait pensé ce qu'une majorité de personnes pensent quand une mère n'aime pas son enfant : ça viendra avec le temps, elle finira par s'habituer à Samantha, parce que c'est une maman (et même une bonne maman), et qu'une maman, ça aime son enfant. Ca ne peut pas ne pas aimer son enfant. C'est la voix du sang. L'instinct maternel.
Mais sur Kevin, par contre, qq questions:
- l'a-ton poursuivi pour non-assistance à personne en danger ou n'a-t-il jamais été inquiété?
- qu'il ne baigne jamais et ne change jamais son enfant, j'ai du mal mais soit.
Par contre, n'a-t-il pas remarqué les réactions de stress du bébé? Ou celui-ci réagissait-il différemment vis-à -vis de son père?
- a-t-il été la voir à l'hôpital?
Et une question générale: dans ce genre de cas de maltraitance, on peut condamner le parent "délinquant" à un suivi psychologique, mais jamais son conjoint qui n'a rien vu (sauf dans le cadre du suivi social)... N'est-ce pas un peu frustrant?
Ici dans le cas de Kevin, j'imagine qu'il a pu être possible de passer par ses délits de violence vis-à -vis de Jennifer... mais j'imagine que ça ne doit pas toujours être le cas.
- Des papas qui considèrent que "c'est à la maman" de changer et de baigner le bébé, il y en a des tonnes. C'est peut-être une attitude "has been", mais elle perdure. J'en connais quelques uns de l'âge de Kevin, qui agissent et réagissent comme leurs pères (mon ex-mari n'a jamais baigné ni changé les enfants) et leurs grand-pères (mon père non plus).
- Jennifer reconnaît elle-même qu'elle faisait tout pour que son mari ne remarque pas qu'elle maltraitait leur petite fille (par peur qu'il la frappe. Ca veut dire qu'elle pensait - ou savait - qu'il la frapperait s'il avait appris qu'elle battait Samantha. Donc que Samantha comptait pour lui, même s'il n'était pas le père idéal).
- Le conjoint peut "ne pas voir". La maman de Jade (et elle n'est pas seule dans le cas) n'a pas vu non plus que son compagnon violait sa fille. Peut-on l'accuser de "non assistance à personne en danger" pour autant ?
- Jusqu'à nouvel ordre, ce n'est pas Kevin qui martyrisait Samantha. C'est Jennifer. Elle a de nombreuses circonstances atténuantes, mais c'est elle, et non son mari, la coupable.
Le père de Samantha n'était visiblement pas un père exemplaire, pas plus qu'un mari exemplaire. Peut-être peut-on considérer comme "machiste" qu'il ne change pas les couches de la petite (il ne changeait pas celles du gamin non plus), mais jusqu'à nouvel ordre, ne pas changer les couches d'un bébé ne fait de personne un père indigne. Les pères dont je parlais plus haut sont peut-être "macho" et démodés, mais pas indignes.
Jennifer savait que son mari ne s'occupait pas de la toilette de leur fille, et elle jouait là dessus pour lui cacher la maltraitance. Lui cacher. Jennifer est peut-être naïve, elle n'est pas pour autant idiote : elle savait qu'il prendrait mal le fait qu'elle maltraite Samantha.
Il y a quelque chose qui me gêne dans cette volonté d'impliquer le père à tout prix, dans cette affaire-ci comme dans celle qui est jugée actuellement aux assises de Mons. Comme si une femme, à fortiori une mère, ne pouvait être seule responsable (avec des circonstances atténuantes, vu son propre passé d'enfant martyr) des souffrances infligées à un enfant, comme si le père devait d'office avoir sa part de responsabilité "juridique". Il a une responsabilité, certes, mais elle est, me semble-t-il, de n' "avoir pas vu" (peut-être parce qu'il se voilait la face), pas de "n'avoir pas agi".
Même sans changer les couches ou baigner son bébé, même si la mère fait tout pour cacher la maltraitance, un bébé qui tremble et tressaille quand on l'approche (et il la câlinait, dit Marie), une chambre non chauffée en hiver, ça peut susciter des questions, non?
Cela ne retire rien à la faute de Jennifer, mais ce n'est pas non plus parce qu'une mère indigne le cache que le papa ne verra nécessairement rien...
Il me semble que la non-assistance à personne en danger consiste à laisser faire alors que l'on connaît le danger. On n'a juste pas envie - ou peur - de se mouiller mais on voit bien qu'autrui a besoin de secours.
Quelqu'un qui est aveuglé (et non qui "s'aveugle", ça sous-entendrait qu'il ne veut pas voir), qui ne voit rien alors que ça devrait lui sauter aux yeux mais aussi parce qu'il a quelques raisons de ne pas percevoir le danger, n'a pas fait le CHOIX, INTENTIONNEL, de laisser filer.
Je suis eprsonnellement très attachée au caractère intentionnel de l'infraction, et il me semble que pour ce type d'infractions il est encore requis.
Visiblement, dans leur famille, s'occuper des enfants est le rôle de la mère. Mais attention sur ce point : ne pas rendre le père responsable des manquements de la mère ne veut pas dire que l'on valide cette répartition. Simplement, c'était leur choix, encore souverain (Dieu merci!), et la seule personne qui a pris l'initiative de maltraiter l'enfant est bien la mère, si leurs dires sont vrais.
Si Kevin pensait que Jennifer savait ce qu'il fallait faire pour les enfants, ce que la bonne santé de Styvie pouvait lui laisser penser, sans doute pensait-il qu'elle prendrait les bonnes décisions.
Certes, il est coupable d'avoir maltraité Jennifer, ce qui n'a pas dû arranger le comportement de cette dernière même s'ils s'aiment. Si celui qui vous aime vous bat, comment traiter celui qui l'on n'aime pas? Son bébé par exemple? Et comment, dans ces conditions, dialoguer?
Il aurait dû également remarquer l'absence de chauffage de la chambre. Quant au biberon, le matin, peut-être est-ce Jennifer qui s'occupait de sortir les enfants du lit?
Mais si la répartition des tâches était celle qu'elle semble avoir été (tout d'un côté, rien de l'autre), alors lui n'a apparemment pas cherché à maltraiter l'enfant et il ne devrait pas prendre une part du fardeau judiciaire par une simple pétition de principe ou au nom de la morale.
Je note enfin qu'il ne s'agit pas de reprocher à la mère de mal s'être occupée de l'enfant, auquel cas votre remarque sur la co-responsabilité serait pertinente. On lui reproche des actes positifs et individuels de maltraitance, dont il est avéré qu'elle les cachait à son mari.
Et comment fait-on la différence entre quelqu'un qui n'a fait que "ne pas voir" et quelqu'un qui "n'a pas agi"?
Mais il ne l'a pas compris. C'est de l'ignorance, de la bêtise à la limite, mais il ne serait pas décent de condamner quelqu'un pour ça.
La présomption d'innocence - en l'absence de preuve du contraire on doit estimer qu'il ne savait pas. Dans le cas présent, l'ingénue Jennifer le dédouane. Pourquoi ne pas la croire?
Mais il ne l’a pas compris. C’est de l’ignorance, de la bêtise à la limite, mais il ne serait pas décent de condamner quelqu’un pour ça
C'est très souvent, comme je l'ai dit plus haut, "se voiler la face". Se voiler inconsciemment, involontairement la face. Kevin est probablement incapable de concevoir mentalement que sa gentille Jenny, celle qui s'occupe si bien de leur Styvie, maltraite Samantha. Ce genre de "réaction" (ou de non-réaction), je l'ai rencontré plusieurs fois dans ma vie : la mère qui ne voit pas - qui ne voit réellement pas - que son petit garçon est violé par son beau-père, les parents qui ne se rendent pas compte - qui ne se rendent réellement pas compte - que leur fils si sage (!) se pique à l'hérouïne sous le toit familial, ou que leur fille "si sérieuse" a déjà subi plusieurs avortements. Je ne parle pas là de gens indifférents (même si je leur ai souvent reproché de l'être, ils ne l'étaient pas), de tox paumés et immatures à la Kevin, mais de personnes qui aurait pu être, qui étaient souvent, présentés comme des parents exemplaires, et qui étaient persuadés de l'être.
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