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Cyber Grand-Messe en ut Mineurs…

Je ne comptais pas vous parler une fois de plus d’un homme, d’une histoire, dont j’ai à  connaître parce que des infractions sexuelles supposées planent dessus (aux doux yeux du ministère public, bien sûr, comme ce qui sera listé plus bas…), mais voilà , un article publié par mon provisoirement ibérique confrère Eolas m’incite à  le faire, tant ce à  quoi il renvoie me met hors de moi – et tant les commentaires qu’il suscite, nombreux comme toujours, sont parfois totalement déraisonnables, comme à  chaque fois que l’on parle des rapports qu’entretient la Loi, notre Mère à  tous1, avec la sexualité en général, et la sexualité des mineurs en particulier.2

Je vous avertis : ce texte n’a rien à  voir avec Monsieur Franck Ribery et ses passes de toutes natures, parce que je ne le connais pas, et que je moque à  peu près autant de ses aventures tarifées extra-conjugales que de l’Équipe de France de Football, en son ancienne ou toute récente composition, et du Football en général3, dont je pense qu’il est le seul sport où tout le monde triche ostensiblement et face caméra sans que personne n’y trouve rien à  redire, et surtout pas quand le tricheur est français, se roule par terre pendant que le ralenti prouve qu’il n’a pas même été effleuré par l’adversaire, images dégradantes m’écartant à  jamais de ce sport jeu spectacle, qui ont cependant un intérêt malgré tout : pendant qu’elles passent, les commentateurs sportifs télé français la ferment pudiquement, s’avisant soudain que leur lacet est défait, reposant enfin le téléspectateur en charentaises à  crampons de leurs cris intempestifs et inutiles.

Bref, je n’aime pas trop le foot – ce qui n’empêche personne de dormir.

En revanche, l’hypocrisie majeure avec laquelle le Sieur Ribery est aujourd’hui poursuivi procède, selon moi, d’une hypocrisie encore plus énorme qui pèse, judiciairement, sur les actes relatifs à  la sexualité dès lors qu’ils concernent des mineurs civils, mais majeurs sexuels – et l’application de ces textes, elle, me rend souvent insomniaque et révolté.

Comme dans l’histoire de cet homme que je dois défendre, et qui mérite de l’être à  plus forte raison que, pour parler vite, ça tombe bien j’adore ça, il n’a je crois strictement rien “fait de mal”.

Cet homme est un garçon d’une part, particulièrement doux et gentil, et d’autre part, particulièrement apprécié dans son métier, dans lequel les qualités d’humanité et de générosité, notamment, sont fondamentales.

Il se trouve qu’il est homosexuel, et que, pour des tas de raisons dont je vous fais grâce, il ne pouvait et ne voulait pas le dire jusqu’à  il y a peu de temps, ni à  sa famille, ni à  ses amis, ni moins encore dans le cadre de son travail.

Ne pouvant donc espérer aucune rencontre et plus si affinités au sein de ces différents milieux, et étant suffisamment connu dans sa petite ville de par ses fonctions pour ne pas pouvoir non plus en faire en allant en boite gay (je simplifie vous l’aurez compris, mais en gros c’est ça), il s’est, depuis quelques années, tourné vers les sites de rencontres Internet, et bien sûr tout spécialement les sites de rencontres ou la partie de sites dédiés aux personnes homosexuelles.

Comme pour tous les sites de ce genre, je suppose, s’y inscrivant, il prenait donc un pseudo, plus ou moins poétique, se connectait, et rencontrait d’autres garçons qui comme lui parlaient assez crûment ou pas, se rajeunissaient ou pas, et joignaient ou pas une photographie d’eux, à  poil ou pas, toutes les personnes concernées ayant volontairement effectué la même démarche d’inscription puis de dialogue – dans le but évident de trouver un partenaire de tennis ou d’échanger un peu leurs idées en matière de politique intérieure…

Dans son cas, à  une dizaine de reprises, ça a fonctionné : discussions, “chat” sur MSN avec échanges de photos, prise de rendez-vous, puis rencontre, et, euh, plus car affinités – ce “plus” ayant pu être une relation unique sans lendemain, mais également le départ d’une véritable histoire d’amour, qui a plusieurs fois duré.

Bon, jusque-là , je suppose que vous ne voyez pas trop ni à  quoi je veux en venir, ni ce qu’on lui reproche…

Moi non plus, justement, pour ce qu’on lui reproche, même avec la précision suivante, et c’est bien sûr là  que ça se gâte.

Mon client, à  peu près du même âge que moi, soit la trent quarantaine, se rajeunissait par coquetterie et pour séduire un plus grand nombre d’amateurs, sur les sites, affichant hardiment un “28 ans” qu’en plus, comme moi, il fait effectivement ; et il se trouve qu’il est4 attiré plutôt par les plus jeunes que par les plus vieux, de sorte qu’il privilégiait les “contacts” de la première catégorie – dix-huit ans souvent, tant qu’à  faire, et puisque tous étaient majeurs, ces sites réclamant à  l’inscription que l’on jure sur l’honneur et sur la tête de sa mère qu’on est majeur, évidemment…

Et là  où ça se gâte vraiment, c’est que la moitié au moins de ses rencontres effectives, et donc des histoires sexuelles ou amoureuses qui s’en sont suivi, ont en réalité eu lieu avec des mineurs, lesquels avaient menti sur leur âge réel, et étaient en réalité âgés de quinze à  dix-sept ans.

Pourquoi cela se gâterait-il, me demanderez-vous, alors que l’on sait que la majorité pénale sexuelle est fixée à  quinze ans, et que cet homme n’a jamais eu de relations avec de plus jeunes hommes ?

Eh bien, parce que si avoir des relations sexuelles consenties avec un mineur de plus de quinze ans n’est pas punissable, il se trouve qu’une tripotée de textes fait hypocritement d’à  peu près tous les actes de mon client qui ont précédé et permis ces relations des délits, vous l’allez voir…

La dernière rencontre de mon client se passe de la même façon que les autres, et concerne également un mineur d’âge, majeur sexuellement. Rendez-vous est pris, mais il se trouve que le garçon, qui est venu librement dans le café convenu, va se raviser rapidement au cours de l’entretien – il indiquera par la suite que mon client avait “un drôle de regard” – et partir, avant qu’il ne se soit passé quoi que ce soit.

Rentré chez lui, ses parents vont-ils lui demander ce qu’il fabriquait, ou bien cet adolescent, qui apprendra-t-on plus tard n’en est pourtant pas à  sa première rencontre de ce type, a-t-il cru de bonne foi être tombé sur un serial-violeur ? Toujours est-il qu’il va raconter l’histoire, et qu’une plainte va être déposée – initialement si je me souviens bien pour tentative de viol, rien de moins…

On arrêtera l’homme que je défends le lendemain, et on trouvera trace de très nombreux contacts avec photographies de nombreux très jeunes hommes chez lui (il les conservait tous et les “classait” en fonction de la possibilité de “conclure”, je sais ce n’est pas très glamour, mais c’était sa façon à  lui d’organiser sa vie sexuelle), mais aussi et surtout on l’entendra, évidemment.

Et mon homme, très mal en point psychologiquement avec sa sexualité cachée (et qui le malheureux estimera ne pas avoir besoin d’avocat en garde à  vue…), culpabilisé, dira en substance que oui, il rencontre des hommes jeunes via Internet puis en vrai, que oui, il a parfois couché avec des adolescents, que oui, c’est mal, et que oui, il a besoin d’être aidé…

Le fait que ces “aveux” soient bien plus ceux d’une problématique affectivo-sexuelle que d’actes pénalement répréhensibles n’arrêtera pas grand monde, on aura l’impression d’avoir attrapé un pédophile -argh, le gros mot aura été lâché, il était dès lors fichu d’avance –  polymorphe, et il sera placé en détention provisoire, sous l’accusation de tentative de viol et viols, principalement, mais également, et là  attention, textes subtils évidemment tout à  fait adaptés à  la situation que je viens de vous décrire et évidemment conçus et votés pour punir ce qui vient d’être raconté, de (Respirez… Ouvrez le ban) soustraction d’un mineur à  ses parents, favorisation de corruption de mineurs, via des messages sexuels électroniques à  destination d’un public non déterminé, propositions sexuelles via moyen de communication électronique suivies de rencontres, fabrication des mêmes messages, et enfin détention d’images pornographiques de mineurs (fermez le ban)…

On sent bien qu’on aurait bien aimé le poursuivre pour avoir commis toutes ces vilenies en bande organisée – mais là , vraiment, mon client étant un solitaire, on n’a pas pu…

L’instruction judiciaire du dossier consistera essentiellement d’une part, à  faire pratiquer une expertise fouillée5,  du contenu des ordinateur et téléphone de mon client, laquelle révèlera que sur plusieurs centaines de photographies de “contacts”, seules quelques unes, d’ailleurs jamais réouvertes après leur chargement initial concomitant au premier échange avec la personne sur Internet, représentent de façon pornographique de jeunes hommes, qui avaient cru bon de se photographier à  poil et dans des attitudes sexuelles au titre de leur avatar de drague sur les Sites du Démon ; et d’autre part et surtout, à  lancer une commission rogatoire visant à  entendre tous les jeunes cités par mon client comme ayant été ses amants, qui tous sans exception allaient confirmer ce que je vous en ai dit plus haut : relations libres et consenties, souvent amoureuses, aucune contrainte d’aucun ordre, tous majeurs sexuels au moment des faits, certains même ayant confirmé avoir provoqué la rencontre, tous indiquant enfin pratiquer exactement comme le mis en examen, et avoir eux-même, à  l’époque et depuis, eu leurs lots respectifs de relations sexuelles initiées de la même façon.

A noter sans doute, même si on s’en tamponne apparemment au plan pénal, que tous indiquaient avoir gardé un très bon souvenir de la relation, et conserver toute leur estime et leur affection à  mon client.

Lequel, au fait, a fait l’équivalent de plus d’une année de détention, avant jugement.

Pour avoir donc, soyons synthétique, ça me changera, avoir discuté, sur des sites conçus pour, avec des majeurs sexuels qui s’y étaient volontairement inscrits et y recherchaient la même chose, et avoir eu des relations sexuelles dépourvues de la moindre contrainte avec quelques uns d’entre eux.

Selon le ministère public, qui fort heureusement dans son réquisitoire de fin d’information abandonnait enfin les poursuites des chefs de tentative de viol et viols, si ces crimes n’ont jamais existé, parce que ces relations sexuelles ont été librement consenties, ayant d’ailleurs été bien plus des relations amoureuses que quoi que ce soit d’autre, et toujours avec des partenaires de plus de quinze ans, si le mis en examen a recherché ce type de rencontres et de relations, s’était même organisé dans ce cadre en classant et répertoriant les “contacts” obtenus sur Internet, mais n’a jamais rien fait d’autre – n’ayant, par exemple, jamais fréquenté de site pédophile ou pédo-pornographique, n’ayant jamais mis en place de stratagème, via ses fonctions ou pas, pour suborner un mineur d’âge, si le ou les sites qu’il fréquentait, en particulier ses échanges sur MSN, site de messagerie mondialement connu, étaient tous des sites légaux, certains réservés à  un public majeur, site de rencontres homosexuelles notamment, et que, comme tous les autres “adhérents”, y utilisait un pseudonyme, s’y rajeunissait un peu, et recherchait la rencontre de jeunes partenaires plutôt que plus vieux – comme ici encore exactement tous les sites de rencontres, hétérosexuelles ou pas, de France – et, comme sur ceux-ci, et MSN en premier, un contact s’accompagnait le plus souvent, pour des raisons évidentes en matière de rencontres amoureuses ou sexuelles virtuelles, d’une “pièce jointe” comportant au moins une photographie, plus ou moins sexuée…

Toutes les autres infractions initialement poursuivies sont constituées. Quelle qu’ait été l’intention de leur auteur en les commettant matériellement.

On discutera, pied à  pied, de chacune de ces infractions, évidemment, que ce soit au stade de l’instruction ou, si par malheur renvoi devant la juridiction de jugement il devait y avoir, devant le Tribunal Correctionnel, où mon client, debout devant le Banc d’Infamie et dans le cadre d’une audience très certainement publique, devra, à  nouveau, tout expliquer, tout révéler de lui-même – et où par parenthèse il comparaitra seul, aucun des sites concernés n’ayant fait l’objet de la moindre, je n’écris même pas poursuite, mais simplement enquête ou interrogation…

On dira à  quel point on est convaincu que notre homme n’a jamais “soustrait, sans fraude ni violence, un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l’autorité parentale […], puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende.”, parce que cette infraction requiert un élément moral, d’autant plus que la suivante dans le code vise la notion, pour les mêmes faits, de “rétention” de l’enfant, donc à  l’évidence un élément de contrainte, donc souligne à  l’envi que l’auteur doit avoir l’intention et la conscience de cette soustraction ; et qu’à  l’occasion de la tentative de relation ébauchée entre entre notre homme et l’adolescent, lequel s’était délibérément inscrit sur un site de rencontres homosexuelles sur lequel il mentait sur son âge, ce site étant réservé à  un public plus âgé, allait par la suite indiquer qu’il avait déjà  eu plusieurs relations sexuelles initiées de cette façon avec des adultes, fixait puis venait librement à  un premier rendez-vous convenu avec le mis en examen, alors même que les pseudonymes et les propos initialement échangés, tout aussi librement, étaient sans ambiguïté, on constatait que ledit mineur changeait finalement d’avis au cours du rendez-vous, et le quittait tout aussi librement, mettant fin à  la rencontre, sans qu’il ne se soit strictement rien passé d’autre qu’une conversation libre…

On dira qu’il n’a pas plus eu conscience de commettre quoi que ce soit d’illégal en utilisant le Ouaibe, et n’a jamais “[…] favorisé ou tenté de favoriser la corruption d’un mineur, puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende. Ces peines sont portées à  sept ans d’emprisonnement et 100000 euros d’amende lorsque […] le mineur a été mis en contact avec l’auteur des faits grâce à  l’utilisation, pour la diffusion de messages à  destination d’un public non déterminé, d’un réseau de communications électroniques […]”, en étant plus que jamais  stupéfait face à  l’hypocrisie, ici en tout cas, de cette accusation, qui voudrait punir, non pas l’acte sexuel survenu entre un majeur et un mineur de plus de quinze ans consentant, mais les éventuels “outils” de la rencontre ayant nécessairement précédé cet acte… Et on dira (discutant même de la matérialité de l’infraction, les propos “de nature sexuelle” n’ayant nullement été tenus par messages “à  destination d’un public non déterminé”, mais tout au contraire toujours dans le cadre d’échanges privés, entre des “adhérents” ou des “inscrits” d’un site ou d’un réseau donné – et les destinataires des messages du mis en examen l’étaient, tous, et envoyaient au surplus des messages exactement similaires, qui plus est sur des sites où la majorité sexuelle était requise et qui avaient pour objet-même ces échanges !) qu’il n’a jamais “favorisé la corruption” de qui que ce soit : la corruption pénale d’un mineur, c’est le fait de lui soumettre des éléments de sexualité dont il n’a auparavant pas conscience, de le mettre en prise avec d’éventuelles perversions, en tout cas des actes ou des mots qu’il ne connaissait pas – et que strictement tous ses interlocuteurs ont confirmé qu’ils s’étaient eux-mêmes inscrits sur ces sites, avaient recherché ce type de rencontre, et qui plus est pour certains en avaient vécu une, parfois de plusieurs mois, amoureuse, avec lui, public averti, venu là  pour exactement les mêmes raisons que lui, utilisant d’ailleurs souvent des pseudonymes et des mots bien plus explicites que les siens…

On dira, en criant si faire se peut, que le même homme n’a pas “fait des propositions sexuelles à  un mineur de quinze ans ou à  une personne se présentant comme telle en utilisant un moyen de communication électronique est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 Euros d’amende. Ces peines sont portées à  cinq ans d’emprisonnement et 75 000 Euros d’amende lorsque les propositions ont été suivies d’une rencontre.”, parce qu’aucune infraction dans ce domaine ne peut être strictement formelle, sans requérir d’intention, et que ce texte a évidemment été voté pour des situations complètement autres… Texte ahurissant d’ailleurs qui  n’existe que si l’électronique est utilisée (!), vise non seulement les mineurs de quinze ans mais encore “ceux qui se présentent comme tels” (!!), et alourdit les peines encourues si “rencontre” s’en est suivi (!!!), sans se préoccuper ni de la nature, ni de l’origine, de ladite rencontre avec un majeur sexuel… On ajoutera même qu’on ne sait rien de quel échange est visé, de qui des deux interlocuteurs a effectivement proposé la rencontre à  l’autre le premier, ou en a parlé… Et qu’ici encore, il n’est pas juste d’envisager que le mis en examen ait eu la conscience, au sens de l’élément pénal moral requis, de commettre une infraction, alors qu’il fréquentait des sites de… “Rencontres”, fabriqués à  cette fin, et librement fréquentés par des majeurs sexuels au sens de la loi pénale, avec lesquels, si l’on retenait l’existence d’une intention, il faudrait, par une construction mentale aberrante, accepter de retenir que la “rencontre” elle-même est parfaitement légale, mais qu’en convenir par mail ne le serait pas..?

On dira encore une fois les mêmes choses s’agissant du fait de “fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support un message à  caractère violent ou pornographique ou de nature à  porter gravement atteinte à  la dignité humaine, soit de faire commerce d’un tel message, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur”, oui, un mineur, et non pas un mineur de moins de quinze ans ici, alors même pourtant qu’il s’agit pour la troisième fois en réalité exactement de la même infraction, portant sur les mêmes faits, et qualifiée différemment, et outre les arguments déjà  exposés, on contestera cette pluralité de qualifications, et donc de poursuites, des mêmes faits…

On dira encore, enfin, sur “[…] l’image ou la représentation d’un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique “ et “le fait de consulter habituellement un service de communication au public en ligne mettant à  disposition une telle image ou représentation ou de détenir une telle image ou représentation par quelque moyen que ce soit, puni de deux ans d’emprisonnement et 30000 euros d’amende.” que, si ici, l’infraction est matériellement constituée, le processus était, toujours et comme pour les mages “normales”, le même à  chaque fois : contact, demandé ou accepté, échange d’un message, conservation du message et de son annexe la photographie en pièce jointe, pour identifier dans le futur si besoin était le “contact”, à  la manière de tout carnet d’adresse, et mécaniquement, vu le nombre, étant au surplus rappelé qu’aucune des quelques photographies concernées n’a jamais été réouverte ensuite… Et que ces photos ont été prises et annexées à  leurs profils par les personnes représentées elles-mêmes – étant, paradoxalement,  souligné que mon client n’a plus jamais contacté celles-ci, justement parce qu’il ne souhaitait pas tant un type de rencontre aussi directement et exclusivement fondé sur le sexe, que des rencontres amoureuses ; que c’est donc sans intention ni conscience, et toujours dans le même contexte, que cet homme détenait ces images-là , aux antipodes des “images pornographiques” dont la détention se trouve réprimée dans le but de supprimer la demande, sur les sites Internet pédo-pornographiques, jamais fréquentés par lui…

Et on dira encore beaucoup d’autres choses, que je ne peux pas développer ici sans trahir plus avant le dossier réel ; et si l’on ne convainc pas qu’il n’existe pas de charges suffisantes pour envoyer cet homme se faire juger comme un délinquant, on fera, à  l’audience, citer toutes les personnes concernées, et aussi les responsables des sites incriminés, et on leur posera toutes les questions utiles…

Je n’ai pas rendu compte de tout ceci pour vous proposer de vous prononcer sur l’innocence ou la culpabilité de l’homme que je défends, moins encore sur la moralité ou l’amoralité de ses actes – j’ai évidemment mon opinion sur ces deux sujets, et j’imagine que vous en avez une vague idée – même pas parce que je suis son avocat, mais parce que je crois, sincèrement et profondément, qu’il est honnête, et n’a commis – ou pensé commettre, ce qui en droit devrait revenir au même (“Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre.”, article 121-3 du code pénal.) – aucun délit. Rien.

Je voulais en revanche vous dire à  quel point, dans ce domaine éminemment sensible des actes sexuels commis “contre” ou “avec” des mineurs, on est, côté législatif, notoirement indéterminé, contradictoire, et condamné à  l’hypocrisie la plus absolue, faute de se déterminer clairement et avec réflexion sur un certain nombre de fondamentaux – il est ainsi, l’énormité de cette affirmation m’a fait y réfléchir deux fois avant de l’écrire, aujourd’hui plus grave de parler de sexe à  un mineur de plus de quinze ans consentant sur un forum Internet que de coucher avec lui, le premier acte pouvant constituer un délit, l’autre n’étant pas pénalement répréhensible (Ou peut-être que…).

Faute, par exemple, d’avoir affiné un certain nombre de définitions relativement aux infractions dont je vous parlais plus haut, dont les débats parlementaires éclairent souvent sur les intentions et les contours, mais qui, dans le texte, débouchent parfois sur des stupidités injustes à  mes yeux, comme ici.

Faute peut-être également de régler son compte définitivement, dans un sens ou dans un autre, à  cette fameuse majorité sexuelle de quinze ans, qui peut se discuter amplement, dans les deux sens –  à  titre personnel, je ne suis pas bien certain qu’il soit plus ou moins grave d’élire un Président de la République que d’accepter en soi le sexe d’un adulte pour la première fois, par exemple ; et je ne suis pas sûr non plus de sauter de joie si un jour, Mômette6 m’annonce vers ses quinze ans qu’elle couche avec des types sympas de mon âge, rencontrés sur je ne sais quel forum – je sais, je suis vieux et rétrograde, quand je veux.

Mais je ne suis pas certain, mais alors pas du tout, dans les deux cas, que parce que l’idée me heurte, pour tout un tas de raisons, je sois en mesure d’exiger qu’on criminalise ces comportements et leur “auteur” adulte. Et encore beaucoup moins, qu’on fasse semblant de ne pas le faire, et qu’on le fasse finalement, mais par des chemins tellement tortueux que, pour dire les choses, ils n’ont pratiquement plus rien de juridique – les infractions précitées se passent presque de tout caractère intentionnel, ça me tue mais c’est comme ça.

En matière de viol ou d’agression sexuelle “simples”, si l’on peut dire, un adulte par un adulte sans circonstances particulières, on va examiner, toujours, l’existence de l’élément matériel, mais aussi celle de l’élément moral, l’absence de consentement de la victime et la “violence, contrainte, menace ou surprise” par laquelle le violeur ou l’agresseur aura imposé l’acte.

Plutôt que d’avoir empilé un certain nombres de présomptions au fil du temps et de l’évolution des mœurs et des techniques, plutôt que de prétendre punir les moyens par lesquels les actes se commettent plutôt qu’un certain nombre d’actes eux-mêmes, quels qu’en soient les moyens, peut-être faudrait-il revenir à  ce fondamental dans toutes les situations, et laisser le juge rechercher, à  chaque fois et sans conditions d’âge ou de circonstances, si l’acte a été imposé, et comment..?

Je n’ignore pas que le problème est considérable, je n’ignore rien des ravages que subissent les mineurs auxquels un acte sexuel est imposé, j’en assiste tous les jours, je crois savoir, même si je ne le saurai jamais vraiment, ce que sont ces destructions…

Mais je n’ignore pas plus le carcan de honte et d’incriminations connexes pesant sur certains hommes et certaines sexualités, pourtant libres en elles-mêmes, ni la destruction totale d’un individu que peut parfois générer toute cette législation mouvante, complexe, et d’application bien souvent largement aveugle ; qui peut parfois, en me le rendant du coup presque sympathique, faire chuter un homme de son piédestal en carton (Ribery), ou bien le priver de sa liberté et broyer sa vie, déjà  tourmentée, en quelques minutes (l’homme dont je parle ici, qui se reconstruit lentement depuis sa libération, mais avec quelles difficultés -et il n’est pas jugé…) ; ou encore, parfois, tue.

Ce que je sais, comme tous les intervenants du dossier, en tout cas, c’est que cet homme n’a jamais contraint qui que ce soit à  quoi que ce soit. Et que s’il avait fait exactement les mêmes choses, à  la même fréquence, avec les mêmes personnes, mais au téléphone, il serait officiellement innocent.

Ce que je sais, à  vrai dire, c’est qu’il l’est.

  1. Donc obligatoirement incestueux, les rapports… []
  2. Pour les jeunes, justement, de tous âges y compris moins de quinze ans, qui me lisent, ce titre est une “petite variation” un peu tordue sur celui d’une œuvre inachevée de Mozart, un type qui faisait de la musique dans le temps après avoir gagné la Starac’ de l’époque. Fermez les yeux et écoutez, c’est joli. []
  3. J’ai bien découvert à  cette occasion que “Touche”, c’est quand le ballon franchit une ligne blanche, et que je suppose ça vient du fait que là  on a le droit de le toucher, mais je vous avoue que ça ne me donne pas la sensation d’avoir ignoré grand-chose avant… []
  4. C’est incroyable ce que c’est répandu,en matière de sexualité en général, cette manie… Il doit y avoir une explication rationnelle… []
  5. Un salut pour le coup fraternel à  Zythom : moi aussi, je m’en suis tapé par dizaines, des examens de fichiers qui laissent un gout de cendre dans la bouche… Mais là , vraiment, ce n’était pas le cas. []
  6. Fort heureusement encore âgée de moins de deux ans ce qui nous donne un peu de temps… []