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Ce blog avait moins trois ans…

[ Allez : petit exercice de style, improvisé tôt ce matin et ça se voit, j’en demande d’avance pardon, pour fêter les trois ans du blog, que ni ma chère Marie, ni moi-même, n’avions vu venir -elle me l’a tout de même signalé hier soir, ayant, comme toutes les femmes, une perception du temps infiniment plus établie que la mienne…

J’avoue que je n’aurais rien fait du tout, étant crevé, si Mômette n’avait décidé de me réveiller en sursaut vers quatre heures en braillant à  vingt centimètres de mon oreille, après un parcours nocturne périlleux avec ses petites gambettes et dans le noir de son lit à  celui de ses parents : “PAPA, TU DORS PAS ? VEUX FAIRE CACOU !! IL EST OU MON DOUDOU ??” : quoi qu’il en soit de l’engueulade s’en étant suivie1, grâce lui soit rendue, puisque sans elle vous n’auriez pas le plaisir de lire ce chef d’œuvre…

Il va de soi que tout éventuel commentaire -mais franchement ça mérite pas, hein, c’est juste pour sourire et marquer le coup- devra être effectué en vers, pas de raison que je demeure le seul à  m’être fait chier !

Pour les jeunes avocats, donc illettrés, qui nous lisent, avidement je le sais : le poème d’origine est de feu Monsieur Victor Hugo, qui, non, n’est ni un joueur de foot, ni un candidat de la Nouvelle Star -mais il aurait pu, sûrement.

Et plus sérieusement : merci, lecteurs d’ici, avoir bien voulu parfois bien aimer ce qu’on y écrit ! On en a sous le coude, vous verrez !! ]

Ce blog avait moins trois ans ! Mô remplaçait le Maître,
Déjà  tous les clients passaient par la fenêtre,
Et de l’avocaillon, déjà , par maint endroit,
Le front du narrateur brisait le masque étroit.
Alors dans le Vieux-Lille, beau quartier rénové,
Jeté sur Internet sans vraiment y penser,
Naquit d’un sang du Nord, puis Corse tout à  la fois
Un site plein de couleurs, fait de mots et de Droit ;
Si débile qu’il fut, quelques lecteurs y vinrent,
Abonnés précieux, qui malgré le temps tinrent,
Et  ses textes initiaux, minces comme de frêles roseaux
Cédèrent doucement la place à  d’infinis longs mots.
Ce blog créé quand l’auteur était ivre,
Et qui n’avait pas même un lendemain à  vivre,
C’est le mien.

Je vous dirai peut-être quelque jour
Quel lait pur, que de soins, que de vœux, que d’amour,
Prodigués pour sa vie en naissant condamnée,
M’ont fait dix fois l’enfant de codeurs obstinés,
Anges qui sur trois fils attachés à  leurs pas
Épandaient leur savoir et ne mesuraient pas !
ô l’amour des amis ! Amour que nul n’oublie !
Pain merveilleux qu’un dieu partage et multiplie !
Table toujours servie au ouaibesque foyer !
Chaque blogueur a sa part et tous l’ont tout entier !

Je pourrai dire un jour, lorsque la nuit gâteuse
Fera parler les soirs ma vieillesse conteuse,
Comment, en ces lieux pleins de larmes et emplis de sourires
Qui commençaient à  peine à  vraiment se faire lire,
Parce que Mussipont, Aliocha, Eolas,
D’en faire publicité m’avaient offert la grâce,
Arriva une juge, ce qu’onques n’aurait parié :
Marie, qui, sitôt, s’y mit à  publier,
Et devint après coup, des mots à  l’émotion,
Une amie, ma complice, ma sœur en édition !

Maintenant, jeune encore, peu souvent éprouvé,
Ce blog a deux-cent textes, certains encore larvés,
Et l’on peut distinguer bien des choses passées
Dans les plis de ses pages, lentes à  s’afficher.
Certes, plus d’un éditeur, à  l’affut de nos flux,
Tombé de lassitude après mes lents refus,
Pâlirait s’il voyait, comme un gouffre dans l’ombre,
Nos soixante-douze brouillons -c’est dire si, en nombre,
Des histoires sévères, d’autres textes bien plus gais,
Nous avons encore à  finir, puis à  vous délivrer.
Le temps pour l’avocat est comme plaie en Égypte,
Et le temps, sur un blog, le transforme vite en crypte.2
Marie et Mô le savent, n’en doutez pas, amis,
Nos lecteurs, nos frères : patientez, on écrit !

C’est si vrai que parfois, je dois le confesser,
Mon âme, par périodes, s’est ici dispersée ;
Si j’adore raconter l’amour et la douleur
Dont les juristes pénaux connaissent à  toute heure,
J’ai parfois sacrifié, pour remplir cet endroit,
L’amour de ma femme, mon métier d’avocat,
Qui pourtant font ma sève et me font tenir droit !
On ne peut, on le sait, faire tout à  la fois.
J’ai dû me faire violence, écarter mon clavier,
Revenir vers les Miens, rattraper mon métier,
Cesser aussi un peu, pourquoi ne pas le dire,
De me croire écrivain -tout ça n’est que pour rire.
L’amour, plaider, défendre, là  se trouve la vraie vie,
Le reste n’est qu’accessoire, malheur à  qui l’oublie !
Pourtant j’aime ce blog, sa construction nocturne,
J’aime y faire partager grandeurs et infortunes
De mes audiences de sueur, pénalistes combats…
Il faut juste, pour les dire, être, avant, Avocat !

D’ailleurs j’ai purement passé les jours mauvais,
Et je sais d’où je viens, si j’ignore où je vais.3
L’orage des questionnements a préservé mon âme,
M’enivrant de travail, j’ai retrouvé ma flamme.
Le sommeil me manque, la belle affaire, vraiment :
Mort, je dormirai. Et je suis bien vivant !

Que deviendra ce blog, après ces trois années,
ô fidèle lecteur, ô lectrices adorées ?
C’est impossible à  dire, mais une chose est certaine :
Nous écrirons encore, c’est, je crois, dans nos veines !
La véritable Vie n’est qu’une vaste audience
Dont nous attendons, tous, les plus jolies sentences !

  1. Puisqu’évidemment son putain de Doudou était dans son lit, et de cacou, en réalité, point… Je lui ai donc réexpliqué pour la centième fois, pédagogiquement hein, attention, que, le vendredi soir, papa boit souvent déraisonnablement, et que partant, c’est LA nuit de la semaine où il doit roupiller un peu… []
  2. Cette rime, d’une densité rare, et qui m’a coûté le contenu d’une cafetière, vous est offerte par les établissements Mirliton – avec Mirliton, tous les mots ont un sens, tous les sens ont un mot ! []
  3. Ces vers sont volés tels quels au véritable auteur / Qui ne m’en voudra pas : il est mort, par bonheur ! (Ouh… Heureusement que ce poème touche à  sa fin, ça devient n’importe quoi. J’ai -délicieusement- honte…) []