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“On a les juges qu’on mérite !”

[ Cet excellent titre (merci pour lui) est l’une des phrases récurrentes de mon désormais très célèbre confrère Eric Dupont-Moretti, que je lui pique allègrement, car il n’est pas du genre à  faire des procès pour rien (Eric, si tu me lis, c’est une blague !)… ]

C’est, parfois, si vrai …

Hier, petite audience correctionnelle à  juge unique, surchargée comme il se doit, et présidée par le magistrat dont j’ai déjà  parlé ici.

Une mienne consoeur, dont je tais le nom pas tant par crainte de procès que par pure charité, enchaîne la défense de trois personnes dans trois dossiers successifs, avec d’ailleurs une première difficulté liée au fait qu’elle plaide à  voix basse, ce qui est surprenant, et gêne beaucoup l’écoute, mais là  n’est pas le problème, le problème, c’est plutôt qu’on parvienne malgré tout à  entendre l’argumentation qu’elle développe, malheureusement pour tout le monde :

– dossier 1 : elle demande le renvoi, sans avoir prévenu personne, au motif intéressant qu’elle “n’a pas eu le temps de lire le dossier” ..!

– dossier 2 : elle défend un récidiviste de conduite en état alcoolique et, pour toute défense, s’oppose aux réquisitions en ce qu’elles visent notamment l’annulation du permis, et demande au Tribunal de bien vouloir ne prononcer qu’une suspension …

– dossier 3, enfin, qui d’ailleurs nous oppose : elle défend l’auteur d’un coup de couteau qui a “piqué” mon client à  l’épaule, pour un simple regard échangé dans un supermarché et jugé malveillant, avec un couteau à  cran d’arrêt qui, si la victime n’avait pas eu le réflexe de se déporter, lui aurait probablement troué un poumon et, alors que les faits sont reconnus, faisant d’ailleurs l’objet de plusieurs témoignages concordants, plaide la “blessure involontaire” en prétendant soudain, à  l’inverse de tout ce qui figure au dossier, que son client a frappé avec un couteau … dont la lame n’était pas sortie ..!

Et, pour étayer cette surprenante (pour mon client surtout, qui a eu l’épaule coupée !) allégation, montre au magistrat en fin d’audience une attestation d’un ami de son client, que personne, votre serviteur inclus, pourtant constitué partie civile, n’a jamais vue.

Ami lecteur, sauras-tu reconnaître le nombre impressionnant d’erreurs majeures et absolument catastrophiques pour la Défense, le résultat à  obtenir, l’image de ce qu’est un Avocat, et la Commission d’Office (car c’en étaient évidemment), contenues dans ces interventions, qui ne donnaient qu’une envie, et pour une fois pas seulement aux justiciables : s’enfuir de cette salle au plus vite ?

Réponses dans quelques heures, après l’audience…